Numérique : des outils pour changer les comportements ?
De nombreux facteurs de risque des maladies respiratoires sont évitables (tabagisme, vapotage, surpoids, sédentarité…). Les solutions numériques, utilisées au quotidien, pourraient avoir un impact sur la prévention primaire et secondaire.
Les défis en termes de santé sont immenses et grandissants (modes de vie, vieillissement de la population, accroissement des inégalités…) et les ressources humaines et financières peinent à y répondre. « Jusqu’à 10 % de la population a déjà connu un essoufflement sur le long terme (plus de quatre semaines) », a illustré la Dre Siân Williams (Londres, Royaume-Uni). Les causes principales de l’essoufflement sont la dépendance tabagique, l’obésité, le déconditionnement physique, une maladie cardiaque, une maladie pulmonaire chronique, des troubles du rythme respiratoire, une anxiété, un Covid long ou encore une anémie. Or au niveau mondial, quelque 2,5 milliards d’adultes sont en surpoids (dont 890 millions obèses) ainsi que 390 millions d’enfants et adolescents (dont 160 millions obèses), 1,8 milliard de personnes inactives physiquement et 1,25 milliard fument, le tabagisme et le vapotage étant en augmentation chez les jeunes.
Une aide au système de soins
Dans ce contexte, les outils numériques peuvent venir compléter l’offre de soins actuelle. « Le smartphone et les solutions internet sont considérés par l’OMS comme légitimes pour renforcer le système de santé – couverture universelle et promotion de la santé – car ils sont peu chers, évolutifs, personnalisables, efficaces et accessibles, mieux maîtrisés (plus d’expérience après le Covid) », a estimé le Dr Williams. L’OMS a ainsi intégré à ses recommandations 2024 sur le sevrage tabagique l’usage du numérique parallèlement aux traitements pharmacologiques. « Les SMS, les applications, les interventions fondées sur l’intelligence artificielle ou les interventions fondées sur internet, seules ou combinées, peuvent être mises à disposition comme un auxiliaire à d’autres supports de sevrage tabagique ou comme un outil de self-management », selon l’instance. Cette dernière a même lancé en avril dernier le robot conversationnel Sarah (« Smart AI Resource Assistant for Health »), qui utilise l’intelligence artificielle générative et vise à aider ses utilisateurs pour le sevrage du tabac et de la cigarette électronique, la gestion du stress ou encore la nutrition.
Balances bénéfices/risques
Les résultats de ces outils diffèrent en fonction de plusieurs éléments : accès au parcours de soins, suivi global du patient, niveau d’éducation, niveau socio-économique… Ainsi, un programme d’accompagnement de la perte de poids expérimenté au Royaume-Uni auprès de 400 personnes (dont 76 % de femmes) obèses et âgés en moyenne de 41 ans a montré de moins bons résultats lorsqu’il consistait à mettre à disposition un traceur d’activité avec compte-rendu quotidien sur une appli mobile (perte de 2,8 kg en six mois) que le même système complété par un coaching téléphonique (perte de 4,8 kg).
La balance bénéfices-risques des différentes solutions numériques devra être évaluée, en tenant compte de l’adhésion et de l’environnement. « Les applis doivent être centrées sur l’utilisateur et démontrer sur le long terme des améliorations par rapport aux services de santé traditionnels », a prôné la Dre Williams. « Avec des interfaces conçues de façon appropriée, la télésanté a pu être acceptée par des personnes âgées avec une maladie respiratoire et des comorbidités », a observé la Pre Hilary Pinnock (Édimbourg, Royaume-Uni).
Le patient au cœur du dispositif
Les solutions doivent toujours prendre en compte la littéracie, la littératie en santé et la littératie numérique du patient, ainsi que ses préférences. Ainsi, pour un sujet à haut risque de problèmes respiratoires et peu rompu au numérique, la prise en charge sera fondée sur les consultations, la réhabilitation respiratoire, le coaching... Un autre sujet à risque mais familiarisé avec le numérique pourra se voir proposer un traceur d’activité physique et l’envoi de SMS ou l’utilisation d’applis de sevrage tabagique, de gestion du poids, etc.
Le développement du numérique, censé améliorer l’accès à la santé, devra garantir l’équité entre usagers et éviter l’écueil d’une suppression des interventions les plus efficaces et d’une déshumanisation de la relation entre patient et professionnels de santé.
Références :
Congrès 2024 de l’European Respiratory Society, Vienne (Autriche), du 7 au 11 septembre. D’après les interventions de la Pre Hilary Pinnock (Edimbourg, Royaume-Uni) et de la Dre Siân Williams (Londres, Royaume-Uni) lors de la session "La santé numérique pour améliorer la gestion de la santé respiratoire".
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