Malgré l’innovation thérapeutique et les progrès en matière de diagnostic et de dépistage précoces, les chiffres du cancer restent une problématique de santé publique - 385 000 nouveaux cas et 60 000 décès chaque année. Comment continuer à faire progresser la prise en charge et le pronostic des cancers, sur l’ensemble du territoire, dans une situation pécuniaire contrainte ? La convention de la fédération nationale des centres de lutte contre le cancer (CLCC) justement destinée à développer une vision prospective en oncologie a permis de mettre en évidence les pistes les plus prometteuses. La feuille de route actuelle, dessinée par la stratégie nationale de lutte contre le cancer, est ambitieuse : augmenter de 9 à 10 millions le nombre annuel de dépistage organisé d’ici 2025, accroitre significativement le taux de survie des cancers de plus mauvais pronostic d’ici 2030, réduire de 150 000 à 90 000 le nombre de cancers évitables diagnostiqués annuellement à l’horizon 2040. Pour cela, des axes prioritaires ont été arrêtés, comme le renforcement de la prévention, du dépistage et de l’accès à l’innovation, soutenus par des dispositions fixées par la Loi de financement de la sécurité sociale 2023 : c’est notamment le cas avec le renforcement de la taxation dissuasive des produits du tabac ou celui des efforts de vaccination contre le papillomavirus (HPV). En matière de prévention, « la dynamique doit être fondée sur une approche de santé globale (One health) » a insisté le ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun. Elle devrait s’illustrer notamment dans les futurs rendez-vous de prévention qui seront mis en place à trois âges clés de la vie (20-25 ans, 40- 45 ans, 60-65 ans). Leurs modalités restent à déterminer, mais il est probable que la conduite de ces rendez-vous soit confiée aux médecins traitants. Dans les territoires désertifiés (11 % des français n’ont pas de médecin traitant), cette tâche pourrait être assurée par d’autres structures comme les CLCC qui proposent la constitution de filières territoriales pour la prévention des cancers ainsi que la coordination des projets territoriaux de cancérologie. Unicancer, qui rassemble les 18 CLCC, souhaite aussi développer des initiatives de dépistage et de prévention pour les personnes à haut risque de cancer dans ses centres. Le renforcement de l’accès à l’innovation et son accélération via la mise en place de l’Agence de l’innovation en santé, aideront à améliorer les taux de survie, et notamment ceux relatifs aux cancers de plus mauvais pronostic. Avec la chronicisation du cancer, les questions du vivre avec et de la vie post-traitement sont plus aiguës. En cela, la stratégie décennale vise à réduire de deux tiers à un tiers la part des patients souffrant de séquelles 5 ans après un diagnostic. Pour cela, le financement forfaitaire des soins de support post-aigus (soutien psychologique, activité physique adaptée, diététique…) est maintenu et le panier de soins concerné a été récemment élargi. Unicancer, de son côté, travaille à l’expérimentation d’un parcours harmonisé d’accompagnement psychologique et social pour les aidants. Des évolutions d’ordre réglementaire et législatives ont été ou sont en réflexion afin de généraliser le droit à l’oubli 5 ans après la fin du protocole thérapeutique, de maintenir dans l’emploi les patients diagnostiqués souhaitant continuer leur activité, et de favoriser ensuite le retour à l’emploi de ceux qui le peuvent. Vu du terrain Reste que les CLCC n’échappent pas aux tensions -ressources humaines, financières et organisationnelles- que rencontre le système hospitalier. Afin qu’elles n’altèrent pas l’accès de tous les patients à une prise en charge de qualité, Unicancer joue la carte de la vigilance et de la proactivité. Vigilance d’abord : la baisse des tarifs imposée au secteur privé non lucratif (-1,6%) dont font partie les centres se heurte à l’augmentation simultanée de leur activité (+6% entre 2019 et 2012) et au coût lié à la technicité des soins prodigués, renforcé par celui des plateaux techniques énergivores (radiothérapie, médecine nucléaire). La dotation des CLCC prévue par le plan d’investissement Ségur est également insuffisante par rapport à l’activité générée par les centres. « Être à la pointe de l’innovation demande un programme d’investissement rigoureux dont le surcoût actuel doit être financé» a insisté Sophie Beaupère, déléguée générale. Proactivité ensuite car, depuis plusieurs années, Unicancer établit ses axes stratégiques de développement sur la base d’un travail prospectif, récemment élargi à la question des ressource humaines et de l’utilisation des données de santé. Ainsi, « les contraintes RH sont fortes tant dans le personnel médical, paramédical que paramédical de nuit. Certaines disciplines, comme la radiologie ou l’anesthésie, sont plus en tension du fait de l’attractivité financière du système libéral. Nous devons proposer des parcours professionnels attractifs et stimulants. L’encadrement de l'intérim médical pour les soignants décidée dans le cadre du PLFSS est important pour nous» a poursuivi la déléguée générale. Valorisation des compétences, revalorisation des salaires, libération des praticiens du temps administratif, délégation de tâches, réflexion sur la gestion des carrières… : « de nombreux leviers existent, a résumé le Pr Jean-Yves Blay, président d’Unicancer. Et étant donné les difficultés de certains patients à rejoindre le système de santé en temps et en heure, il faut l’améliorer notamment grâce à la contribution des nouveaux métiers et aux nouveaux outils électroniques qui permettent d’avoir un accès plus rapide au diagnostic d’excellence ». « Nous travaillons à une dizaine de propositions destinées au Conseil National de la Refondation Santé et visant à faire avancer la prise en charge des cancers, a-t-il conclu. Notre capacité de coordination des parcours de soins dans les territoires est au cœur de ces propositions. Les orientations du ministre sont celles que nous souhaitons impulser. Nous devons travailler collectivement à la soutenabilité du système. »
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