L'actualité socioprofessionnelle vue par le Dr Alain Trébucq, directeur des publications de Global Média Santé.
Tollé
Une fois n’est pas coutume, les syndicats médicaux sont quasi tous unanimes. Pour rejeter une proposition de loi portée par la députée Stéphanie Rist, rhumatologue, qui prévoit la possibilité pour les auxiliaires médicaux d’exercer en tant que profession médicale intermédiaire. Suscitant une véritable bronca et faisant surgir le spectre des officiers de santé, ces « sous-médecins » incarnés par Charles Bovary. Est-ce bien sérieux ?
Dans le contexte de crise sanitaire que nous vivons, le moment n’est certainement pas idéal pour ouvrir un tel débat. Mais il y a des constats qui s’imposent. Quand acceptera-t-on de regarder ce no man’s land qui s’étend des infirmières bac + 3 aux médecins bac + 10 ou au-delà ? Quand reconnaîtra-t-on officiellement que tant qu’on laisse aux médecins un grand nombre d’actes pouvant être faits par des professionnels moins qualifiés, on appauvrit le métier de généraliste, intellectuellement et économiquement ? Et ce raisonnement s’applique à toutes les spécialités médicales. Les ophtalmologistes l’ont bien compris, en déléguant des tâches aux orthoptistes dans une vraie filière de soins. Avec la croissance exponentielle des patients chroniques, les besoins de santé s’accroissent plus vite que la démographie médicale. Comment faire face sans recourir à des professionnels se positionnant dans ce no man’s land ? Ce ne sont pas quelques centaines d’infirmières en pratique avancée qui régleront le problème. Si ce débat mérite bien d’être ouvert, ce serait à la profession médicale de l’organiser plutôt qu’à l’État, omnipotent, de l’imposer. Un nombre grandissant de médecins en a bien conscience en s’engageant dans l’exercice coordonné en équipe pluriprofessionnelle ouverte sinon à de nouveaux métiers du moins à de nouvelles compétences, tirant vers le haut toute la chaîne des acteurs de santé.
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