"C'est assez intense" : reportage dans un centre de formation des assistants médicaux
[Podcast] C’est l’une des mesures phares du Gouvernement pour améliorer l’accès aux soins : la création de postes d’assistants médicaux. Aujourd’hui, ils sont environ 6 000 à aider les médecins libéraux au quotidien en effectuant des tâches médico-administratives, et l’exécutif entend bien franchir le cap des 10 000 d’ici la fin de l’année 2024. En France, une douzaine d’établissements forment ces futurs auxiliaires, Egora a pu en découvrir un.
Ils mettent à jour les dossiers médicaux des patients, s’occupent des prises de rendez-vous, effectuent les préconsultations ou participent à la coordination des soins… Les assistants médicaux sont plus de 6 000 en France à épauler les médecins au quotidien.
Des chiffres encourageants, selon l’Assurance maladie, qui subventionne ce dispositif créé en 2019 pour lutter contre les déserts médicaux et améliorer les conditions d’exercice des praticiens.
Pour le Gouvernement, l’objectif est d’atteindre les 10 000 assistants médicaux d’ici fin 2024, mais pour pouvoir exercer, tous ces auxiliaires doivent impérativement être formés, peu importe leur profil. D'après l’Assurance maladie, une fois embauchés, ils ont "2 ans pour engager la formation et 3 ans pour obtenir leur Certificat de qualification professionnelle (CQP) d’assistant médical". Les infirmières, auxiliaires de puériculture et aides-soignantes déjà diplômées ont quant à elles 3 ans pour décrocher "une attestation de Formation d’adaptation à l’emploi (FAE) dans le champ de l’organisation et de la gestion administrative d’un cabinet médical", ajoute la Cnam.
Ces formations – en partie financées par les médecins employeurs via la contribution à la formation professionnelle - sont proposées par douze organismes agréés par la Commission paritaire nationale de l’Emploi et de la Formation professionnelle (CPNE-FP) présents dans toute la France. C’est le cas du Collège des hautes études en médecine (Chem), qui couvre la Bretagne, la Normandie et les Hauts-de-France.
Dans la région de Rouen (Seine-Maritime), un groupe de stagiaires apprend actuellement les bases du métier. Egora a pu assister à l’un de leurs cours dans les locaux du Centre de formation d’apprentis (CFA), à Saint-Etienne-du-Rouvray.
Installés à leur bureau, face au tableau blanc, quatorze adultes écoutent attentivement les consignes de Nathalie Renou, leur cadre de santé formateur. Ils sont tous là pour apprendre les bases du métier d’assistant médical.
Le cours du jour porte sur la communication avec le patient. A travers des simulations et des études de cas, les élèves apprennent à gérer des situations délicates avec des patients anxieux, agressifs, handicapés ou vieillissants.
"La formation est composée avec un référentiel de compétences à valider, explique Nathalie Renou. A l’instar de la formation d’aides-soignantes, elle se décline avec des blocs de compétences à valider. Dans cette promotion-là, on a des gens qui font le parcours complet, c’est-à-dire les quatre blocs, et qui ont des enseignements les jeudis et vendredis. La particularité de cette formation, c’est qu’elle est à la fois sur le terrain auprès de leur praticien et en théorie en cours, et qu’elle regroupe à la fois des évaluations théoriques et des évaluations cliniques", conclut-elle.
Une formation de huit mois
Préparation du patient à l’examen du médecin, accueil et prise en charge administrative du malade, règles d’hygiène, coordination des soins... Les apprentis assistants médicaux ont huit mois pour voir toutes les notions du programme.
"Cette promotion-là a un volume horaire total de 380 heures à peu près, en sachant que sur les nouvelles promotions qui arrivent, on a diminué le volume d’heures mais on a gardé la complétude du programme. C’est assez intense, assez dense", reconnaît la formatrice.
Si la formation est ouverte aux infirmières, aux aides-soignantes et aux auxiliaires de puériculture, la grande majorité des élèves de Rouen sont des secrétaires médicales déjà en poste. Parmi elles, il y a Pauline : à 27 ans, elle travaille pour un médecin généraliste.
"Le médecin pour qui je travaille s’est formé à la polygraphie du sommeil, explique la jeune femme. On a vu une opportunité de l’accompagner, l’assister dans cette pratique-là. Bien sûr, c’est lui qui réalise l’entretien pour réaliser une polygraphie du sommeil, mais moi par la suite, je reçois le patient pour l’aider à poser le polygraphe, répondre à d’éventuelles questions".
Le matin, elle s’occupe également de répondre au téléphone et gère toutes les tâches administratives. Il lui arrive aussi d’appeler les patients sortis des programmes de dépistage organisé.
Pauline voit dans cette formation d’assistante médicale une opportunité de gagner en compétences et d’avoir une plus grande proximité avec le patient. Selon elle, c’est aussi un bon moyen pour le médecin de gagner du temps médical.
"Il peut soit prendre un patient supplémentaire, soit prendre plus de temps avec un patient qui présente des problématiques particulières, explique-t-elle. J’ai aussi vu une amélioration sur le délais en salle d’attente. Au final, il y a beaucoup de positif."
Depuis la création de la formation au Collège des Hautes études en médecine (Chem) en 2021, 184 assistants médicaux ont été formés dans le quart Nord-Ouest de la France et 142 le sont actuellement. Pour constituer les groupes de stagiaires, le Chem se base sur la demande des médecins, comme l’explique Amélie Manca, directrice du pole école de l’organisme.
"On est sur une demande qui se maintient et qui est en développement sur certains secteurs, indique-t-elle. A Rennes, on a pas mal de demandes et a contrario, on essaie de façon active de constituer un groupe suffisant de stagiaires pour la partie Somme et Artois dans les Hauts-de-France, où on a un peu plus de mal."
Pas toujours facile en effet pour les médecins de recruter des assistants médicaux, même avec les aides de l’Assurance maladie.
"On peut avoir des médecins qui ont déjà beaucoup de travail et qui n’envisagent pas forcément le départ en formation de leur secrétaire médicale, développe Amélie Manca. Parfois on est sur des médecins qui ne souhaitent pas évoluer vers ce mode de fonctionnement. C’est quand même une nouvelle organisation : la consultation se fait en deux temps, il faut un local pour que l’assistante médicale puisse faire sa partie de consultations Il y a forcément des impacts dans les cabinets."
D’autres craignent que le coup de pouce de la Sécu entraîne un allongement de leur file de patients et donc une "médecine d’abattage". Mais la directrice du Pôle école du Chem l’assure : les retours des médecins sur la formation et l’embauche d’un assistant médical sont toujours positifs.
Ce coup de pouce est accordé à tout médecin libéral, quelle que soit sa spécialité, exerçant en secteur 1 ou en secteur 2, adhérent à l’Optam – Optam-CO. Il est par ailleurs conditionné à l'atteinte d'objectifs de prise en charge de patients supplémentaires.
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