Spondylarthrite axiale : les difficultés d’un diagnostic précoce

27/06/2023 Par R.L.
Rhumatologie
[EULAR 2023] Le diagnostic de la spondylarthrite axiale, dans ses formes précoces, continue à faire débat parmi les experts. Invalidés par une récente étude, les critères de classification de la maladie, publiés en 2009, devraient prochainement faire l’objet d’une révision.

  Maladie inflammatoire chronique affectant en premier lieu de jeunes adultes, la spondylarthrite axiale (axSpA, selon l’acronyme anglais) pâtit d’un retard élevé au diagnostic, souvent de 10 ans après les premiers maux de dos. En cause, le caractère courant de ces douleurs, mais aussi le fait que cette maladie demeure largement méconnue du grand public. Là n’est pas le seul écueil que rencontre l’axSpA, qui souffre aussi d’un manque de critères diagnostiques bien définis. Malgré cette béance, les rhumatologues disposent de plusieurs éléments pour trancher. D'après le site rhumatismes.net*, l’axSpA se manifeste par « un mal de dos inflammatoire (douleur nocturne et raideur le matin) débutant avant 45 ans », dont le diagnostic est renforcé par divers facteurs : « notion familiale ou terrain HLA B27 [gène prédisposant à l’axSpA, NDLR], arthrites, enthésites ou dactylites, signes extra-musculo-squelettiques (entéro-colopathie, psoriasis, uvéite), sacro-iliite à la radiographie ou à l’IRM, syndrome inflammatoire, bonne efficacité des traitements anti-inflammatoires non stéroïdiens ».   Critères de classification : des doutes sur la spécificité Face à l’absence de critères diagnostiques établis, la tentation est grande, chez les rhumatologues, de recourir aux critères de classification de l’Asas**, qui reposent sur les éléments sus-cités [voir encadré]. Emis en 2009, ces critères se sont attachés à distinguer des formes plus précoces d’axSpA via le recours à l’IRM, plus sensible que l’examen radiographique. Or des critiques ont rapidement émergé à l’égard de ces critères, jugés trop permissifs. Parmi les craintes, la possibilité que les rhumatologues s’appuient excessivement sur l’IRM, identifiant des sacro-iliites dont toutes n’évolueront pas vers les dommages articulaires observés dans la spondylarthrite ankylosante, stade plus avancé (‘radiographique’) de l’axSpA. Craignant elles aussi une épidémie de « spondylarthrites axiales non radiographiques », la Food and Drug Administration en 2013, puis l’Agence européenne du médicament (EMA) en 2015, ont d’abord refusé d’étendre l’indication de certaines biothérapies à un stade aussi précoce, terrain jugé trop mouvant. Avant, finalement, de donner leur accord sur la base d’essais probants, appliquant très strictement les critères Asas : à ce jour, sept biothérapies disposent dans l’UE de l’indication ‘spondylarthrite axiale non radiographique’. Sans attendre la décision des autorités du médicament, l’Asas et le réseau nord-américain Spartan*** ont discuté dès 2016 de la possibilité de réévaluer ces critères. En a découlé l’étude Classic, dont les résultats ont été présentés au congrès de l’Eular. Elle a été conduite sur 1 015 personnes souffrant d’un mal de dos depuis au moins trois mois, survenu avant l’âge de 45 ans, toutes suspectées d’axSpA. Ses résultats s’avèrent négatifs : la sensibilité des critères était de 73,8% (au lieu des 75% visés), tandis que la spécificité n’était que de seulement 84,3% (au lieu de 90%). Face à ces résultats, les experts semblent résolus à réactualiser les critères Asas, en particulier ceux relatifs à l’IRM.   Des diagnostics plutôt stables Qu’en est-il dans la pratique clinique, domaine du diagnostic plutôt de la classification ? La situation semble plus apaisée : parmi les patients initialement diagnostiqués avec une axSpA, rares sont ceux sont le diagnostic est réévalué deux ans plus tard. Pour montrer cela, Mary Lucy Marques, rhumatologue au centre médical universitaire de Leyde (Pays-Bas), et ses collègues ont analysé 555 personnes souffrant d’un mal de dos depuis moins de deux ans. Parmi eux, 175 se sont vu diagnostiquer une axSpA lors du premier examen (32%), 166 lors d’un examen à deux ans (30%). Seuls 5% des diagnostics initiaux d’axSpA ont été réfutés par la suite, tandis que 8%, d’abord jugés non atteints par la maladie, se sont finalement vus accorder ce diagnostic à deux ans. La situation semble donc relativement stable, à une nuance de taille : lors de l’examen à deux ans, 14% des patients demeuraient dans l’incertitude diagnostique.   *Le site rhumatismes.net a été élaboré par l’équipe du pôle ostéo-articulaire de l’hôpital Cochin (Paris)
**Asas : Assessment of Spondyloarthritis International Societyµ
***Spartan : Spondyloarthritis Research and Treatment Network  

La classification, à ne pas confondre avec le diagnostic
D'après le site rhumatismes.net, « le classement d’un malade a un tout autre objectif [que le diagnostic]. Cela peut être pour la Sécurité sociale de distinguer dans une population (tous les citoyens français) ceux que l’on peut considérer comme ayant une spondylarthrite (avec pour conséquence une reconnaissance particulière comme la mise en ALD). Cela peut être aussi pour les chercheurs de ne s’adresser qu’à une population homogène de patients qui participent à une étude de recherche clinique ou un essai thérapeutique ».

  Au sommaire de ce dossier :

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