"Pas de masques dans les cabinets?!" : Bachelot se paie les médecins et les juge responsables [VIDEO]

02/07/2020 Par Aveline Marques
Auditionnée devant la commission d'enquête de l'Assemblée nationale, l'ancienne ministre de la Santé s'est montrée particulièrement sévère envers les médecins libéraux qui auraient dû, selon elle, s'équiper bien avant la crise du coronavirus. "On attend que le préfet ou le directeur de l’ARS viennent avec une petite charrette pour apporter des masques ?", a-t-elle ironisé. Des propos jugés "indignes" par les syndicats.
 

L'heure de la revanche a sonné pour Roselyne Bachelot. Longtemps critiquée pour sa gestion de la crise H1N1 (et pour la loi HPST), l'ancienne ministre de la Santé est aujourd'hui montrée en exemple. Interrogée sur la pénurie de masques durant la crise du Covid-19 (un milliard de masques chirurgicaux et 700 millions de FFP2 en 2010 ; 117 millions de masques chirurgicaux adultes et zéro FFP2 début 2020), Roselyne Bachelot a pointé les responsabilités… des médecins libéraux. "J'ai entendu un représentant de syndicat de médecins dire 'nous n'avions pas de masques dans nos cabinets'… Mais enfin, des médecins qui n'ont pas de masques dans leur cabinet, qui ne se constituent pas de stock… 'Nous n'avions pas de blouse'… Mais enfin, pourquoi les médecins ne portent plus de blouse?! Dans le pays de Pasteur, qu'est-ce que c'est que cette médecine où on l'on ne croit plus à l'aseptie?", s'est-elle emportée. Pour appuyer son propos, Roselyne Bachelot a relaté la récente visite d'un médecin à son domicile. "Quand un médecin vient me voir pour une angine à streptocoques, qu'il vient me voir sans masque, sans blouse, sans se laver les mains, qu'il me pose sur le torse -très beau d'ailleurs- un stéthoscope qu'il n'a même pas désinfecté et qu'il repart sans se laver les mains, sans masque et sans blouse… Mais pourquoi est-ce qu'on n'a pas de blouse ? Ça n'existe plus ?" Et l'ancienne pharmacienne de suggérer aux médecins libéraux d'équiper leur cabinet de machine à laver. "Dans les hôpitaux aussi je ne peux que constater la désastreuse habitude de la barbe chez les soignants (...) je ne comprends pas qu'on soit barbu dans un hôpital", a-t-elle ajouté.

  "Mais qu'est-ce que c'est que ce pays infantilisé ?! Il faut quand même un peu se prendre en main!" Roselyne Bachelot a ensuite pris la défense des ARS, instituées sous sa gouvernance. "Mais enfin, on attend que le préfet ou le directeur de l'ARS viennent avec une petite charrette pour apporter des masques?", s'est-elle moquée. "Mais qu'est-ce que c'est que ce pays infantilisé?! Il faut quand même un peu se prendre en main! C'est ça la leçon qu'il faut tirer. Tant qu'on attendra tout du seigneur du château, on est mal." Jugée "sévère" par le rapporteur de la commission Eric Ciotti (LR), l'animatrice télé a enfoncé le clou. "Evidemment que si on essaie de se procurer des masques au moment de la pandémie, il n’y en a nulle part", a-t-elle lancé, jugeant que l'achat de masques ne représente qu'"un tout petit investissement pour un cabinet médical".  


Tout comme Marisol Touraine, auditionnée à sa suite, l'ancienne ministre de la Santé s'est en revanche bien gardée "de donner des leçons à [ses] successeurs et de juger leurs actions tant je connais la difficulté de leurs tâches". "Les procès dont j'ai fait l'objet...

 les moqueries, les mises en cause (ont été) d'une telle violence et d'une telle injustice que je peux comprendre les craintes suscitées chez certains de mes successeurs. On s'est dit qu'il y avait plus de risques à en faire trop qu'à en faire pas assez", a-t-elle analysé.     L'UFML exige des excuses pour les familles de médecins endeuillées Les propos de Roselyne Bachelot ont provoqué la colère des syndicats de médecins. "Qu'est-ce que c'est que cette ancienne ministre qui tient des propos indignes devant la représentation nationale ?", s'est emporté Jean-Paul Hamon, président de la FMF, sur France Info. "On a du gel en stock pour un mois, on a quelques boîtes de masques mais on n'a pas de quoi tenir pendant un mois de pandémie, défend le syndicaliste. Quand on s'est aperçus qu'on allait en avoir besoin. On a appelé nos fournisseurs habituels, mais il n'y avait rien, il n'y avait plus moyen de se fournir." Et de rappeler que 46 médecins libéraux ont donné leur vie et que 5000 médecins ont été contaminés pour avoir soigné les patients Covid-19.

Jugeant les propos de Roselyne Bachelot "honteux", le syndicat UFML a exigé dans un communiqué "des excuses pour les familles de médecins endeuillées". Le syndicat rappelle enfin que "95% des cas de coronavirus ont été gérés par la médecine de ville et que les cabinets médicaux sont restés ouverts dans leur très grande majorité malgré le manque de protection et la mise en danger des médecins qui en a découlé".   [avec AFP, LCP et FranceInfo]

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