"Quand on met 120 millions d'euros sur la table, qu'est-ce que ça produit en face ?" : Thomas Fatôme veut évaluer l'impact des CPTS
Quelle est la pertinence des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ? Améliorent-elles la santé des populations ? Aux Journées nationales des CPTS mercredi 9 octobre, le directeur général de la Caisse nationale d'assurance maladie a défendu le modèle, mais a appelé les équipes à passer un "test de maturité et de crédibilité".
Article initialement publié sur Concours pluripro
C'est une pionnière. Car la CPTS Vénissieux Saint-Fons (Auvergne-Rhône-Alpes) a signé son accord conventionnel en 2019 – la première en France – mais l'aventure a démarré depuis 2015, se souvient Pascal Dureau, son secrétaire. S'il avoue que son équipe "a essuyé les plâtres", le médecin généraliste se réjouit qu'ils aient su rebondir. Ce qu'il en retient ? Surtout, il ne faut "pas trop juger" les deux premières années des CPTS, lance-t-il aux pouvoirs publics "parce que ce sont des années d'installation, d'acculturation. Quand on est médecin généraliste, on ne peut pas devenir d'un seul coup des gestionnaires d'entreprise, des RH… Les professionnels de santé qui s'engagent ont besoin d'être accompagnés."
Cinq ans après la signature des premiers accords conventionnels interprofessionnels (ACI), Thomas Fatôme affirme, pour sa part, "croire aux CPTS", comme à ses débuts. Pour preuve, l'Assurance maladie a "multiplié ses soutiens financiers par trois", assure son directeur général. Sur le terrain, la dynamique est lancée : la couverture du territoire avoisine les 90% et 567 contrats ACI ont été signés.
Pour autant, il est nécessaire de faire évoluer cet ACI, estime Jean-François Moreul, vice-président de la Fédération des CPTS (FCPTS), "parce que les CPTS arrivent à cinq ans d'existence pour la plus ancienne. Et on constate tout un tas de changements, de pratiques… Il faut aussi faire preuve d'innovation, d'un soutien politique, et adapter les indicateurs notamment aux particularités des Outre-mer. À Mayotte par exemple, le coût de la vie est en moyenne 17% plus élevé par rapport à la métropole, et sur la communication, un outil indispensable dans l'organisation de la CPTS, ce taux s'élève à +35%. Alors même qu'elles fonctionnent avec un ACI type… On ne peut clairement pas travailler avec les indicateurs de l'ACI dans ces conditions". Des discussions ont d'ailleurs déjà été amorcées avec les syndicats monoprofessionnels, ajoute le médecin généraliste, également président de la CPTS des Vallées de l'Anjou Bleu (Pays de la Loire).
"Est-ce qu'avec la CPTS, il se passe quelque chose pour les professionnels de santé et les patients ?"
Il est "important de continuer à accélérer et à structurer, surtout face aux enjeux majeurs de notre système de santé", insiste Thomas Fatôme. Et si le premier cap du maillage territorial est passé – bien qu'il avoue ne pas être "obnubilé" par l'idée d'une couverture globale –, il faut désormais passer à un "test de maturité et de crédibilité", assure-t-il. Car il s'agit de savoir, "quand l'Assurance maladie met 120 millions sur la table pour soutenir les CPTS, qu'est-ce que ça produit en face", a-t-il expliqué fermement, tout en insistant sur le fait que "les indicateurs ne sont pas là pour faire des indicateurs mais pour mesurer ce qui se passe sur le territoire. Est-ce qu'[avec la CPTS], il se passe quelque chose pour les professionnels de santé et les patients ? est-ce que ça change ou apporte quelque chose ? Moi, je crois que la CPTS est en train de produire car elles sont très investies notamment sur la prévention, sur l'accès aux soins… Mais pour le moment, c'est le cas dans beaucoup d'endroits, moins dans d'autres…"
Démontrer la plus-value des CPTS dans les territoires, leur impact sur la santé des populations pour justifier des investissements de l'Assurance maladie… Ce qui passe par des indicateurs et des objectifs à atteindre pour un certain nombre de missions. Comme les actions de prévention, "la ligne budgétaire qui pose le plus de problème dans les CPTS", a confié Delphine Secret Pouliquen, administratrice de la FCPTS, en faisant remonter les réactions de la salle : "Comment expliquer cette différence entre la prévention qu'on met en avant dans les actions et le peu de fonds et de financements accordés aux CPTS ?" Pour Thomas Fatôme, qui cite par exemple la mission qualité et pertinence des soins ou encore accès aux soins, et notamment au médecin traitant, "chaque mission est importante. Mais ce à quoi l’Assurance maladie reste attentive, c'est l’accès aux soins, l’accès au médecins traitant, a-t-il insisté. On vous attend sur ce sujet car l’investissement est trop inégal et on n'est pas au rendez-vous de là où on devrait être ensemble. Oui pour faire de la fongibilité de l'enveloppe, oui pour réfléchir à la souplesse, mais si c'est pour sacrifier telle ou telle mission, on ne sera pas d'accord".
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