Fake news

Proposition de loi Garot : patients et députés dénoncent les "fake news" des médecins

Le vote de la régulation de l'installation des médecins, introduite par la proposition de loi Garot, a provoqué l'ire de la profession, qui tente – à coups de communiqués de presse et de menaces de grève – de faire entendre raison aux parlementaires. En réponse, le groupe transpartisan, à l'origine de ce texte décrié, a publié un vrai/faux démontant leurs arguments. Une véritable guerre des chiffres semble s'être déclarée. 

14/04/2025 Par Louise Claereboudt
Fake news

"Régulation de l'installation des médecins : réponses à quelques idées reçues" : tel est le titre de ce document de quatre pages, publié par le groupe transpartisan contre les déserts médicaux. La centaine de députés de ce groupe sont parvenus, le 2 avril dernier, à faire adopter la régulation de l'installation des médecins dans l'hémicycle, au travers de la proposition de loi Garot dont ils sont à l'origine. Un vote "historique" contre lequel les représentants de la profession s'élèvent, en ordre de bataille.

"C'est la mort de la médecine libérale" ; "Nous avons la douleur de vous faire part du décès tragique de la médecine libérale […] fauchée en pleine agonie par la proposition de loi Garot" ; "populisme électoral"… Les réactions des médecins ont été nombreuses à la suite du vote. Les étudiants et jeunes médecins ont annoncé entamer un mouvement de grève le 28 avril, et une manifestation sera organisée le lendemain dans les rues de la capitale. Médecins pour demain a de son côté appelé à la fermeture des cabinets.

Médecins, serez-vous prêts à aller exercer jusqu'à 2 jours par mois dans un désert ?

Thierry Bour

Thierry Bour

Oui

Je l'ai fait pendant 25 ans à raison de 2 jours par semaine. C'est très enrichissant et satisfaisant au plan professionnel. Il y ... Lire plus

Une conférence de presse doit par ailleurs se tenir ce mercredi 16 avril à Paris : les six syndicats représentatifs de la profession, le Conseil de l'Ordre, les syndicats d'étudiants en médecine, ainsi que des jeunes médecins et remplaçants, doivent présenter les modalités de leur mobilisation. Pour Médecins pour demain, qui sera aussi dans les rangs, cette PPL risque en effet d'entrainer "une nécrose de la médecine de proximité et de spécialité". 

C'est dans ce contexte de vives tensions que le groupe transpartisan a publié ce texte de quatre pages, démontant un à un les arguments des médecins. "La France entière est un désert médical, et les médecins restent la profession de santé la mieux répartie" : faux selon les députés du groupe transpartisan, affirmant que "le fossé continue de se creuser entre les territoires". S'ils concèdent que la régulation n'est pas "la solution miracle", ils se défendent de vouloir "déshabiller Pierre pour habiller Paul". 

La PPL Garot prévoit de flécher l'installation des médecins par le biais d'un régime d'autorisation délivrée par l'ARS. "En zone sous‑dotée, - soit, selon le zonage actuel, près de 90% du territoire pour les généralistes par exemple – l'autorisation est délivrée de droit pour toute nouvelle installation", assurent les parlementaires. Quand l'offre de soins est "au moins suffisante", elle est conditionnée à la cessation d'activité d'un confrère de la même spécialité. Ainsi, la PPL "ne diminuera en aucun cas l’offre de soins dans les territoires déjà suffisamment dotés", promettent les députés, faisant valoir leur vision.

Si les médecins crient à la coercition, et à l'atteinte à la liberté d'installation, les députés soutiennent, eux, qu'ils préservent au contraire ce principe, en ne faisant que "l'encadrer". Ils se défendent également de "tuer la médecine libérale", en mettant en avant le dépôt de leur amendement visant à appliquer aussi cette régulation aux salariés des centres de santé. "La régulation de l'installation ne remet pas en cause l'exercice libéral, ni ne dévalorise la profession médicale. Ce que le groupe de travail transpartisan propose, c'est un nouveau contrat entre la Nation et ses médecins", peut-on lire.  

