Maladies à caractère professionnel : fréquentes et peu reconnues

18/04/2023 Par Marielle Ammouche
Médecine du travail
Les maladies à caractère professionnel - qui ne sont pas reconnues comme maladie professionnelle – sont constituées principalement par les TMS et la souffrance psychique. Elles augmentent avec l’âge et dans le temps, et interpellent sur la question de l’adaptation du travail avec l’avancée en âge, selon Santé publique France.
 

Les maladies à caractère professionnelles (MCP) sont définies comme étant tout maladie susceptible d’être d’origine professionnelle mais non reconnue en maladie professionnelle (MP) par un régime de Sécurité sociale. Elles s’opposent ainsi aux maladies professionnelles indemnisables, qui sont, elles, inscrites dans des tableaux de MP. Pour Mélina Le Barbier, directrice adjointe Santé Environnement Travail de Santé publique France, « les MCP constituent la partie immergée de l’iceberg ». Santé publique France (SPF) vient de publier de nouvelles données concernant ces MCP, qui mettent en évidence une forte augmentation de leur prévalence au cours de la dernière décennie. Ainsi, 7,1% des travailleurs et 11,4% des travailleuses ont déclaré au moins une MCP en 2018, contre réciproquement 4,9 et 6,2% en 2007. Les femmes étaient plus concernées quelle que soit l’année étudiée. Ce taux de signalement augmentait aussi avec l’âge sauf chez les femmes à partir de 55 ans ou plus. « Le fort taux de signalement des MCP observé à partir de 45 ans confirme l’intérêt particulier qui doit être porté aux travailleurs vieillissants et la nécessité d’adapter le travail avec l’avancée en âge » souligne SPF. Chez les hommes les secteurs les plus concernées sont la construction et de l’industrie. Chez les femmes, il s’agit des secteurs des transports et de l’entreposage.   TMS et souffrance psychique Les troubles musculosquelettiques et la souffrance psychique (principalement les symptômes dépressifs) sont les MCP les plus fréquentes, avec des différences de répartition selon le sexe. Ainsi, chez les hommes, ce sont les TMS qui dominent (environ la moitié des signalements entre 2012 et 2018), devant les troubles psychiques (un tier). Puis viennent les troubles de l’audition et les irritations et/ou allergies, qui représentent chacun moins de 5 % des pathologies signalées. Chez les femmes la part de la souffrance psychique est plus grande, et en augmentation entre 2012 et 2018, passant de 42 à 52% sur cette période. Arrivent ensuite les TMS, pour 40% des MCP signalées, puis les irritations et allergies (2 à 4% selon les années), et les troubles de l’audition (moins de 0,5 %). La prévalence des TMS est apparue relativement stable jusqu’en 2015, puis a augmenté jusqu’en 2018, de 3,1 à 4,4 % pour les femmes et de 2,4 à 3,2 % pour les hommes. La souffrance psychique a aussi augmenté progressivement entre 2012 et 2018 aussi bien chez les hommes que chez les femmes, avec une accélération depuis 2016. Son taux est passé de 1,8 à 2,7 % chez les hommes et de 3,5 à 6,2 % chez les femmes sur la période. Les facteurs incriminés sont surtout des facteurs biomécaniques (mouvements répétitifs, posture, travail avec force) pour les TMS, et des facteurs organisationnels, relationnels et éthiques (Fore) pour les troubles psychiques. La place de ces Fore est majeure. Une autre étude de SPF met ainsi en évidence qu’en 2015, un travailleur sur six aurait été confronté à un comportement social hostile (violences, harcèlements, intimidations) en lien avec son environnement de travail.   Gradient social Des différences sont aussi observées sur le plan social. Ainsi, il existe un gradient social pour les TMS dont la fréquence est maximale chez les ouvriers et minimale chez les cadres (d’un facteur 16 chez les hommes et 11 chez les femmes). Mais c’est l’inverse qui est observé pour la souffrance psychique, « même si ces résultats étaient à interpréter avec précaution en raison d’une possible sous-déclaration chez les ouvriers » ajoute SPF.   Sous déclaration L’organisme sanitaire souligne, par ailleurs, l’importance de la sous-déclaration concernant les maladies professionnelles, principalement en raison d’une méconnaissance de la procédure et d’un bilan diagnostique insuffisant. Ainsi, « environ 75 % des TMS correspondant à un tableau de MP n’ont pas fait l’objet d’une déclaration en MP ». En outre, il n’existe pas de tableau de MP pour la souffrance psychique. « Ces résultats soulignent tout l’intérêt de poursuivre la sensibilisation des travailleurs et la formation des médecins, et de mieux comprendre les déterminants de cette sous-déclaration » insiste SPF.    

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