Violences gynécologiques sur plus de 20 patientes : un ponte de l'endométriose devant un juge d'instruction

08/03/2022 Par Sandy Bonin
Faits divers / Justice
Le Pr Emile Daraï, spécialiste de l’endométriose, est visé par au moins 21 plaintes pour viols. L'enquête visant ce gynécologue parisien a été confiée à un juge d'instruction. Ce mardi, le parcours de la manifestation féministe organisée à Paris à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes va se terminer devant l’hôpital Tenon pour demander sa suspension. 

Plus de 20 patientes accusent le gynécologue parisien de pratiquer des examens vaginaux et rectaux brutalement et sans consentement. Une enquête a été confiée à un juge d'instruction. L'information judiciaire avait été ouverte le 3 janvier pour "violences par personne chargée d'une mission de service public". 

L’affaire a débuté en septembre dernier, lorsque des étudiantes en médecine avaient dénoncé les "pratiques violentes" de ce spécialiste de l’endométriose auprès du collectif Stop VOG. "Ça a créé un effet boule de neige", retrace Sonia Bisch, la fondatrice et la porte-parole du collectif Stop aux violences obstétricales et gynécologiques (VOG). "Nous avons depuis recueilli 190 témoignages de patientes à l’encontre du professeur Daraï. Elles décrivent notamment des touchers vaginaux ou rectaux brutaux, des examens particulièrement douloureux, parfois effectués sans leur consentement." 

A ce stade, l'enquête porte sur des faits qui auraient pu avoir été commis sur 25 patientes, selon une source proche du dossier. Le Pr Daraï est visé par plusieurs plaintes pour viols.  A la suite de la première plainte, le parquet de Paris avait ouvert le 28 septembre une enquête préliminaire pour "viol par personne ayant autorité sur mineur de plus de 15 ans", élargie par la suite à "viol en réunion". 

Selon Sonia Bisch, la réputation d’Émile Daraï a joué dans la difficile libération de la parole des victimes. "C’est tellement un grand ponte que beaucoup de patientes se disaient qu’elles ne pourraient pas être entendues. C’est quelqu’un qui était recommandé par les associations de patientes. Elles attendaient six mois pour avoir un rendez-vous avec lui. Certaines le voyaient comme le messie. Elles comptaient sur lui pour réduire leur douleur ou pour avoir un enfant." 

Le gynécologue "conteste fermement les accusations portées contre lui", avait réagi en octobre son avocat, Me Alain Jakubowicz. "Si la parole des plaignantes doit être entendue, elle ne constitue ni une vérité absolue, ni une preuve", avait-il souligné. Plusieurs dizaines de patientes se sont manifestées pour soutenir ce professeur qui "a changé leur vie". 

Le rapport de l'enquête interne, déclenchée par l'AP-HP et Sorbonne Université, publié en décembre, concluait que "l'obligation d'information de ces patientes, le soulagement de leur douleur, le respect de leurs volontés n'(avaient) pas été respectées". Mais "la commission ne retient aucune connotation sexuelle alors que certains manquements ont été relevés dans le recueil du consentement à certains gestes".  

Emile Daraï est depuis définitivement mis en retrait de ses responsabilités de chef de service et de responsable pédagogique. Il continue toutefois de consulter. Ce mardi, le parcours de la manifestation féministe organisée à Paris à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes va se terminer devant l’hôpital Tenon pour demander la suspension du gynécologue. "Nous allons demander la suspension du professeur Daraï le temps de l’instruction et dans le respect de la présomption d’innocence", martèle Sonia Bisch, la fondatrice et la porte-parole du collectif Stop aux violences obstétricales et gynécologiques (VOG).  

"Deux autres seront déposées dans les prochains jours", indique My-Kim Yang-Paya, l’avocate de 18 plaignantes, qui assure que ses clientes "prennent très mal le fait qu’Émile Daraï exerce toujours".  

[Avec leparisien.fr et AFP] 

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