Les femmes ayant développé un problème hypertensif durant la grossesse sont exposées à la survenue au long cours de complications cardiovasculaires. L’étude Caliber a pris en compte environ 1,9 million de grossesses survenues entre début 1997 et fin 2016 chez environ 1,3 million de femmes en Grande-Bretagne, et plus particulièrement 109 500 grossesses qui s’étaient associées à des désordres hypertensifs (HTA chronique, gravidique…) dont 33 344 pré-éclampsies, a cité le Pr Lucy Chappell (King’ College, Londres). Les femmes ayant développé une pré-éclampsie avaient le même âge (autour de 28 ans) et des caractéristiques socio-économiques similaires aux autres femmes, mais sans surprise présentaient plus souvent des antécédents d’HTA avant la grossesse (8,2 % contre 2,2 % pour l’ensemble des femmes). Le risque de pré-éclampsie était associé au niveau de pression artérielle systolique comme diastolique. L’analyse a montré que ces femmes avec une pré-éclampsie présentaient, par la suite, un risque d’HTA multiplié par 4,5 et étaient plus exposées à la survenue d’une maladie cardiovasculaire (x 1,7) quelle qu’en soit la nature (AVC, infarctus, insuffisance cardiaque, artériopathie périphérique…). Le nombre de décès cardiovasculaires était aussi doublé chez elles. Cependant, cet excès de risque différait peu de celui relevé chez les femmes ayant eu un problème hypertensif pendant la grossesse (risque d’HTA hors grossesse multiplié par 4,1, de complication cardiovasculaire par 1,7, de décès cardiovasculaire par 2,1). L’impact de ces événements cardiovasculaires était relevé précocement, dès 1 an après la grossesse. Et, après pré-éclampsie, la majorité d’entre eux ont été constatés avant l’âge de 40 ans. Le Pr Chappell a insisté sur le fait que tous ces problèmes hypertensifs liés à la grossesse doivent être l’occasion de dépister les événements cardiovasculaires à un âge plus précoce que dans la population générale. Il faudra déterminer comment on pourrait mieux les prévenir. Mais, le traitement de l’HTA post-grossesse pourrait représenter une certaine marge de manœuvre, car sa prise en compte diminuait le risque cardiovasculaire de 35 % après pré-éclampsie. Des médicaments, comme les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, pourraient également avoir une place pour prévenir le remodelage cardiaque associé à l’HTA.
La surveillance de la pression artérielle par automesure est courante pendant la grossesse. Ainsi, une étude récente de l’université d’Oxford, Bump, menée auprès de 5 181 femmes enceintes a révélé que 19 % d’entre elles et 49 % de celles avec une HTA surveillaient leur pression artérielle à domicile (1). Une autre étude de la même équipe, Optimum-BP, ayant comparé automesure et contrôle tensionnel en consultation chez 158 femmes avec une HTA chronique ou gravidique, avait antérieurement montré que cette pratique est réalisable et bien acceptée par les femmes (2).
Les nouvelles données de l’essai Bump 2, sur 454 femmes avec une HTA chronique et 396 femmes avec une HTA gravidique, attestent de la sécurité de l’automesure. Les chiffres de de pression artérielle systolique moyenne étaient en effet équivalents chez les femmes suivies en consultation et celles pratiquant l’automesure, a expliqué le Pr Lucy Chappell (King’ College, Londres) : respectivement 133,6 mm Hg et 133,8 mm Hg pour la PAS en cas d’HTA chronique, 137,2 mm Hg et 137,6 mm Hg en cas d’HTA gravidique. Aucune différence n’a non plus été relevée entre les deux bras pour la pression artérielle diastolique ou les complications maternelles ou néonatales (pré-éclampsie, faible poids de naissance, hospitalisation du nouveau-né…).
Il est en tout cas essentiel de communiquer avec les femmes sur les moyens de bien pratiquer ce self-monitoring. Et de le rechercher en discutant avec elles. Car, dans l’essai Bump, seulement une femme enceinte sur deux réalisant l’automesure en avait informé l’équipe obstétricale.
- Tucker KL, et al. J Hypertens. 2021 May 1;39(5):994-1001.
- Pealing LM, et al. Pregnancy Hypertens. 2019 Oct;18:141-149.
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