 

"Nécessaire entreprise de rectification"

Le groupe transpartisan reprend par ailleurs le nombre, évalué par Egora avec l'aide du Dr Michaël Rochoy, de généralistes (435) qui seraient concernés par la mesure chaque année, pour balayer les affirmations selon lesquelles "personne n'ira s'installer en zone sous-dotée". Ils omettent néanmoins deux options : ces 435 généralistes qui seraient théoriquement contraints de s'installer ailleurs que dans une zone suffisamment dotée pourraient tout aussi bien décider de ne pas s'installer, ou de reprendre le cabinet d'un confrère de même spécialité dans ce territoire, qui pourrait être tenté d'anticiper sa retraite par exemple. 

Les députés du groupe voient donc le verre à moitié plein, et estiment que "la régulation de l’installation pourrait permettre chaque année à près de 600 000 patients de retrouver un accès régulier à un médecin, voire de retrouver un médecin traitant - sans même prendre en compte les installations de médecins spécialistes". Enfin, ils indiquent ne pas croire au fait que cette mesure "entraînera une crise des vocations", compte tenu de l'afflux candidats en première année de Pass. "En 2023, pour 26 614 places ouvertes en première année d’études en Santé (Pass), 921 300 étudiants ont postulé, soit 34 candidatures par place disponible", note le groupe. 

Pour France assos santé, qui réaffirme son soutien à la PPL Garot dans un récent communiqué, les réactions des médecins ont "un parfum de marche funèbre". "De ces faire-part expiatoires, on retiendra surtout l'outrance et l'indignité, en regard du nombre de patients en déshérence", tacle la fédération qui réunit plus de 90 associations d'usagers. Et de saluer le décryptage réalisé par le groupe transpartisan : les "faits avérés" qu'ils avancent "remettent les pendules à l'heure et un peu de raison dans un débat où l'agressivité tend à s'imposer comme seule boussole".

Souhaitant apporter son concours à "cette nécessaire entreprise de rectification", la fédération appuie les arguments des députés du groupe transpartisan. Elle ajoute que : "Non, la permanence des soins ambulatoires (PDSA) ne suffit pas à couvrir les besoins du territoire", en se basant sur le rapport de l'Ordre des médecins 2023. "Moins de 40% des médecins libéraux y prennent part", ajoute-t-elle, affichant clairement son souhait que l'obligation de PDSA soit rétablie par l'Assemblée le 5 mai, lorsque l'examen de la PPL Garot reprendra. 

"Le vote de l'article 1 [la régulation de l'installation] a été un signal fort, qui marque très probablement une rupture, ce dont témoignent les réactions excessives des médecins. Il n'empêche, il faut consolider ce premier pas, tout en continuant à œuvrer pour un dialogue constructif, au profit des usagers", tient à rappeler France assos santé.  

22 débatteurs en ligne22 en ligne
Photo de profil de Francois Laissy
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Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 11 jours
Une seule réponse : OUI à condition que nous ayons le statut des médecins de caisse ou des médecins des mines, la même paye et les mêmes conditions de retraite,35 heures par semaine, 6 patients par he
Photo de profil de Pat Bourgpat
1,2 k points
Débatteur Passionné
il y a 13 jours
Sinon, pourquoi dans cette fake news, ils ne prennent pas le nombre de 310 patients par médecin comme c'est le cas quand l'état s'amuse à faire du socialisme et donc de la pénurie pour réduire les dép
Photo de profil de Fabien Bray
6,3 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 13 jours
Moins de 40% des libéraux y prennent part... Mais enfin, quand 97% de la pSA est remplie c'est quoi le soucis? Encore hier, de garde, plus personne de midi à minuit au cabinet... Je ne vois vraiment p
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