Cancer de la prostate : résultats positifs de l’Hifu dans les formes localisées
Contre le cancer localisé de la prostate, le traitement par Hifu, qui repose sur des ultrasons focalisés de haute intensité administrés par voie rectale, s’avère au moins aussi efficace que la prostatectomie totale, avec moins de risques d’incontinence urinaire ou de dysfonction érectile.
Actuellement pris en charge dans le cadre du forfait innovation, dispositif visant à donner accès aux techniques innovantes, l’High Intensity Focused Ultrasound (Hifu) a obtenu, en décembre 2023, le feu vert de la Haute Autorité de la santé (HAS)* en vue d’un remboursement par l’Assurance maladie – mesure qui n’est pas encore effective. Afin de démontrer son efficacité, la technique devait faire l’objet d’une évaluation comparative avec la prostatectomie locale. Pour cela, deux études ont été menées, l’une (Hifi-1) en première intention, l’autre (Hifi-2) en seconde ligne après radiothérapie externe.
Ce sont les résultats à 30 mois de la première étude que le Dr Guillaume Ploussard, chirurgien urologue à la clinique La Croix du Sud (Quint-Fonsegrives, près de Toulouse), a présentés lors du Congrès français d’urologie. L’étude a porté sur 3 328 patients atteints d’un cancer localisé de la prostate, de risque faible ou intermédiaire, traités par Hifu ou opérés en vue d’une prostatectomie totale.
Parmi ses limites, l’étude n’était pas randomisée, du fait que les patients du bras Hifu ne devaient pas être âgés de moins de 70 ans. Par ailleurs, du fait de l’évolution des recommandations depuis l’inclusion du premier patient (en 2015), les cancers de faible risque (39% des participants) relèvent désormais d’une "surveillance active" plutôt que d’un traitement immédiat.
Les résultats à deux ans et demi confirment la non-infériorité de l’Hifu par rapport à la chirurgie. Le risque de subir un traitement de rattrapage était diminué de 24% sous Hifu par rapport aux patients prostatectomisés, voire de 34% en cas de cancer de grade intermédiaire. Selon d’autres résultats présentés lors de la même session, les patients du groupe Hifu, malgré un âge plus élevé que ceux du groupe prostatectomie (74,7 ans vs 65,1 ans), présentaient une moindre dégradation au niveau érectile comme en termes d’incontinence.
Chirurgie robotisée : de meilleurs résultats oncologiques
Autre technique innovante, la prostatectomie totale par chirurgie robot-assistée a fait l’objet de résultats très favorables, rapportés lors de la même session, en termes d’efficacité comme de coût. Dénommée Ecorepar, cette étude financée par le ministère de la Santé, menée à partir du Système national des données de santé, révèle un net avantage par rapport aux deux autres voies d’abord, à savoir la chirurgie ouverte et celle menée par laparoscopie.
Selon les résultats présentés, la chirurgie robotisée était liée à une baisse de 15% du risque de décès et/ou de récidive par rapport à la chirurgie ouverte, à huit ans de suivi. De même, le risque de décès, toutes causes confondues, était diminué de 21% après chirurgie robot-assistée. Par ailleurs, le coût total de la prise en charge était légèrement plus élevé à la suite d’une chirurgie ouverte qu’avec une chirurgie robot-assistée (39 853 euros contre 39 301 euros, soit une différence de 552 euros sur huit ans). Non présentée lors du congrès, l’étude a également conclu à la supériorité de la chirurgie robot-assistée par rapport à celle par laparoscopie.
Selon le Pr Grégoire Robert, chef du service d’urologie du CHU de Bordeaux, "il faut, à mon avis, arrêter de pratiquer la prostectomie par la voie ouverte. La chirurgie robotisée coûte moins cher, présente une meilleure survie globale et une meilleure survie sans progression". Demeure le prix de l’appareil, non pris en compte dans l’étude - qui ne portait que sur les coûts à la charge de l’Assurance maladie. Pour l’hôpital, le coût d’un tel appareil s’élève "entre 1,5 et 2 millions d’euros", à quoi s’ajoutent les frais de maintenance et de fonctionnement.
"Le but de cette étude est d’aider l’Assurance maladie à accepter de payer un surcoût pour la chirurgie robotique, compte tenu du fait qu’elle génère des économies à l’échelle du pays, qu’elle fait mieux en termes de résultats oncologiques et fonctionnels", explique l’urologue bordelais. Selon lui, "il y a un vrai problème d’accès à l’innovation en France, que ce soit pour l’Hifu, présent depuis quinze ans en France, ou pour la chirurgie robotisée. Finalement, on se retrouve avec des innovations techniques, parfois inventées en France, très bénéfiques à plein d’égards, mais qui n’y sont pas remboursées, alors qu’elles le sont déjà d’autres pays !"
*HAS. "Destruction par ultrasons focalisés de haute intensité (Hifu) par voie rectale d’un adénocarcinome localisé de la prostate - Rapport d'évaluation", 4 décembre 2023.
Références :
118e Congrès français d’urologie (CFU), Paris, du 20 au 23 novembre. D’après les présentations du Dr Guillaume Ploussard (Quint-Fonsegrives, Haute-Garonne) et du Pr Grégoire Robert (Bordeaux)
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