Assistants médicaux, CPTS : l'administration alourdit tout

15/11/2018 Par Catherine le Borgne
Politique de santé
Les généralistes de la CSMF livrent une analyse plutôt acide de la réforme "Ma santé 2022", qui doit trouver les moyens de sa mise en œuvre dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2019. Or, malgré un Ondam de 2,5 %, supérieur aux 2,3 % initialement annoncés, ce sont pas moins de 4 milliards d'euros économies qui sont demandées à la ville. Et la main de l'administration pèse lourd dans la mise en place des réformes.

Pour Les généralistes de la CSMF, "Ma santé 2022" est "une partition inachevée", alors que le syndicat avait salué la logique de la réforme : participation des libéraux et des hospitaliers à sa mise en place, décloisonnement de la ville et de l'hôpital, création d'assistants médicaux, refonte des études de médecine, formation des infirmiers en pratique avancée (IPA), soutien à l'innovation et volonté de développer l'exercice coordonné. Partition nachevée, car sur le terrain, le Dr Luc Duquesnel, le président du syndicat, constate qu'elle se heurte à des écueils.  A commencer par la constitution de CPTS (communautés professionnelles territoriales de santé). Le président Macron veut en compter 1000 d'ici 2022, et Luc Duquesnel redoute qu'il ne s'agisse que de coquilles vides, au vu de l'empressement des ARS et des URPS (unions régionales des professions de santé), d'en créer en incitant les médecins libéraux à s'y investir. On peut comprendre l'attitude des URPS, sachant que les pouvoirs publics sont fondés à créer eux même des CPTS en cas de carence des professionnels. Mais les ARS semblent concurrentielles entre elles pour afficher le plus gros score de CPTS créés dans une région.

Une négociation conventionnelle doit se mettre en place en janvier prochain, à la Cnam, pour donner un cadre à ces communautés professionnelles, et une fédération des CPTS a vu le jour "avec en son sein, certains membres fondateurs qui ne seront jamais, ni de près ni de loin, concernés par les CPTS", regrette Luc Duquesnel. Bref, "depuis quelques mois, une frénésie s'est emparée de nos territoires", résume le président. Face à cette agitation, les professionnels de santé auraient plutôt tendance à prendre leur distance. "Ils voient là la mise en place d'un nouveau "machin", source de nombreuses réunions qui rallongent les journées de travail ou suppriment du temps de consultation", constate le président des Généralistes de la CSMF. Il regrette que la méthodologie employée s'éloigne de celle qui a fait le succès des maisons de santé professionnelles : constat des besoins de santé du territoire, projet de santé, obtention des moyens nécessaires, y compris financiers, regroupement en SISA (société interprofessionnelle de soins ambulatoires), pour formaliser leur exercice regroupé et recevoir les aides financières indispensables à cet exercice. Ainsi, "nous éviterons les CPTS coquilles vides, comme hier le DMP sans dossier et aujourd'hui, certaines MSP sans médecin généraliste". Autre innovation importante pour les médecins généralistes, la création dans le PLFSS 2019, des assistants médicaux. "Une idée sur laquelle travaille la CSMF depuis 2011", rappelle le président en ajoutant qu'"une fois encore, cette bonne idée a été pervertie, pour être au service d'une doctrine politique, en proposant un accompagnement financier sous conditions -car, pour en bénéficier, il faudra exercer en cabinet de groupe, être inscrit en exercice coordonné- et suffisamment restreint pour n'être profitable qu'à une petite partie de médecins libéraux".

En pratique, les aides existeraient pendant les deux premières années (50 000 euros la première année, selon la rumeur), mais disparaîtraient à la troisième. Le praticien devra donc trouver dans le surcroît d'activité procuré par l'aide de l'assistante les moyens financiers pour la rémunérer. Or, "le modèle médico-économique de la médecine générale avec sa consultation de base à 25 euros n'est plus adapté à notre exercice libéral", affirme Luc Duquesnel : "il est hors de question qu'on nous demande de travailler plus pour payer cette nouvelle fonction". La négociation de début d'année pour définir le profil de poste de l'assistant médical se traduira sous forme d'un avenant à la convention 2017. Au total, le patron des Généralistes de la CSMF dévoile sa crainte : qu'une petite partie seulement des médecins généralistes (15 à 20 %),  ceux qui sont investis dans les maisons de santé qui perçoivent le financement ACI, ceux qui pourront bénéficier des services d'un assistant médical ou d'une infirmière de pratique avancée et pourquoi pas, ceux qui seront engagés dans une expérimentation type article 51, soient les seuls heureux élus de toutes ces aides. La majorité de la profession n'aurait droit à rien "et ne pourraient alors pas bénéficier du nécessaire exercice coordonné que tout le monde appelle de ses vœux".

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