Un médecin peut être suspendu par l’Ordre, pour insuffisance professionnelle, s’il ne possède plus les connaissances théoriques et pratiques nécessaires au bon exercice de sa spécialité. Dans un arrêt rendu le 23 juin 2021, le Conseil d’Etat a donné raison au Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) pour avoir prononcé à l’encontre d’un médecin spécialiste qualifié en médecine générale une mesure de suspension partielle de son activité pour une durée d’un an assortie de l’obligation de suivre une formation adaptée. A la lecture de ce dossier, il apparaissait que ce praticien avait, depuis plusieurs années, limité sa pratique de la médecine générale au domaine de la nutrition et qu’ainsi, il ne possédait plus les connaissances théoriques et pratiques nécessaires à l’exercice de la médecine générale dans l’ensemble des dimensions de cette spécialité. Autant d’éléments qui pouvaient justifier que cette absence de pratique soit constitutive d’une insuffisance professionnelle rendant dangereux l’exercice de la médecine générale par ce médecin, en dehors du domaine de la nutrition. Comme l’a rappelé un autre arrêt du Conseil d’Etat du 28 juillet 2021, il est toujours possible de contester une telle mesure de suspension prononcée par le Cnom, mais encore faut-il apporter des arguments solides et étayés justifiant l’absence de dangerosité de sa pratique. Dans une autre décision, du 24 novembre 2021, le Conseil d’Etat a ainsi conditionné la reprise d’activité au suivi d’une formation et à la réussite d’un examen. Expertise obligatoire Rappelons qu’aux termes de l’article R.4124-3-5 du Code de la santé publique, « en cas d’insuffisance professionnelle rendant dangereux l’exercice de la profession, la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d’exercer est prononcée par le conseil régional ou interrégional pour une période déterminée… ». Une éventuelle suspension qui ne peut être prononcée que sur la base d’un rapport établi par trois médecins qualifiés dans la même spécialité que celle du praticien concerné. Dès la demande d’inscription au tableau de l’Ordre, l’insuffisance professionnelle peut être soulevée compte tenu d’un doute sérieux sur la compétence professionnelle d’un médecin. Dans une affaire encore jugée par le Conseil d’Etat, le 3 juillet 2020, les experts désignés ont ainsi considéré que ce praticien avait des lacunes dans certains domaines de la médecine générale et qu’il adoptait des stratégies thérapeutiques non conformes aux recommandations de bonnes pratiques. L’Ordre était ainsi en droit de lui demander de suivre une formation de remise à niveau dans le cadre du diplôme interuniversitaire de médecine générale, se traduisant soit par l’obtention du diplôme, soit par une évaluation sous forme d’une attestation établie par le responsable du diplôme constatant l’assiduité à l’enseignement et procédant à une évaluation théorique des acquis. Un préalable indispensable avant toute réinscription à l’Ordre. Dans un autre arrêt, du 24 décembre 2019, le Conseil d’Etat a donné raison au Cnom pour avoir suspendu un médecin généraliste pendant deux ans, en lui fixant l’obligation de suivre une formation de remise à niveau dans le cadre du diplôme interuniversitaire de médecine générale ainsi que de réaliser un stage pratique chez un praticien d’une durée de six mois, en subordonnant la reprise de son activité à la justification du suivi de cette formation. Il était notamment reproché à ce médecin la pratique répétée de prescriptions médicamenteuses potentiellement dangereuses et un manque caractérisé de connaissances en « soins premiers » de pédiatrie, de gynécologie et de médecine de l’adulte.
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