L’intervention a eu lieu fin mai 2023, et a duré 21 heures. Elle comprenait aussi, outre l’œil gauche, la greffe d’une partie du visage comprenant en particulier le nez et les lèvres ; le tout provenant d’un seul donneur.
Cinq mois après l’opération, les résultats sont très positifs. En effet, même si le patient n’a pas recouvré la vue – on ne sait pas encore s’il pourra revoir un jour, concède le NYU Langone Health dans un communiqué - , l’œil gauche greffé présente "des signes de santé remarquables, notamment un flux sanguin direct vers la rétine". "Bien que de nombreuses questions demeurent dans un cas sans précédent, cette réalisation révolutionnaire ouvre de nouvelles possibilités pour de futurs progrès dans les thérapies visuelles et dans les domaines médicaux connexes", est-il ajouté.
Le patient, Aaron James, dont l'oeil droit fonctionne toujours normalement, est apparu durant la conférence de presse à visage entièrement découvert, son oeil gauche fermé sous sa paupière (qu'il ne peut encore bouger naturellement). "Que je puisse voir ou non, c'est comme ça", a-t-il dit, en remerciant le donneur et sa famille. "Il faut commencer quelque part, et j'espère que cela va initier quelque chose que l'on pourra améliorer pour le prochain patient". "Je peux de nouveau sentir, manger", a-t-il raconté à l'AFP, ajoutant qu'il avait de nouveau envie de "sortir en public". "Pour la première fois en un an et demi, j'ai pu embrasser ma femme".
Concernant les possibilités de revoir, les médecins se sont dit porteurs d’espoir : "une grande partie de la rétine est préservée, et nos tests montrent qu'elle est capable de générer un signal", a détaillé Vaidehi Dedania, spécialiste de la rétine à NYU Langone Health. Les médecins ne s'attendaient pas à de si bons résultats, et une équipe a été formée en urgence pour explorer les différentes pistes qui pourraient permettre de rétablir la vue.
Il s'agit d'une "réussite remarquable", qui marque une étape importante vers " le but ultime de restaurer la vision", a commenté pour l'AFP Daniel Pelaez, professeur associé d'ophtalmologie à l'Université de Miami. "C'est une énorme avancée", a abondé la chirurgienne Kia Washington, qui travaille depuis dix ans sur cette problématique à l'Université du Colorado.
"Tellement de gens doutaient encore" qu'une telle greffe "était possible chez l'humain".
Par le passé, des greffes d'yeux entiers avaient déjà été réalisées sur de petits animaux, dont la vision a au moins partiellement été restaurée dans certains cas, a expliqué la chirurgienne Kia Washington. Mais réussir à y parvenir chez l'humain réclamera de combiner "beaucoup de méthodes différentes", selon elle. Parmi celles citées par la spécialiste comme de futures pistes : la thérapie génique, l'utilisation de cellules souches, ou encore la préparation du cerveau du receveur via des stimulations électriques.
Dans le cas d'Aaron James, des cellules souches issues de la moelle épinière du donneur ont également été injectées dans le nerf optique du patient, dans l'espoir d'améliorer sa régénération.
Sera-t-il possible d'un jour donner la vue à une personne aveugle de naissance grâce à une greffe ? Il s'agit d'un horizon encore lointain, répond Kia Washington. Mais "je pense que oui, cela arrivera dans les décennies qui viennent".
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