
Cancer et événement thromboembolique : intérêt d’un traitement prolongé par anticoagulant à dose réduite
Des chercheurs français ont réalisé une avancée importante dans la prise en charge globale des patients atteints de cancers, et plus précisément pour ceux ayant présenté un événement thromboembolique veineux (TEV).

Cette situation est fréquente et lourde de conséquence : il s’agit, en effet, de la deuxième cause de décès chez les patients atteints de cancer, après le cancer lui-même. Ceci est lié à plusieurs facteurs provenant soit des cellules cancéreuses elles-mêmes (facteurs de coagulation), soit des traitements (inflammation, chirurgie, dispositifs invasifs…).
Les chercheurs ont donc voulu déterminer quelle était la meilleure stratégie thérapeutique à mettre en place à long terme. Actuellement, le traitement d’un événement TEV chez un patient cancéreux est d’au moins six mois, et tant que le cancer reste actif ou que le traitement du cancer est en cours ; avec un surrisque hémorragique non négligeable à la clé. Mais une réduction des doses de traitement anticoagulant serait-elle bénéfique ?
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Langard Francois
Oui
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Pour tester cette hypothèse, un vaste essai international a été mis en place entre 2018 et 2024. Cette étude prospective randomisée en double aveugle, nommée API-CAT, a évalué l’intérêt de réduire la dose de traitement anticoagulant (apixaban) au bout de six mois, par rapport à un dose pleine, pour prévenir le risque de récidive de TEV.
Les résultats de cette étude ont été publiés dans le New England Journal of Medicine et présentés en parallèle lors du congrès annuel de The American College of Cardiology (Chicago, 29 mars).
Au total, 1 766 patients atteints d’un cancer actif, et provenant de 136 centres en Angleterre, Autriche, Belgique, Espagne, France, Grèce, Italie, Pays-Bas, Pologne, Suisse et au Canada, ont été inclus. Il y avait 57% de femmes ; l’âge moyen était de 67 ans. 65,8% avaient un cancer métastatique et 81,2% recevaient un traitement anticancéreux au moment de l'inclusion.
Les patients ont été randomisés en deux groupes : un groupe recevait de l’apixaban 2,5 mg deux fois par jour (dose réduite) et le second de l’apixaban 5 mg deux fois par jour (dose pleine), pendant 12 mois.
Les résultats ont alors démontré que le traitement à dose réduite était non inférieur à celui à dose pleine : l’incidence cumulée des récidives d’événement TEV à 12 mois étant respectivement de 2,1% et 2,8%. L’incidence des saignements était, par ailleurs, significativement inférieure chez les patients traités par dose réduite (incidence de 12,1% vs 15,6%). Enfin, les taux de décès étaient similaires dans les deux groupes, soit une incidence cumulée à 12 mois respectivement de 17,7% dans le groupe à dose réduite et de 19,6% dans le groupe à dose pleine.
"Nos résultats montrent que, chez les patients atteints d'un cancer actif ayant reçu au moins six mois de traitement anticoagulant pour un événement TEV, un traitement prolongé avec une dose réduite d'anticoagulant par apixaban ne s’accompagne pas d'augmentation du risque de récidive d’événement TEV, et permet de réduire le risque de saignement cliniquement pertinents de 25% par rapport à une dose pleine. Nous pouvons donc affirmer que la dose réduite d'apixaban est à la fois aussi efficace et plus sûre que la dose pleine", conclut la Pre Isabelle Mahé, Université Paris Cité, cheffe du service de médecine interne de l’hôpital Louis-Mourier (AP-HP), première auteure de l’étude.
Pour l’AP-HP, ces résultats sont importants et devraient conduire à une mise à jour des recommandations internationales.
L’AP-HP précise que cette étude a fait l’objet d’un financement par l'alliance BMS-Pfizer, mais que l’industrie "n’est intervenue ni dans la conduite de l’étude, ni dans l’analyse des résultats et dans la rédaction de l’article".
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