Les chercheurs américains William Kaelin et Gregg Semenza et leur collègue britannique Sir Peter Ratcliffe ont été distingués coinjointement et se partageront la somme de 9 millions de couronnes (830.000 euros). "L'importance fondamentale de l'oxygène est connue depuis des siècles" et son fonctionnement dans le métabolisme animal mieux compris depuis Lavoisier, "mais le processus d'adaptation des cellules aux variations de niveau d'oxygène est longtemps resté un mystère", a expliqué dans ses attendus l'Assemblée Nobel de l'Institut Karolinska à Stockholm, qui avait reçu 633 nominations cette année. Altitude, exercice physique, anémie : ces mécanismes jouent également un rôle central dans les tumeurs dont la croissance dépend de l'apport en oxygène du sang, en particulier certains cancers à progression rapide, comme celui du foie, qui consomment tellement d'énergie qu'ils brûlent tout l'oxygène disponible autour d'eux. "Des efforts intenses en cours dans les laboratoires universitaires et les entreprises pharmaceutiques se concentrent maintenant sur le développement de médicaments capables d'interférer à différents stades d'une pathologie, en activant ou en bloquant le mécanisme de captation de l'oxygène", selon le jury Nobel. William Kaelin, 61 ans, travaille au Dana-Farber Cancer Institue à Boston et enseigne à l'Université d'Harvard aux Etats-Unis. Gregg Semenza, 63 ans, dirige le programme de recherche vasculaire au Johns Hopkins Institute de recherche sur l'ingénierie cellulaire. Anobli en 2014 par la reine Elisabeth, Sir Peter Ratcliffe, 65 ans, est le directeur de la recherche clinique au Francis Crick Institute de Londres et du Target Discovery Institute d'Oxford. Gregg Semenza a étudié le gène EPO, qui permet à l'organisme de créer plus de globules rouges et isolé les segments d'ADN spécifiques qui l'aident à s'adapter à de faibles niveaux d'oxygène. "On s'est rendu compte dans les années 80 qu'au niveau des reins, l'organisme fabrique une hormone appelée EPO. La grande question, c'était de savoir comment les cellules étaient capables de sentir qu'elles n'avaient pas assez d'oxygène pour que l'organisme produise de l'EPO. C'est les travaux de ces chercheurs qui ont permis de le comprendre", explique Olivier Hermine, médecin et chercheur à l'Institut Necker enfants malades (CNRS/Université Paris Descartes/Inserm). Peter Radcliffe et Gregg Semenza ont ensuite appliqué ces connaissances pour montrer que le mécanisme de détection de l'oxygène était présent dans pratiquement tous les tissus humains. Kaelin a identifié un autre gène, le VHL, présent chez les patients atteints d'un trouble génétique qui les expose à un risque beaucoup plus élevé de certains cancers. Le gène transfère la capacité de l'organisme à prévenir l'apparition du cancer et joue un rôle clé dans la façon dont les cellules cancéreuses réagissent à de faibles niveaux d'oxygène. Depuis son bureau à Oxford, Peter Ratcliffe a indiqué qu'il rédigeait une demande de subvention quand il a reçu un appel de Stockholm. "Comme pour presque toute découverte scientifique, ses conséquences émergent plus tard. Nous n'avons pas vraiment envisagé l'importance du spectre de ce système quand on a commencé à travailler dessus", a-t-il déclaré sur le site nobelprize.org. En 2018, le prix de médecine était revenu à l'Américain James P. Allison et au Japonais Tasuku Honjo pour leurs recherches sur l'immunothérapie qui se sont révélées particulièrement efficaces dans le traitement de cancers virulents. La saison Nobel se poursuivra mardi avec la physique puis la chimie mercredi. Jeudi, l'Académie suédoise décernera deux prix de littérature, l'un pour 2018, l'autre pour 2019, après qu'un scandale d'agression sexuelle et des guerres intestines l'eurent contrainte de reporter l'attribution du prix l'an dernier. Le prestigieux Nobel de la paix sera décerné vendredi à Oslo. Les bookmakers ont pour favorite la jeune Suédoise Greta Thunberg, égérie de la lutte contre le dérèglement climatique. Le prix d'économie clora la saison lundi 14 octobre.
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