La chambre basse du Parlement s’est une nouvelle fois opposée à une tentative de restriction de l’aide médicale d’Etat (AME). Hier dans la soirée, les députés ont en effet rejeté (par 120 voix contre et 77 voix pour) une proposition de résolution (PPR) de la députée LR Véronique Louwagie visant à mettre fin au "dérapage du coût pour l’État de la couverture santé des étrangers en situation irrégulière et des demandeurs d’asile".
PPR relative au dérapage du coût pour l’État de la couverture santé des étrangers en situation irrégulière et des demandeurs d’asile provenant de pays d’origine sûrs et au nombre d’étrangers en situation irrégulière
— Assemblée nationale (@AssembleeNat) June 7, 2023
L'Assemblée a rejeté la PPR.
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L’élue de l’Orne souhaitait recentrer l’AME "sur les seuls soins urgents pour se rapprocher des dispositifs en vigueur dans les autres États de l’Union européenne", mais suggérait aussi au Gouvernement de "restreindre les conditions d’accès à la procédure d’admission au séjour pour soins". Elle invitait encore l’exécutif à "envisager de modifier la protection santé des demandeurs d’asile provenant de pays d’origine sûrs".
"Comment peut-on concevoir que l’Etat dépense des centaines et des centaines de millions d’euros pour payer les soins d’étrangers entrés ou restés illégalement sur le sol français ?", a-t-elle interrogé à la tribune. "Le dérapage devenu totalement incontrôlable des dépenses de soins à destination des étrangers en situation irrégulière est en train de devenir un scandale démocratique et une très grande injustice sociale", a-t-elle dénoncé.
La PPR n’a été soutenue que par le Rassemblement national, au nom de "la justice sociale", a justifié Edwige Diaz (RN). La gauche s’est, elle, unanimement opposée à ce texte. "Vous avez choisi de nous faire perdre du temps avec un débat sur 0,5% du budget de l’Assurance maladie !, a lancé l’écologiste Benjamin Lucas, accusant LR de "faire diversion" après son soutien au Gouvernement sur la réforme des retraites. Vous invoquez un prétendu tourisme médical, il n’existe pas."
Par la voix d’Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des Professions de santé, le Gouvernement s’est dit "défavorable" à cette PPR qui "porte une remise en cause profonde de l’AME". "Restreindre le dispositif aux seules urgences représente un risque médical et financier", a jugé la ministre, pharmacienne de profession, rappelant que l’AME représente "un coût de 1,2 milliard d’euros en 2022" et bénéficie à un peu plus de "400 000 personnes".
Elle a par ailleurs indiqué que "la plupart des migrants ont peu connaissance de l’AME". "Cette situation conduit à un taux de non-recours d’environ 50% selon une étude de 2019." Enfin, Agnès Firmin Le Bodo a appelé à débattre du sujet "sans démagogie".
Lors d’une conférence de presse organisée ce jeudi 7 juin, le syndicat de médecins généralistes MG France a déploré le retour de ce "marronnier politique", qu’est la remise en cause de l’AME. Sa présidente, la Dre Agnès Giannotti, a appelé à "distinguer affichage politique et conséquences réelles de cette mesure", notamment en termes de santé publique. "On sait tous que ne pas soigner des gens qui sont présents sur le territoire aboutit à une arrivée en catastrophe à l’hôpital, et augmente le risque de maladies infectieuses, a-t-elle déclaré. Vous imaginez une seconde l’épidémie de Covid sans l’AME ? Ça aurait été catastrophique." La généraliste installée dans le populaire 18e arrondissement parisien assure qu’une telle remise en cause de l’AME coûterait plus d’argent à l’Etat qu’elle n’en rapporterait. Elle mettrait également les généralistes dans une situation délicate. "Une autre victime de la suppression de l’AME serait directement les MG traitants", a-t-elle lancé. Car "on verrait dans nos cabinets des patients qu’on n’aurait pas les moyens de soigner ou avec des démarches beaucoup plus compliquées."
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