Perturbateurs endocriniens : "On a gagné une bataille, mais pas la guerre"
Après trois ans de mobilisation, l'Union européenne a adopté des critères de définition des perturbateurs endocriniens, base nécessaire à toute réglementation. Mais ils ne concernent pour l'instant que les pesticides. Le gouvernement français, Nicolas Hulot en tête, compte aller plus loin.
Le texte adopté ce mardi 4 juillet par le comité technique chargé du dossier, au sein duquel siègent des experts représentant les 28 Etats membres de l'UE, "assurera que toute substance active utilisée dans les pesticides identifiée comme perturbateur endocrinien pour les personnes ou les animaux pourra être évaluée et retirée du marché", a expliqué le commissaire européen à la Santé, Vytenus Andriukaitis. L'exécutif européen avait proposé des critères de définition en juin 2016, deux ans après la date promise, sous la pression des ONG et des Etats membres. Il a fallu un an et quelques amendements pour que le texte soit accepté. Si Bruxelles salue "un grand succès" qui va permettre "de commencer à travailler sur une nouvelle stratégie pour minimiser l'exposition des citoyens européens aux perturbateurs endocriniens", les critiques fusent de tous côtés. "Les critères ne fournissent aucune protection supplémentaire pour la santé et l'environnement et ne servent qu'à avoir un impact disproportionné et discriminatoire sur les agriculteurs européens qui vont souffrir d'une nouvelle réduction arbitraire du nombre d'outils à leur disposition", a réagi Graeme Taylor, porte-parole de l'ECPA, organisation qui représente les industriels des pesticides (BASF, Dow, DuPont, Monsanto, Syngenta) à Bruxelles. "Ce qu'aurait dû faire la Commission, c'est adopter des critères horizontaux qui s'adapteraient à n'importe quel secteur", a déploré Alice Bernard, de l'ONG ClientEarth. "Les critères votés aujourd'hui (...) requièrent un niveau tellement élevé de preuve (de la toxicité des substances chimiques) qu'ils ne protègeront ni les humains ni la nature", a souligné Genon K. Jensen, qui représente EDC-Free Europe, une coalition de plus de 70 organisations. En outre, l'exemption offerte pour certains pesticides qui agissent pour affecter le système endocrinien de leurs "cibles" (un insecte désigné) mais pas celui d'autres "vertébrés", dont les humains, fait enrager les opposants à ces nouveaux critères. La France, longtemps critique, a finalement voté en faveur du texte amendé (comme 20 autres Etats membres), arguant d'une version améliorée par rapport au premier projet car concernant les perturbateurs endocriniens "présumés", et non plus seulement avérés. "On a gagné une bataille mais pas la guerre", a expliqué le ministre français de la Transition écologique Nicolas Hulot à l'AFP, regrettant en particulier de ne pas avoir pu faire supprimer l'exemption pour les pesticides conçus comme des perturbateurs endocriniens. La France se réserve le droit d'interdire unilatéralement certaines substances sur son territoire, comme la législation européenne le lui permet. [avec AFP]
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