Revalorisations, statut de médecin de fonction publique, formation des internes… Les mesures phares du rapport pour les Assises de la pédiatrie
Après plusieurs reports, les Assises de la pédiatrie et de la santé de l'enfant seront finalement organisées le 24 mai prochain. Le ministre délégué chargé de la Santé, Frédéric Valletoux, y annoncera des mesures pour répondre à la crise du secteur, sur la base du rapport du comité d'orientation, qui lui a été remis mardi 23 avril. Dirigé par la Pre Christèle Gras-Leguen, présidente de la Société française de pédiatrie, et Adrien Taquet, ancien secrétaire d'Etat à l'Enfance et aux Familles, ce comité propose un plan d'action sur cinq ans pour refonder la santé de l'enfant. Il repose sur 20 mesures phares, qu'Egora vous présente en détails.
Hiver 2022. Les urgences pédiatriques explosent, sous l'effet d'une triple épidémie Covid-grippe-bronchiolite. Mais cette crise "n’est que la face immergée de maux bien plus profonds qui affectent la santé globale de l’enfant aujourd’hui, tant en amont qu’en aval de l’hôpital", rappelle le comité d'orientation des Assises de la pédiatrie, mis en place par le ministre de la Santé de l'époque - François Braun, dans un rapport consulté par Egora, daté de juin 2023. Ces assises, initialement annoncées "avant l'été 2023", ont en effet été reportées à deux reprises du fait des remaniements ministériels qui sont intervenus dans l'intervalle. Elles auront finalement lieu le 24 mai prochain, a annoncé l'avenue de Ségur. Mardi 23 avril, le rapport a été remis à Frédéric Valletoux, ministre délégué chargé de la Santé, qui promet d'annoncer des mesures à l'occasion des assises.
Ce rapport, qu'Egora a pu consulter, est le fruit de 23 tables rondes, 121 auditions, et environ 2000 contributions écrites d'organisations professionnelles, associatives ou de patients. Il liste 350 propositions, réunies en 20 "mesures phares" pour améliorer la santé de l'enfant dans sa globalité : somatique, psychique, sociale et environnementale.
La première vise à "créer un choc d'attractivité" pour le secteur, en revalorisant "toutes les prises en charge de l'enfant en ville comme à l'hôpital", du fait de leur caractère "chronophage".
La deuxième est centrée sur la formation aux spécificités de la santé de l'enfant de tous les professionnels médicaux et paramédicaux, qui doit être améliorée. Le rapport insiste ainsi sur la formation des internes de médecine générale en matière de santé de l'enfant, au cœur d'une controverse depuis la publication de nouvelle maquette du DES. Un semestre entier doit être y consacré, insistent les auteurs. Afin de permettre aux futurs généralistes "d’appréhender au mieux les différentes situations rencontrées, le parcours et les niveaux d’adressage", ce stage pourrait en revanche se dérouler indifféremment dans les différents lieux d'exercice que sont les urgences pédiatriques, les services de pédiatrie, les cabinets de MG orientés vers la santé de l'enfant, les cabinets de pédiatrie, voire en PMI et santé scolaire. Si possible, les stages couplant ville et hôpital sur un même territoire doivent être favorisés.
Le comité d'orientation plaide également pour "une gradation des soins clarifiée" avec la généralisation de la désignation d'un médecin traitant pour chaque enfant. Les urgences doivent redevenir "le lieu de l'urgence", insiste-t-il. Cela passe par une PDSA élargie dans son amplitude horaire comme dans le nombre de professionnels participants (inclusion des IDE et sages-femmes), par le renforcement des compétences pédiatriques des régulateurs, par l'organisation aux urgences de "consultations différées (24h)", "pour réserver les créneaux du soir ou de la nuit aux seules consultations urgentes" et par un accès aux urgences pédiatriques en nuit profonde sur régulation du 15 uniquement.
Les effectifs des PMI, transformées en "Maisons des 1000 jours et de l'enfant", doivent être renforcés. Un service de "santé des élèves" doit être créé avec pour objectif d'améliorer "leur bien-être" au sens large, en plus de la réduction des inégalités de santé. Un nouveau statut de "médecin de fonction publique" commun à ces deux services, aux centres de santé publics et aux hôpitaux est plébiscité.
