"Tant qu'ils refuseront de la retirer, on sera dehors" : en colère, les internes ont manifesté contre la 4ème année de médecine générale
Plus de 2000 internes se sont rassemblés devant le ministère de la Santé ce vendredi 14 octobre avec un objectif clair : demander le retrait de la quatrième année d’internat à réaliser en priorité dans les zones sous-denses, mesure prévue dans le Projet de loi de financement de la sécurité sociale. Ils continueront à se mobiliser tant que le ministère n’aura pas cédé. “Médecins, médecins, pas larbins”... Rue de Ségur, le slogan a été repris en chœur par un long cortège d’étudiants en médecine, venus de toute la France pour manifester contre l’allongement de la durée de l’internat des futurs généralistes. Appelés à se mobiliser par les syndicats représentatifs, l’InterSyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale, l’InterSyndicale nationale des internes et l’Association nationale des étudiants en médecine de France notamment, ils étaient plus de 2000 à venir marcher entre le ministère de la Santé et le Sénat ce vendredi 14 octobre.
Ce qui a provoqué leur colère? Une mesure du Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2023, qui vise à créer une quatrième année d’internat pour la médecine générale, à réaliser “en priorité dans une zone sous-dotée”. “Nous refusons d'être des pions que l'on déplace sur le territoire, au bon vouloir des politiques. Nous refusons tout simplement une énième réforme bâclée de nos études, comme c'est malheureusement trop souvent le cas ces dix dernières années”, a déclaré Raphaël Presneau, président de l’Isnar-IMG avant le départ de la manifestation.
“Les solutions apportées par le Gouvernement sont démagogiques, dénonce Laurent, 25 ans, étudiant en premier semestre d’internat de médecine générale. Elles nous placent, nous internes et médecins, comme les méchants ou même les mercenaires du système de santé.” Pour cet étudiant de La Sorbonne Université, c’est la société qui doit “rendre service aux internes” et non l’inverse, “vu comment nous sommes exploités pendant plusieurs années”. “Une quatrième année pour nous former en médecine générale est en fait là juste pour nous employer à nous envoyer dans les déserts médicaux. Elle serait soi-disant supervisée, mais on n'a pas assez de superviseurs [maîtres de stage, ndlr], même pour nos stages actuellement ! C'est de la fumisterie”, s’emporte-t-il, une pancarte “- de démagogie, + de pédagogie” à la main.
Comme lui, beaucoup d’étudiants sont venus battre le pavé pour dénoncer leurs conditions d’études et notamment leur temps de travail à l’hôpital. Pour rappel, un interne travaille en moyenne 58,4 heures par semaine en moyenne. Ils ont également rappelé toute leur opposition à la suppression de la liberté d’installation en chantant à l’unisson “coercition, c’est non, c’est non !”.
A leurs côtés, les syndicats seniors de médecins, les représentants d’autres professions médicales sont peu à peu venus grossir les rangs de la mobilisation. Selon les chiffres officiels, 41% des internes en médecine générale se sont déclarés en grève aujourd’hui à l’hôpital. Un chiffre qui a de quoi satisfaire les syndicats d’internes… néanmoins déçus par le manque de réaction du ministre de la Santé. Reçus dans l’après-midi par son directeur de cabinet, ils ont très vite dénoncé le “mépris” de François Braun.
“Nous sommes reçus par le directeur de cabinet… Car le ministre n’est pas là, il est en déplacement. Je suis déçue de voir qu’on fait le choix encore une fois de mépriser les internes”, a réagi Olivia Fraigneau, présidente de l’Isni. Pourtant, pas de quoi décourager cette interne urgentiste : “je garde l’espoir qu’ils changent d’avis et retirent la quatrième année de MG du PLFSS, car aussi longtemps qu’ils refuseront de le faire, on sera dehors, on va se mobiliser”, prévient-elle. En colère, les manifestants ne trouvent aucune excuse au ministre, “la mobilisation est annoncée depuis suffisamment longtemps, on est un millier à être ici…”, grince-t-on dans le cortège.
Selon l’Isni, la grève, d’une semaine reconductible, peut durer dans le temps. “Aujourd’hui, il y a des étudiants en médecine de tous niveaux, on est soutenus par tous les syndicats et même là, ils ne daignent pas nous recevoir”, dénonce encore Olivia Fraigneau, agacée par ailleurs par l’habitude du ministère de prétendre que ce rallongement de l’internat est “voulu par les internes”.
Alors qu’une mission de concertation a été lancée par François Braun, qui devra rendre ses conclusions d’ici la fin de l’année et que le Gouvernement souhaite que la quatrième année d’internat soit effective en septembre prochain, pour la présidente de l’Isni, la priorité est ailleurs : “Il faut commencer par régler les problèmes de l’internat avant de parler allongement des études. Je vous rappelle qu’un interne se suicide tous les 18 jours aujourd’hui.”
#Greve14Octobre Les internes sont mobilisés devant le ministère de la #Sante à l'appel de @ISNARIMG et @ISNItwit pour lutter contre l'ajout d'une quatrième année d'internat de médecine générale et les mesures coercitives. pic.twitter.com/mEj18lwG97
— Egora - L'actu des médecins (@EgoraInfo) October 14, 2022
Crédit photo : Louise Claereboudt
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