"Marché noir" des RDV médicaux : DoctoChrono, la plateforme qui révolte les médecins
"Passer une IRM ou un scanner dès demain ? Consulter un spécialiste rapidement ? Et sans perdre de temps au téléphone ou sur les sites de rendez-vous ? C’est possible !", promet la "conciergerie" DoctoChrono. Lancée en mai 2018, la société "organise en 1h un rendez-vous en priorité, proche de chez vous, dans les prochaines 48h", moyennant "30 à 40 euros". Une somme, due uniquement si le créneau trouvé est accepté, visant à rémunérer le temps passé par "les coordinateurs" à dénicher le rendez-vous tant convoité. Comment la plateforme DoctoChrono accomplit-elle cette prouesse, alors que, souligne-t-elle, "les délais s'allongent et se comptent en semaines" ? Grâce aux "liens" tissés avec des centres d'imagerie et des spécialistes, assure-t-elle, se défendant d'avoir une quelconque "relation commerciale ou financière avec les professionnels de santé". "Nous disposons, auprès de nombreux centres de santé, de contacts privilégiés qui nous aident à trouver des créneaux dans les plus brefs délais, parfois en « surbookant » un rendez-vous en urgence", explique la société sur son site. "Il nous arrive également d’avoir recours aux agendas en ligne de certains spécialistes afin de trouver et réserver des rendez-vous. Il arrive en effet que des créneaux se libèrent en cas de désistements de dernière minute d’un patient", Une explication encore visible hier, mais qui n'est plus accessible aujourd'hui : dans l'intervalle, le site de la société a été complètement expurgé. "Dans l’attente de l’étude des allégations sur l’activité de notre société, nous suspendons l’ensemble des services qu’elle propose ainsi que le fonctionnement du présent site", précise désormais DoctoChrono* sur sa page d'accueil. Depuis le 4 avril, en effet, la société fait l'objet d'une véritable bronca de médecins sur Twitter... Tout est parti d'un tweet du Dr Jérôme Marty, président du syndicat UFML. Pour ce dernier, DoctoChrono alimente "un marché noir" de rendez-vous médicaux et ce faisant "marchandise le soin, le rend inégalitaire et ouvre à des dérives".
Donc Doctochrono est une société qui vend du RV médical.
Sorte de parasite qui se nourrit sur les patients et les soignants .
C’est une sorte de marché noir .
C’est dégueulasse, ça pue .
Nous enquêtons, et appelons l’ensemble de la profession à réagir. pic.twitter.com/W0nwPwDJjo— DrMartyUFML-S (@Drmartyufml) 5 avril 2019
Pour ses détracteurs, DoctoChrono favorise l'émergence d'une médecine à deux vitesses.
vous avez les moyens de payer ? Vous avez le rdv demain.
— Florian Zores (@FZores) 7 avril 2019
Vous ne pouvez pas payer ? Rendez-vous dans deux mois.
La médecine à 2 vitesses qu'ils veulent sois-disant éviter se profile un peu plus. Parce que meme avec CMU ou ACS, faudra payer.
DoctoChrono s'adresse avant tout aux patients qui ont "petites urgences médicales" : examens d'imagerie à réaliser, besoin de consulter rapidement un allergologue, un dermatologue ou encore un ophtalmologue. Mais, pour le cardiologue Florian Zorès, "le degré d'urgence n'est pas défini par le patient, mais par le médecin", s'agace-t-il sur Twitter. "A tous vouloir un rendez-vous demain, on engorge le système". L'UFML a annoncé son intention de déposer plainte auprès de l'Ordre. Le Dr Jacques Lucas a indiqué de son côté avoir transmis l'alerte aux services concernés du Cnom "pour une instruction plus approfondie".
Je vous remercie d’appeler mon attention sur ce sujet. J’ai transmis votre interrogation et votre « étonnement » aux services concernés du CNOM, pour une instruction plus approfondie.
— Jacques Lucas (@Jcqslucas) 5 avril 2019
En 2015, Yamaplace.fr, une autre plateforme de revente de rendez-vous médicaux avait polémique. Elle n'a plus donné signe de vie depuis. *La société n'a pas donné suite à notre demande d'interview.
La sélection de la rédaction
Etes-vous favorable à l'instauration d'un service sanitaire obligatoire pour tous les jeunes médecins?
M A G
Non
Mais quelle mentalité de geôlier, que de vouloir imposer toujours plus de contraintes ! Au nom d'une "dette", largement payée, co... Lire plus