Pelouses de sport synthétiques : pas d’augmentation du risque cancéreux
La note de l'agence sanitaire publiée mardi, qui évoque par ailleurs des "risques potentiels" pour l'environnement, passe en revue une cinquantaine d'études et expertises réalisées dans le monde sur les terrains de sports et aires de jeux construits à partir de matériaux issus du recyclage de pneus usagés. "Les expertises scientifiques ne mettent pas en évidence de risques préoccupants pour la santé, en particulier de risque à long terme cancérogène, leucémie ou lymphome", explique à l'AFP Gérard Lasfargues, directeur général délégué de l'Anses. "Quand on suit les populations qui pratiquent sur ces terrains, et qu'on compare à la population générale, on ne voit pas d'excès de risque ou d'augmentation", poursuit-il, notant malgré tout que l'agence soutient une proposition en discussion au niveau européen pour limiter la teneur des granulés en HAP (hydrocarbures aromatiques polycycliques), substances cancérogènes. Des études épidémiologiques avaient été lancées notamment après l'alerte lancée il y a quelques années par Amy Griffin, entraîneuse de foot dans des universités américaines, qui décrivait une augmentation de cancers chez des étudiants jouant sur terrains synthétiques. ONG et médias ont ensuite largement relayé ces inquiétudes, s'interrogeant sur l'innocuité de milliers de terrains fréquentés notamment par des enfants. Des données insuffisantes, en particulier sur les terrains "indoor" La note, qui relève des "limites méthodologiques dans les données disponibles" et un manque de données sur d'autres points, n'a pas rassuré l'association Robin des bois, qui avait saisi l'agence. "Ca nous conforte dans notre inquiétude", commente son président Jacky Bonnemains. "Le domaine le plus lacunaire est l'inhalation de particules et de nanoparticules, un risque important en particulier pour des enfants en plein effort physique, avec des poumons dilatés, réceptacles privilégiés de ces particules", souligne-t-il. Et "il faut redoubler de prudence pour les terrains en milieu fermé", indique-t-il à l'AFP. La note de l'Anses appelle en effet à mieux évaluer l'exposition sur les terrains indoor, où "les composés organiques volatils émis par les granulats de caoutchouc (...) peuvent provoquer des irritations oculaires et respiratoires". Le "risque thermique" et de déshydratation des sportifs doit également "être considéré", la température y augmentant plus vite. Incertitudes sur les terrains de jeux pour enfants Quant aux aires de jeux pour enfants, "la question est un peu différente", note le Pr Lasfargues. "La couche de granulats est protégée par une couche superficielle d'agglomérants, avec des colles et des résines", explique-t-il, soulignant la nécessité de collecter des données sur d'éventuels composés organiques volatils émis par ces produits pour lever les "incertitudes". Pour Aliapur, principal organisme chargé de la collecte et du recyclage des pneus, l'avis de l'Anses est une bonne nouvelle. L'Anses dit "sans ambiguïté" que pour un "gazon synthétique rempli de granulats de caoutchouc", le "risque pour la santé est faible et négligeable", commente son directeur général Hervé Domas, regrettant les "rumeurs" des derniers mois. "Les gens qui pouvaient être légitimement inquiets de ce qui a été véhiculé peuvent aujourd'hui être rassurés", ajoute-t-il. Quant aux terrains indoor, dont il note le développement plus récent et moins encadré, la filière "sera tout à fait encline à considérer qu'il est naturel de se pencher sur le sujet". Selon l'Anses, en 2016, 90 000 tonnes de pneus ont été recyclés en granulats, soit 40 à 50% de la filière de traitement des pneus en France. Début 2018, il existait environ 3 000 terrains sportifs synthétiques de grande taille en France. Les gazons synthétiques représentent 10% des grands terrains de football. L'Anses souligne d'autre part les "risques potentiels" de ces granulats pour l'environnement, liés au transfert de certaines substances chimiques via les sols et les systèmes de drainage des eaux. "On retrouve un métal comme le zinc, peu dangereux pour l'homme mais qui peut être toxique pour certaines espèces animales et la flore, et des phénols, classés perturbateurs endocriniens pour l'environnement", note le Pr Lasfargues.
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