"On va juste souffler un peu" : pour les médecins généralistes d'Egora, 30 euros la consultation, "c'est bien insuffisant"
Attendu depuis très longtemps, le passage du tarif de la consultation du généraliste à 30 euros, ce dimanche 22 décembre, n'est qu'un "rattrapage de l'inflation" pour de nombreux lecteurs d'Egora. Pour 84% des sondés, cette revalorisation chiffrée à 730 millions d'euros en année pleine, ne suffira pas à restaurer l'attractivité de la spécialité et à briser la "cadence infernale de 15 minutes par patient".
"C'est un plâtre sur une jambe de bois, un bouchon sur un des trous du tonneau des Danaïdes." A l'instar de "Vieuxdoc Attéré", nombreux sont les lecteurs d’Egora qui considèrent que le passage du tarif de la consultation du généraliste à 30 euros, ce dimanche, ne suffira pas à redonner du souffle à la spécialité. Rémunération, attractivité, conditions d'exercice... Pour 84% des 434 professionnels de santé qui ont répondu à notre sondage, le G à 30 euros ne changera pas la donne.
Car pour beaucoup, cette revalorisation, qui représente pourtant un investissement de 730 millions d'euros en année pleine pour l'Assurance maladie, n'est qu'un "rattrapage de l'inflation". Un "rattrapage nécessaire", mais "bien insuffisant devant la complexité des soins d’une population vieillissante", souligne Alain D., médecin.
"On va juste souffler un peu", estime sa consœur Stéphanie B. "30 euros pour prendre en charge un patient, coordonner ses soins, faire de la prévention et de l'éducation thérapeutique, soigner les pathologies courantes et équilibrer les pathologies chroniques, faire des diagnostics et orienter le patient", c'est trop peu pour cette praticienne. Pour Bertrand L., cette revalorisation correspond tout de même à une augmentation de 13.2% de son chiffre d'affaires.
Mais pour Didier T., ce tarif "ne permet pas de modifier la façon de pratiquer une bonne médecine. Toujours une cadence infernale de 15 minutes par patient, paperasse comprise... Comment procurer de l'attractivité avec de tels procédés ?", interpelle-t-il. "L’aumône, tout comme la subvention, est l’antithèse de l’épanouissement", assène François V., généraliste.
D'autres lecteurs pointent même les effets pervers de cette hausse. "Ce remède est pire que le mal, un simple rattrapage d'inflation est insuffisant et va surtout majorer de façon insupportable les charges et va donc obliger les médecins à moins travailler", anticipe Bruno E., généraliste. Une crainte partagée par son confrère Arnaud G. : "Les médecins vont pouvoir encore diminuer leur temps de travail : c'est déjà ce qu'on entend dans les réunions professionnelles ! Cela va aggraver l'accès aux soins dans les mois et les années à venir."
"Les plus anciens partiront, parfois même précocement, les jeunes ne s'installeront pas plus"
Quant au choc d'attractivité promis, il "ne se produira pas, prédit Anne S. Les plus anciens partiront, parfois même précocement, les jeunes ne s'installeront pas plus." "Comment un(e) jeune médecin désirant travailler 30 heures par semaine peut-il rentabiliser un cabinet libéral avec une consultation à 30 euros ? Il gagne plus en une semaine de remplacement qu’en un mois d’installation du fait des charges !", lance Lionel G., généraliste.
"La rémunération est en tête de liste de l'attractivité, mais pas que, souligne une lectrice. Toutes les conditions d'installation, d'exercice sont également responsables du manque d'attractivité. Toutes ces charges, toutes les contraintes qu'on nous empile les unes sur les autres pour étouffer la médecine libérale…"
"L’activité libérale n’est absolument plus attractive et de toute façon désertée par nos jeunes confrères et consœurs, abonde Eric-Pierre L., fataliste. Priorité est dorénavant donnée à une pratique salariée cadrée et de surcroît au moins aussi rémunératrice que notre pratique libérale en MG, c'est ainsi. La valorisation forfaitaire des tâches transversales et réalisées hors la présence du patient a été dénaturée avec la complicité coupable des syndicats, tellement obnubilés par leur financement. C’est ainsi devenu un étendard pour la Cnam pour cacher l’absence de valorisation de notre pratique de premier recours, analyse ce médecin. N’ayant pas d’actes techniques pouvant compenser la seule manière serait de travailler encore plus et comme c’est ce que veulent nos tutelles pourquoi pourrait-on espérer le moindre investissement dans notre pratique ?" Et ce lecteur de présager : "La fin approche de plus en plus pour les libéraux."
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