Grève, entretien avec Braun, participation aux négos… Les confidences de la présidente de Médecins pour demain
En quelques mois, Médecins pour demain est passé de 5 à près de 16.000 membres, comment gérez-vous l'explosion de ce mouvement ? L'aviez-vous anticipé ? Dre Christelle Audigier : Quand j'ai créé le groupe, je ne savais pas à quoi m'attendre, ni quels en seraient les résultats. Il y avait une chance sur deux que ça se transforme en bureau des plaintes et que ce ne soit pas constructif. Fort heureusement, les médecins ont été dans un objectif de trouver des terrains d'entente et des solutions. Et ils se sont rapidement accordés sur les solutions. Rapidement, l'équipe de 5 a pris de l'ampleur. Les médecins étaient très volontaires pour aider à l'organisation du mouvement. On a plusieurs équipes : communication, presse, gestion nationale… J'ai une personne qui est mon chef de cabinet qui gère un peu tout et qui fait la gestion des équipes. Et nous avons une organisation nationale qui s'est mise en place grâce aux groupes Whats App. Je pense que nous devons être pas loin de 150 à 200 médecins qui travaillent vraiment pour le mouvement et qui ne sont pas que des membres qui suivent. Ça s'est développé très rapidement. Il y a vraiment cette idée de solidarité et de fraternité. Les médecins arrivent bien à communiquer entre eux, donc on fonctionne bien. Ma vie de médecin n'a pas changé, mais tout le travail que je fais pour Médecins pour demain, je le fais sur ma vie personnelle. Je me réveille et je me couche avec le mouvement, sept jours sur sept. ça a été un peu difficile à comprendre pour mon mari au départ, mais il a bien compris et il me soutient. Bien que vous soyez un mouvement asyndical et apolitque, vous avez pris du poids politique, puisque vous avez été reçue par le ministre de la Santé François Braun. Comment s'est déroulé l'entretien ? L'entretien s'est très bien passé. Les échanges ont été cordiaux. On a bien senti qu'on parlait la même langue. En face, on avait certes un politicien, mais avec une base médicale. Il nous a proposé de rester dans l'échange et de se revoir ultérieurement pour discuter de nos propositions. C'était donc plutôt positif. Mais je ne pourrais pas non plus conclure qu'il en est ressorti quelque chose de concret. On est dans l'ouverture. Quelle a été sa position sur le C à 50 euros ? Dans l'immédiat il a dit non, mais pourquoi pas dans l'idée d'un point à l'horizon. La porte n'est pas fermée.
Certains médecins déplorent que le C à 50 euros étouffe d'autres de leurs revendications, comme l'amélioration des conditions de travail par exemple. Ne craignez-vous pas que cette demande principale d'une revalorisation financière ne vous desserve ? C'est pour cela que nous avons officialisé nos propositions, pour bien faire entendre que le C à 50 euros fait partie de la revalorisation des honoraires, mais qu'il y a d'autres leviers sur lesquels il faut appuyer, car le problème est global, il n'est pas que sur la revalorisation. Bien entendu, dans notre idée du médecin libéral, une revalorisation des honoraires est indispensable et permet d'ouvrir beaucoup d'autres portes. Cela permet de payer un employé, de le former. A l'heure actuelle ça n'est pas possible. D'autant que lorsqu'on a un employé, il faut des locaux plus grands… Tout cela est un cercle. Vous avez été présente lors de la dernière séance de négociations conventionnelles multilatérale, qu'en avez-vous pensé ? Les propositions du directeur de l'Assurance maladie vous ont-elles convaincues ? J'ai été surprise que sur une telle réunion, avec de tels enjeux, aucun des syndicats n'ait eu des documents avant la séance. Qu'ils craignent la diffusion, certes, mais à un moment donné, il faut pouvoir travailler. Dans ces conditions on ne peut pas avancer ou cela va prendre des mois. Il a été convenu après coup que les ordres du jour seraient au moins émis avant les plénières, ce qui me semble être un minimum. La séance à laquelle j'ai assisté a été une présentation des conclusions des bilatérales qui convenaient à la feuille de route de Thomas Fatôme. Plusieurs sujets ont été oubliés, comme la retraite, le secteur 2 ou encore les rendez-vous non honorés… Donc c'était un peu pauvre. D'autant qu'aucun chiffre n'a été mis sur la table. Ça n'avance pas. C'est juste un joli texte bien rédigé. Serez-vous également présente aux bilatérales ? Oui normalement je serai présente. Vous assistez à ces négociations en tant qu'observatrice invitée aux cotés de l'UFML-s, alors que vous vous dites asyndicale. Vous semblez toutefois plus proche de ce syndicat. Est-ce la réalité ? C'est une impression qui vient du fait que l'UFML-s a été...
