
Permanence des soins : "SAS’passe plus"
L'édito de Karen Ramsay, rédactrice en chef du magazine Egora.


Au bout du fil, le silence comme un cri d’alarme. À Rennes, depuis deux semaines, les médecins régulateurs du service d’accès aux soins (SAS) se sont mis en « arrêt de volontariat », dénonçant l’explosion des compteurs au standard (plus de 2 200 appels certains week-ends), de mauvaises conditions de travail et un manque de ressources qui met en danger à la fois les patients et les professionnels de santé. Ce dispositif – expérimental à compter de 2021, avant d’être progressivement généralisé –, mis en place en réponse aux difficultés d’accès aux soins en ville, est à bout de souffle. Et dans les zones marquées par le manque criant et chronique de médecins et la saturation des urgences, le SAS est, lui aussi, noyé en raison du grand nombre d’appels à gérer. On s’en souvient : le président de la République avait promis de « désengorger » les urgences d’ici fin 2024, notamment en s’appuyant sur le SAS… Mais là, clairement, SAS’passe plus !
Soyons logiques : pour mieux réguler l’offre de soins et orienter les patients, ce système de régulation ne saurait fonctionner sans un nombre suffisant de professionnels de santé pour le faire vivre au quotidien. En Ille-et-Vilaine, ils sont un peu moins de 50 médecins régulateurs volontaires – qui cumulent aussi pour la plupart une activité de médecins généralistes libéraux à temps plein – à assurer cette permanence des soins. Pas assez nombreux, submergés par les appels, inquiets du risque d’erreur, ils ont décidé d’exercer leur droit de retrait. Et en face, les pouvoirs publics répondent par des arrêtés de réquisition distribués par la gendarmerie… La contrainte, donc.
En janvier, la Drees révélait que la participation des médecins libéraux à la régulation était en forte hausse : + 48 % entre 2014 et 2022. Mais en parallèle, elle note une baisse des appels décrochés entre 2021 et 2022. Le déséquilibre entre la demande et l’offre témoigne d’une erreur d’approche : l’obligation peut sembler la réponse la plus rapide en période de carence, mais la régulation reposant sur le volontariat, ne l’oublions pas, cela risque de porter un sérieux coup à la motivation des troupes. Et dans la situation de tension que l’on connaît actuellement, on ne pourrait faire pire.
La sélection de la rédaction