Il aurait utilisé une centaine de patients comme "cobayes" : un chirurgien devant la justice
Il est soupçonné d’avoir utilisé une centaine de patients comme "cobayes". Depuis ce mercredi, et durant trois jours, un chirurgien du service d'orthopédie et de traumatologie de l'hôpital de Gap comparaît devant le tribunal correctionnel pour "recherche biomédicale sans autorisation". Il est accusé d’avoir injecté du ciment acrylique dans les disques intervertébraux de ces patients, sans leur consentement, entre 2015 et 2017. Une technique qui n’est pas autorisée par les autorités scientifiques françaises. Seule la cimentoplastie vertébrale l’est. Quelque 126 patients seraient concernés par cette expérimentation, réalisée hors de tout cadre légal. Au premier jour de l’audience, mercredi, le praticien a expliqué avoir utilisé cette technique – efficace selon lui à 75% – pour "soulager la douleur" de ses patients et leur "éviter, compte tenu de leur âge, une chirurgie plus lourde". Plusieurs patients, qui se sont constitués partie civile, assurent cependant ne pas avoir été prévenus par le chirurgien de la technique expérimentale qui serait utilisée. L’un d’eux, opéré en 2017, a déclaré "avoir découvert deux mois après l'intervention qu'on [lui] avait fait une cimentoplastie". L’homme est depuis reconnu handicapé et souffre de douleurs permanentes. Il a par ailleurs dû subir de multiples opérations après la fuite du ciment introduit par le chirurgien de Gap, indique France 3. "Si on m'avait dit : tu vas servir de cobaye, j'aurais peut-être réfléchi, [...] pourquoi pas. Mais au moins j'aurais pu peser le pour et le contre en sachant qu'il y avait un risque que ça ne marche pas", a déclaré la victime.
A la barre, le praticien a indiqué qu’il avait agi dans le cadre de "soins courants", ne nécessitant pas l’accord des patients. "Ce sont de petits gestes comparés à un acte global de chirurgie. Il s'agit simplement d'une injection", a-t-il justifié, ajoutant que cette technique a été utilisée par d’autres confrères. D’après les éléments de l’enquête, trois autres chirurgiens la pratiquaient en effet. L’accusation a toutefois reproché au praticien de s’être "départi du cadre législatif médical" en utilisant une méthode innovante sans "l'aval de l'autorité compétente", ni le "consentement libre, éclairé ou express" de ses patients. "J'assume parfaitement les choix thérapeutiques que j'ai faits, dans l'intérêt des patients, comme tout chirurgien qui le long de sa carrière change de technique. Sinon on opèrerait comme il y a 40 ans ce qui n'est pas le cas", a déclaré le praticien. L'adjudant-chef de l'Office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP), Anne Dupont, qui a dirigé l'enquête, a expliqué que le chirurgien avait injecté le ciment acrylique aux patients "dans l'espace intervertébral" et "non directement dans l'os", pour lequel ce type de ciment a été homologué. "La technique n'est pas interdite. Mais au regard de la loi, ce n'est pas un soin courant et il devait donc respecter un protocole prospectif qui n'a pas été mis en place." Le chirurgien a dénoncé "une campagne de presse mensongère", menée par son ancien confrère, le chef du service d'orthopédie et de traumatologie, qui a obtenu le statut de lanceur d’alerte après avoir dénoncé les pratiques du chirurgien. Le conflit entre les deux hommes avait plongé l’établissement dans une grave crise. Plusieurs soignants avaient quitté l’hôpital, provoquant une désorganisation totale. Plusieurs professionnels de santé avaient dénoncé la mise à l’écart du chirurgien du rachis. A la barre, ce dernier a également fustigé un "tsunami médiatique". Lors de l’audience, certains ont par ailleurs déploré le décalage entre la réglementation encadrant la recherche clinique et la "rapidité des avancées biomédicales". Ils jugent en effet que la cimentoplastie discale était "connue" des sociétés savantes, bien que non pratiquée en France. "Je ne crois pas qu'il s'agisse d'une démarche de recherche de la part [du chirurgien] car il s'agissait là d'apporter du confort au patient, pas d'approuver une technique", a estimé la Pr Marie-Dominique Piercecchi-Marti, de l'hôpital de La Timone, à Marseille. Il encourt jusqu’à trois ans de prison et 45.000 euros d’amende. [avec AFP et France 3]
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