PPL Valletoux : le Sénat balaie les tentatives de régulation de l’installation des médecins
La proposition de loi Valletoux est examinée depuis hier par la chambre haute du Parlement, sous les regards inquiets des médecins libéraux, qui ont fait grève du 13 au 17 octobre, entre autres pour s’opposer à ce texte jugé coercitif. Dès mardi soir, les sénateurs ont longuement débattu sur la liberté d’installation des médecins libéraux, que certains tentent de réguler. Une dizaine d’amendements de tous bords politiques visant à contraindre les généralistes et autres spécialistes à s’installer dans des territoires sous-dotés ont été finalement rejetés. Le Sénat s’aligne ainsi sur la position de l’Assemblée nationale qui a balayé les tentatives de coercition en juin dernier.
A notamment été rejeté un amendement visant à expérimenter le conventionnement sélectif pendant une durée de trois ans. Concrètement, la proposition portée par le sénateur Les Républicains Stéphane Sautarel aurait permis aux directeurs d'agences régionales de santé de déterminer des zones en "fort excédent" d'offres de soins, dans lesquelles l'installation d'un nouveau médecin aurait été conditionnée au départ d'un confrère. Elle a été écartée par 124 voix pour contre 188 voix contre.
"Il est crucial que l’État joue enfin son rôle de régulateur. Les mesures incitatives ne fonctionnent pas", a déclaré la sénatrice Florence Blatrix Contat, membre du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, qui a elle aussi déposé un amendement pour instaurer un conventionnement sélectif, sans passer par la case expérimentation. Proposition rejetée là aussi. "Une occasion manquée pour répondre aux besoins de nos concitoyens dans les territoires ruraux", a déploré la sénatrice de l’Ain sur le réseau social X (anciennement Twitter). La sénatrice écologiste Anne Souyris a d’ailleurs rappelé que le conventionnement sélectif faisait partie du programme du candidat Macron.
A la tribune, la rapporteure de la commission des Affaires sociales du Sénat Corinne Imbert (LR) a estimé que, dans un contexte "marqué par des difficultés démographiques et des tensions importantes apparues lors de la négociation de la prochaine convention médicale, la régulation de l’installation ne pourrait s’apparenter qu’à un signe de défiance à l’égard de la profession. Elle ne ferait qu’aggraver les difficultés en décourageant les médecins à s’installer". Cette dernière a, en outre, déploré une "erreur de calendrier", l’examen de la PPL Valletoux par la chambre haute se faisant en parallèle la reprise des discussions entre l’Assurance maladie et les syndicats de médecins, mais aussi de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale à l’Assemblée nationale.
Juste avant, le ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, avait déclaré devant les sénateurs que "si cela peut sembler un remède attractif à court terme, créer des rigidités et des contraintes serait, je le crois, après avoir beaucoup hésité moi aussi sur cette question, contreproductif et ne ferait que détourner encore plus de l’exercice de la médecine et en particulier de la médecine générale, dont nous savons qu’elle constitue un pilier incontournable de l’accès à la santé de nos concitoyens". "L’enjeu qui est le nôtre, c’est bien de restaurer la confiance avec la médecine libérale. Les solutions ne marcheront que si nous les construisons avec les premiers concernés", a par la suite estimé la ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, selon qui "87% de la France est un désert médical".
87% de la France est un désert médical. Il n'y a PAS de zone sur-dotée en médecins. Les solutions contre la désertification médicale elles se construiront AVEC et non pas contre les médecins.
— Agnès Firmin Le Bodo (@agnesfirmin) October 25, 2023
Renforcer l'attractivité des métiers et des territoires oui, obliger à s'installer non. pic.twitter.com/fOf6ZoWPVg
Les débats autour de la proposition de loi Valletoux doivent se poursuivre jusqu’à ce vendredi.
[avec AFP et Public Sénat]
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