Electrosensibilité : sanctionné d’un an d’interdiction d’exercice par l’Ordre des médecins, le Pr Belpomme dénonce une décision "scandaleuse"

24/05/2023 Par Aveline Marques
Déontologie
Sanctionné en février par la chambre disciplinaire nationale pour avoir rédigé des "certificats de complaisance" d'intolérance aux champs électromagnétiques, utilisés notamment par les opposants aux compteurs Linky, l'oncologue, âgé de 80 ans, a fait appel de cette décision devant le Conseil d'Etat. 

 

C'est le directeur des études médicales d'EDF qui avait donné l'alerte en novembre 2016, constatant la production par des particuliers opposés à la pose de compteurs Linky de certificats médicaux faisant état d'un syndrome d'hypersensibilité aux champs électromagnétiques. Leur auteur : le cancérologue Dominique Belpomme.  

Etablissant son diagnostic sur la base d'un encéphaloscan, de tests sanguins et urinaires, le professeur écrivait alors que la personne concernée devait être mise à l'abri "d'un maximum de sources électromagnétiques même de faible intensité sous peine d'atteinte à sa santé sous la forme d'une détérioration cérébrale sévère". Au total, 68 certificats, rédigés entre 2011 et 2016, ont été produits, dont 17 comportent une contre-indication à la pose d'un compteur Linky, recense la décision ordinale, qui vient d'être mise en ligne sur la base de jurisprudence du Cnom. 

Lui reprochant d'avoir par "une méthode de diagnostic désuète et dont l'efficacité n'est pas démontrée" (l'encéphaloscan a disparu de la pratique médicale depuis près de 20 ans) établi un lien entre les compteurs intelligents et l'hypersensibilité électromagnétique, syndrome non reconnu en tant que diagnostic médical, le Conseil national de l'Ordre des médecins a donc porté plainte. Il reproche également au cancérologue d'avoir déclaré dans la presse que chez l'enfant, "les champs électromagnétiques et les radiofréquences sont extrêmement toxiques". 

En première instance, le 5 juillet 2018, le Pr Belpomme a écopé d'un avertissement. Jugeant la sanction trop clémente, le Cnom a fait appel devant la chambre disciplinaire nationale, qui a rendu sa décision le 2 février dernier, ont révélé nos confrères de l'APM. "En rédigeant de manière répétitive des certificats médicaux attribuant l'origine des symptômes à l'exposition à des champs electromagnétiques sur le fondement d'examen dont l'efficacité n'est pas établie et, dans certains cas, en indiquant que la pose de compteurs Linky était contre-indiquée, alors qu'en l'état actuel de la science, l'électrosensibilité procède uniquement de...

l'auto-déclaration par les patients et que le médecin ne peut faire état que d'un diagnostic médical élaboré par lui-même", le Pr Belpomme a "méconnu l'article R-4127-28" du code de la santé publique" (interdiction de délivrer un certificat de complaisance), pointe la chambre disciplinaire nationale. Cette dernière a sanctionné le médecin d'un an d'interdiction d'exercice.  

 

Le Cnom "outrepasse son champ d’expertise" 

La sanction était applicable à compter du 1er avril 2023, mais le cancérologue a fait appel de la décision, suspendant son exécution, a-t-on appris. Même s’il a déjà mis fin à ses activités médicales, le Pr Belpomme, joint par Egora, entend en effet "laver tout soupçon" le concernant et "répondre à la souffrance des malades". Le cancérologue dénonce la décision "scandaleuse et inappropriée" rendue par le Cnom, qui a "manifestement outrepassé son champ d’expertise en s’immisçant dans le monde de la recherche sans en avoir les compétences". "Il n’y a eu en réalité aucun certificat de complaisance, mais comme le font des centaines de médecins aujourd’hui, des certificats rédigés au décours d’un diagnostic d’électrohypersensibilité effectué à l’occasion d’un examen général et neurologique complété par des tests biocliniques et des investigations radiologiques", soutient-il, assurant que "l’électrohypersensibilité est une nouvelle affection reconnue par la communauté médico-scientifique internationale, et par l’OMS"*. 

*L’OMS a reconnu les symptômes en 2005. A noter que l’Anses vient de lancer une étude sur le sujet en Auvergne-Rhônes-Alpes

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