C’est inédit : depuis quelques semaines, les Entreprises du médicament (Leem) se soulèvent unanimement pour critiquer le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2023. "Depuis 15 ans, le secteur est soumis à une régulation économique sévère", a tenu à rappeler en préambule Philippe Lamoureux, directeur général du Leem.
"Alors que la dépense réelle en médicaments par les Français en 2022 va être de l’ordre de 26,4 milliards d’euros, le budget alloué aux mêmes médicaments remboursés dans le PLFSS est de 24,6 milliards d’euros. Il y a deux milliards d’écart entre la demande et la consommation de médicaments remboursés par les Français et l'enveloppe budgétaire allouée", a-t-il poursuivi, qualifiant le PLFSS de "budget sans aucune croissance par rapport à la loi de finances de l’an dernier".
Pour le Leem, le budget est "très loin" des engagements d’Emmanuel Macron en la matière. Car, "en confisquant toute croissance, ce PLFSS ne permettra pas de répondre aux quatre enjeux majeurs" que le secteur doit relever. Le premier enjeu est celui de l’innovation, a précisé Thierry Hulot, président du Leem. "Comment s’assurer que demain, nos citoyens auront accès aux dernières innovations de rupture, aux dernières thérapies innovantes", a-t-il interrogé. Le deuxième est celui de la reconstruction de la souveraineté industrielle. Le troisième enjeu concerne l’inflation. "Comme tous les secteurs industriels, l’industrie pharmaceutique subit actuellement des tensions inflationnistes majeures concernant les matières premières, les intrants (aluminium, verre, carton…) ou encore l’énergie", a ainsi alerté Thierry Hulot.
"Raréfaction de l’offre"
Sur ce point, la présidente de l’Association des moyens laboratoires et industries de santé a été très claire : "Le PLFSS ne tient pas compte du contexte inflationniste". "Nous sommes pris en étau entre l’augmentation des coûts et un prix qui ne peut pas être adapté. Cela se traduit par une marge qui diminue et qui n’est plus économiquement viable", a constaté Karine Pinon. Selon elle, l'augmentation du coût de l’électricité est en hausse de +86% et celui du gaz, de 300%. Cela entraîne une augmentation de 15 à 25% du coût de fabrication sur l’ensemble de la chaîne de production. Selon le Leem, cela impacte le prix du médicament à hauteur de +40%. "Cela va jouer sur la raréfaction de l’offre", a prévenu Karine Pinon.
Enfin, dernier enjeu essentiel aux yeux du Leem, celui de l’accès des patients aux médicaments. "Depuis plusieurs années en France, les signaux d’alerte se multiplient : ruptures d’approvisionnement, arrêts de commercialisation, allongement des délais d’accès des patients aux médicaments, impossibilité de mettre des médicaments innovants à disposition des patients français. Ils sont autant de marqueurs de dégradation", a analysé Thierry Hulot.
"Face à ces enjeux majeurs, le Gouvernement présente pour le médicament un projet de loi de la Sécurité sociale qui bat des records d’austérité et menace l’accès des patients aux médicaments", a-t-il continué. Il voit plusieurs risques pour le secteur si le PLFSS était maintenu en l’état : d’abord, la privation de toute croissance économique entre 2022 et 2023, puis un niveau de baisses de prix identique aux années précédentes (800 millions d’euros) en dépit de l’inflation et enfin, l’instauration d’une taxe sur la croissance confiscatoire sous forme d’une "clause de sauvegarde" d’un montant "désormais hors de toute proportion et de tout contrôle".
"Ce PLFSS de rationnement et de renoncement confisque la croissance du secteur, contrairement aux engagements du Président de la République. Il met à mal la politique d’innovation, le recouvrement de l’indépendance sanitaire et l’accès des français aux médicaments dans un contexte d’inflation totalement ignoré par les pouvoirs publics", a sévèrement jugé Thierry Hulot.
"C’est donc le moment de l’action et notre appel au Gouvernement est extrêmement ferme", a-t-il encore déclaré. Le Leem demande ainsi de remettre à niveau le chiffre d’affaires maximal des médicaments remboursables (enveloppe M) pour "tenir compte de la clause de sauvegarde réellement constatée en 2021" ; de respecter les modalités de calcul de l’enveloppe M 2023, "en cohérence avec un taux de croissance pour les produits de santé de +2,4%" et de "tirer toutes les conséquences de la dynamique actuelle des dépenses de médicament pour dégager de nouvelles marges de manœuvre pour l’avenir" et en engageant la concertation avec les entreprises du médicament "le plus rapidement possible".
La sélection de la rédaction
Les complémentaires santé doivent-elles arrêter de rembourser l'ostéopathie ?
Stéphanie Beaujouan
Non
Je vois beaucoup d'agressivité et de contre vérités dans les réponses pour une pratique qui existe depuis 1,5 siècle . La formatio... Lire plus