"C'est miraculeux que les soignants continuent de croire en leur mission" : le Président de l'Ordre met la pression sur Agnès Buzyn
"Nous craignons que le projet en préparation au ministère de la Santé soit plus un cataplasme que la réforme globale attendue", s'alarme le Président de l'Ordre national des médecins, Patrick Bouet dans une interview au Journal du Dimanche. Dans un livre à paraître ce mercredi, "Santé : Explosion programmée", le généraliste dévoile l'aboutissement d'une réflexion de cinq ans à la tête du CNOM mais aussi de quarante ans d'exercice en Seine-Saint-Denis. Et le constat est sans appel : "Si la machine continue de tourner, c'est grâce à l'engagement des aides-soignantes, des kinés et des médecins, étudiants, libéraux ou salariés du public et du privé", assure le Dr Bouet. "C'est miraculeux qu'ils continuent de croire en leur mission !", ajoute-t-il faussement désabusé. Pour le médecin, le problème fondamental vient de l'impératif de réduction des dépenses exigé à la santé depuis des décennies. "Toutes les réformes successives n'ont eu qu'un seul but : assurer l'équilibre budgétaire (…) La santé est le seul secteur auquel on demande des efforts pareils, se désole le Dr Patrick Bouet. Pourquoi son budget devrait-il être équilibré quand celui de l'Education nationale échappe à cette injonction ?" Aujourd'hui, le Président du Conseil national de l'Ordre des médecins appelle à des investissements massifs dans la santé. Un message régulièrement repris par les professionnels sur le terrain, qui tentent même parfois de se faire entendre auprès du président Emmanuel Macron, sans grand succès. Agnès Buzyn, qui doit annoncer dans les prochaines semaines un vaste plan pour l'hôpital, a laissé entendre qu'il n'y aurait pas d'investissement supplémentaire. La ministre entend plutôt s'attaquer à une meilleure répartition des moyens existants, lutter contre la "gabegie" et les "actes inutiles". La réforme du financement doit aussi permettre une part de 50% de T2A. "La réforme du système de santé ne peut pas se cantonner à un toilettage de la T2A", fustige encore le Dr Bouet, critiquant dans le même temps la "fausse bonne idée" des GHT. "L'hôpital s'est parlé à lui-même, déplore le généraliste. Il s'est réorganisé tout seul en oubliant les usagers, les élus locaux, le monde libéral, les cliniques." La télémédecine, souvent vantée comme une solution à la désertification médicale, en prend aussi pour son grade. "Les nouvelles technologies, très prometteuses, ne résoudront pas comme par miracle tous les problèmes de notre système", avertit Patrick Bouet. Et de rappeler, que dans son cabinet à 9 kilomètres de Paris, il ne peut pas recevoir de radio dématérialisée, faute de connexion internet suffisante. [Avec LeJDD.com]
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