Le rapport préconise encore la mise en place d'un "bilan de santé mentale" à l'entrée au collège, le développement d'un "plan sommeil", l'inscription dans la loi de "l'interdiction des écrans avant 3 ans" ou encore l'interdiction de la prescription d'antibiotiques aux enfants par téléconsultation.
Les 20 mesures du rapport:
1. Créer un choc d’attractivité : revalorisation de toutes les prises en charge de l’enfant en ville comme à l’hôpital en reconnaissance des spécificités et du caractère chronophage de la médecine de l’enfant (dont pédopsychiatrie).
2. Augmenter la quantité et la qualité de temps médical disponible : améliorer la formation en santé de l’enfant de tous les professionnels de santé médicaux et paramédicaux, augmenter le numerus apertus, faciliter les exercices en pratique avancée.
3. Rendre lisible des parcours de soins gradués pour les parents et les professionnels : le bon médecin, au bon endroit, au bon moment.
4. Améliorer l’accès aux soins non programmés et optimiser le recours aux services d’urgence : régulation téléphonique par des professionnels formés à la santé de l’enfant (SAS et/ou 15), participation élargie des praticiens libéraux à la continuité des soins et à la PDSA, renfort des équipes soignantes aux urgences pédiatriques au prorata de la lourdeur des soins, développement d’outils digitaux d’orientation et de conseil pour les parents.
5. Protéger les enfants les plus jeunes et les plus vulnérables des épidémies hivernales par des campagnes de prévention nationales intégrant les mesures barrières, les vaccins (grippe, rotavirus…) et les anticorps monoclonaux anti-VRS.
6. Sanctuariser le nombre de lits de réanimation pédiatrique et néonatale (atteindre un ratio de 1 lit pour 1000 naissances), pour pouvoir faire face à une crise sanitaire (épidémie hivernale récurrente) sans perte de chance pour les enfants (déprogrammation chirurgicale ou médicale).
7. Renforcer les équipes soignantes dans les services qui prennent en charge des enfants avec des besoins de soins renforcés.
8. Enrichir les registres des naissances et des décès de données médico-socio économiques et permettre les moyens de leur analyse pérennes.
9. Transformer les PMI pour mailler le territoire de Maisons des 1000 jours et de l’enfant (+450 ETP de médecins et 1800 ETP de puéricultrices et +300 ETP de sages-femmes).
10. Créer un nouveau « Service de santé des élèves », qui mobilise tous les professionnels de santé du territoire sous la coordination du médecin scolaire, et dont l’objectif est le bien-être des enfants et des adolescents.
11. Créer un nouveau statut de médecin de fonction publique commun à la santé scolaire/aux Maison des 1000 jours et de l’enfant/aux centres de santé publics/à l’hôpital, autorisant un exercice mixte et partagé.
12. Instaurer « l’heure partagée » dans toutes les écoles élémentaires : sacraliser la dernière heure du vendredi pour la consacrer à un retour partagé entre les élèves sur le déroulement de la semaine sur les aspects non académiques (médiation et lutte contre le harcèlement scolaire).
13. Créer un « Bilan de santé mentale » à l’entrée au collège et revaloriser le forfait « MonPsy ».
14. Renforcer les capacités en pédopsychiatrie : création de 600 postes en CMP-IJ, renforcement de l’offre d’hospitalisation et de post-urgence.
15. Faire des écoles des « bulles vertes » pour les enfants : réduction des émissions de CO2 aux abords des écoles, amélioration de la circulation et de la qualité de l’air dans les classes, zone « zéro tabac », mise à distance des zones d’épandage.
16. Inscrire dans la loi l’interdiction des écrans avant 3 ans.
17. Déployer le 1er Plan sommeil.
18. Une République, une santé : lutter contre les pertes de chance qui touchent les enfants ayant des besoins particuliers (maladies chroniques, précarité, handicap, maltraitances) et les enfants des Outre-Mer.
19. Lancer des appels à projets récurrents fléchés dédiés à la santé de l’enfant et soutenir le développement de plateformes innovantes technologiques et thérapeutiques adaptées aux spécificités de l’enfant, en créant notamment des plateformes de thérapies géniques.
20. Instaurer une Conférence nationale de la santé de l’enfant (CNSE), réunie tous les 2 ans sous l’autorité du Président de la République.
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