Le quotidien d'une femme atteinte d'endométriose, c'est "la douleur", résume Marie-Rose Galès, patiente experte (un patient qui est concerné par une maladie chronique et en développe au fil du temps une connaissance fine) de cette pathologie frappant environ une femme sur dix. Aujourd'hui encore, elle est diagnostiquée avec un retard moyen de sept ans. Une fois évaluée, l'endométriose "est une maladie pour laquelle la science n'apporte pas encore toujours de solution satisfaisante", constate Pascale Duval, porte-parole de l'Unadfi (Union nationale des Associations de défense des familles victimes de sectes). "Pour certaines c'est difficilement supportable, et elles vont alors consulter en-dehors du réseau médical, au risque de retarder la prise en charge médicale et l'acceptation de la maladie", regrette Pascale Duval. Plus de 80% des femmes atteintes d'endométriose ont déjà eu recours à une pratique de soin non conventionnelle, selon une étude en cours de l'Inserm, parfois même sur les conseils de leur médecin. Certaines de ces pratiques peuvent aider des patientes à mieux vivre leur pathologie et, donc, être éventuellement proposées parallèlement à une prise en charge classique, selon la Haute autorité de santé qui cite l'acupuncture, l'ostéopathie et le yoga. Un "endobusiness" Ces disciplines peuvent avoir un effet bénéfique sur la douleur, explique Marie-Rose Galès, mais attention à l'"endobusiness": "par exemple des stages à 1.000 euros le weekend pour "guérir", ou encore un ostéopathe autoproclamé spécialiste de l'endométriose qui facture 120 euros la séance..." "Avec ces praticiens, les femmes trouvent souvent une écoute, une prise en charge qu'elles n'ont pas trouvé dans le médical", regrette Marina Kvaskoff épidémiologiste et chercheuse Inserm spécialiste du sujet, "le problème c'est quand ces personnes promettent le remède miracle". L'épidémiologiste cite l'exemple d'une patiente encouragée par un naturopathe à se nourrir uniquement de légumes crus pour guérir son endométriose: "elle a fini par peser 38 kilos sans du tout régler son problème". La doctorante en sociologie Helena Schoefs, co-auteure de l'étude Inserm, évoque aussi les interactions de certaines plantes a priori inoffensives avec des médicaments: le millepertuis peut ainsi réduire l'action de la pilule contraceptive - un des traitements les plus prescrits dans l'endométriose. Helena Schoefs souligne aussi "les risques indirects comme la perte de temps et d'argent", et "la perte de chance qui peut signifier l'aggravation des symptômes de la maladie". Des discours culpabilisants Parmi les dérives concernant l'endométriose, patientes et spécialistes dénoncent aussi un discours culpabilisant autour de la maladie. La Miviludes, la mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires, a dénoncé des stages pour renouer avec "son féminin sacré" lors desquels "il est affirmé que si une femme a des règles douloureuses, c'est qu'elle n'est pas "en accord avec sa nature profonde de femme"". Marie-Rose Galès nuance: "on m'a proposé à un moment de l'auriculothérapie [stimulation de l'oreille, NDLR] à l'hôpital, en m'expliquant qu'il s'agissait d'un essai qui n'avait pas fait ses preuves. (...) On est informés des limites de la pratique et on ne vous ment pas". En revanche, la patiente a rencontré "des gynécologues qui vous expliquent que votre endométriose a été créée par un trauma, un viol par exemple, que vous avez refoulé". Elle appelle à se méfier du discours psychanalytique "autour de la mémoire transgénérationnelle notamment", des théories qui permettent de développer une emprise psychologique sur des femmes ainsi rendues très vulnérables. "Systématiquement, avec ces discours, la maladie est là par votre faute, et si vous échouez à guérir c'est encore votre faute, jamais celle des soi-disants thérapeutes", témoigne aussi Pascale Duval de l'Unadfi, qui décrit des femmes qui "finissent dans un état psychologique terrible".
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