le premier syndicat à nous soutenir officiellement et sans arrière-pensée. Ils ne nous ont pas demandé de les rejoindre. Ils sont venus vers nous et nous ont dit "on vous soutient, de quoi avez-vous besoin ?". Ils ont vraiment respecté notre autonomie et notre indépendance. Ils n'avaient rien contre le fait qu'on discute avec d'autres syndicats, structures ou collectifs, ce qui est constructif. Nous avons également la FMF, le SML et Jeunes médecins qui nous soutiennent. Nous sommes donc toujours asyndical et apolitique. Sur les réseaux sociaux, vous êtes accusé de faire de "l'IPA bashing" en critiquant les infirmières de pratique avancée, comment vous défendez-vous ? Ce que nous critiquons, ce n'est pas les IPA en elles-mêmes. Elles ont des compétences. Le problème c'est la législation qui les entoure. Dans les textes, on parle d'un accès direct et de la possibilité de faire des actes médicaux, diagnostics et de prescription. Derrière, en pratique, ce qu'il se passe dans certains endroits, puisque nous recevons des témoignages, c'est qu'elles n'assument pas la responsabilité et la suite de leurs prescriptions et de leurs actes. Le problème c'est également que nous sommes dans un conflit avec l'Etat. Nous voyons une revalorisation plus que notable de cette profession, et la nôtre, il faut presque qu'on se prosterne et qu'on se batte bec et ongles pour l'obtenir. Enfin il y a aussi le problème de possibilité d'un exercice illégal de la médecine qui pourrait mettre en danger les patients et entraîner beaucoup de surcoûts. Par contre les IPA en elles-mêmes peuvent être de grandes aides dans les structures pluriprofessionnelles. Nous n'avons rien contre cette profession.
Vous annoncez une grève d'une semaine reconductible à compter du 26 décembre, avez-vous déjà des prévisions de participation ? Nous avons fait un sondage auquel les médecins ont peu répondu. Je crois que nos confrères sont sous l'eau avec les épidémies. Certains médecins vont se mobiliser, mais pas forcément avec une fermeture complète, c'est donc difficile de chiffrer ces médecins-là. Nous accueillons tous les médecins qui se mobilisent. La clé est de pouvoir sortir de ce marasme.
-Consultation de base à 50 euros remboursée par l’assurance maladie et les complémentaires santé
-Revalorisation des visites à domicile à 80 euros
-Revalorisation des consultations spécialisées longues et complexes (psychiatres, pédiatres, rhumato et autres…)
-Possibilité du cumul des actes à taux plein
-Possibilité de coter une consultation + un acte
-Remplacer les mesures coercitives par des solutions adaptées répondant aux problématiques de Santé Publique
-Augmenter le seuil de téléconsultations au-delà des 20%
-Relancer la médecine foraine avec encadrement strict
-Simplifier l’installation avec l’accompagnement par un interlocuteur dédié et un guichet unique
-Suppression de la ROSP
-Diminuer le temps administratif
-Auto déclaration des arrêts de moins de 3 jours sur Ameli.fr et des jours enfants malade
-Responsabiliser le patient qui n’honore pas son rendez-vous médical
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