"Unis" face au "mépris", plusieurs milliers de médecins libéraux dans la rue

14/02/2023 Par Louise Claereboudt & Aveline Marques & Alexandre Lippini
La rupture est consommée entre les médecins libéraux et les pouvoirs publics. Ce mardi 14 février, alors que les sénateurs ont entamé l’examen de la proposition de loi Rist, plusieurs milliers de praticiens accompagnés de leurs représentants, unis, ont foulé les rues de la capitale pour crier leur colère. Egora s’est glissé dans les rangs de ce cortège particulièrement massif.
 

Aux slogans de "médecins méprisés, patients en danger", "médecins sous pression gare à l'extinction", "Rist, arrête le hors-piste" ou encore "Médecine Uber eats, médecine à hauts risques", plusieurs milliers de médecins libéraux et d'étudiants ont manifesté à Paris, mardi 14 février, pour la revalorisation de l'exercice et contre la proposition de loi Rist en cours d'examen au Sénat. La préfecture de police évoque le nombre de 4 500 participants, contre 10 000 pour les organisateurs.

© Louise Claereboudt

Le cortège ouvert par les voitures de SOS Médecins est parti en début d'après-midi des Invalides pour rejoindre le Panthéon. Cette troisième manifestation (après celles du 1er décembre et du 5 janvier) rassemblait cette fois l'ensemble des syndicats représentatifs des médecins libéraux, les praticiens du mouvement Médecins pour demain, ainsi que les représentants des étudiants, des internes en médecine, des remplaçants et des jeunes médecins. Le Collège de médecine générale ainsi que le Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom), représentés par leurs présidents, les Drs Paul Frappé et François Arnault, étaient également présents en soutien au mouvement. "Il fallait qu'on soit là", a commenté sobrement le président du Cnom, dont la participation est qualifiée d'"exceptionnelle".

© Louise Claereboudt

"Depuis décembre, on espère être entendus, maintenant qu'il n'y a plus seulement la voix des Médecins pour demain, on espère que les autorités entendront nos arguments et les solutions que nous proposons", a déclaré la Dre Christelle Audigier, à la tête du collectif né sur Facebook à l'automne dernier. L’unité "prouve la profondeur du mouvement", a souligné de son côté la Dre Agnès Giannotti, présidente du syndicat MG France. Malgré "nos différences, on fait un constat commun et nous sommes là unis aujourd'hui." "Il y a un mépris envers les médecins. Tout le monde en a pris conscience avec la PPL Rist et les négociations conventionnelles", a renchéri la Dre Corinne Le Sauder, présidente de la FMF. Rejetant les "contraintes" du contrat d'exercice territorial (CET) proposé par la Cnam et déplorant la trop faible revalorisation proposée (+1,5 euro pour l'ensemble des consultations), les six syndicats ont suspendu leur participation aux groupes de travail techniques des négociations. Un nouveau cycle de réunions bilatérales devait démarrer dès demain, mercredi 15 février, mais les séances ont été décalées d'une journée et se tiendront jeudi 16 et vendredi 17 février. La présidente de la FMF y voit pour la Cnam "l’occasion de revoir sa copie". "Pour l’instant, c’est de l’information pas de la négociation", déplore-t-elle.

© Louise Claereboudt

Les médecins libéraux exigent également le retrait de la PPL Rist, qui "a provoqué la colère" de la profession en ouvrant l'accès direct aux infirmières en pratique avancée (IPA), aux masseurs-kinésithérapeutes et aux orthoptistes, rappelle le Dr Franck Devulder, président de la CSMF. Le texte, déjà fortement amendé par la commission des Affaires sociales du Sénat, doit être examiné aujourd'hui en séance plénière. "Les IPA sont un échec. Il n'y en a même pas 100 sur le territoire. Cela ne marche pas", a taclé le Dr Jérôme Marty. Pour le président de l'UFML, l'accès direct à ces professionnelles n’est en rien une solution pour améliorer l’accès aux soins et rendre le métier de médecin de nouveau attractif.   "Les premiers concernés, ce sera nous, les jeunes médecins" Après la "4e année d'internat de médecine générale passée au forceps", "les propositions de loi coercitives qui se multiplient", le "CET et les 26,5 euros sont le meilleur moyen de tuer l'attractivité de la médecine générale, a lancé Raphaël Presneau, président de l'Intersyndicale représentative autonome des internes de médecine générale (Isnar-IMG). Ce n'est pas comme ça qu'on résoudra les problèmes d'accès aux soins." Et de poursuivre : "Pour nous, c'était hyper important d'être là, c'est l'avenir de notre métier qui se joue. Les premiers concernés, ce sera nous, les jeunes médecins."  

© Louise Claereboudt

Saluant prudemment le retrait de la PPL du groupe Horizons instaurant une régulation à l'installation, les médecins libéraux attendent désormais de connaître le sort parlementaire de la PPL Rist et de prendre connaissance des nouvelles propositions de la Cnam pour décider des suites du mouvement. Un appel à la grève illimitée à compter du 27 février a d'ores et déjà été lancé par Médecins pour demain. Egora vous a concocté une petite rétrospective des pancartes. Les médecins ont du talent... 

 
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