L'an dernier, 1 767 médecins se sont partagés près de 7 millions de dollars canadiens (4,5 millions d'euros) pour la "supervision" de 358 infirmières praticiennes spécialisées et la "surveillance" de leurs activités médicales. La Coalition avenir Québec (CAQ) et la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ) critiquent une rente qui n'a plus lieu d'être vu la compétence de ces professionnelles.
L'an dernier, 1 767 médecins ont touché ce forfait pour la "supervision" des infirmières praticiennes spécialisées (IPS) et la "surveillance" de leurs activités médicales, selon des données de la Régie de l'assurance maladie du Québec. Ils ont reçu un total de 6,9 millions de dollars en 2017, pour une moyenne de 3 905 $ chacun (2 520 euros). Dit autrement, ajoute la CAQ, chaque IPS génère plus de 19 000 $ (12 254 euros) pour les médecins. "C'est une prime qui, pour nous, n'a pas lieu d'être", affirme le porte-parole de la CAQ en matière de santé, François Paradis. Ce forfait pour superviser les IPS est à ses yeux "injustifié", puisqu'elles sont "les mieux formées, les plus hautes dans la hiérarchie" du corps infirmier. "C'est une forme de snobisme médical qui nous coûte des sous", ajoute-t-il. La CAQ rappelle que le gouvernement Couillard s'est engagé à ce que le Québec compte 2 000 IPS d'ici 2024. Le coût du forfait pourrait alors atteindre près de 40 millions de dollars canadiens (25,8 millions d'euros) selon ses calculs. "C'est insultant de voir les médecins recevoir autant d'argent pour superviser les IPS alors qu'elles n'ont pas besoin de supervision", affirme la présidente de la FIQ, Nancy Bédard. Selon la chef syndicale des infirmières, les IPS sont "encore réellement sous le joug des médecins (…) On est pas mal tannés de voir comment les IPS sont utilisées par l'appareil médical au Québec alors qu'elles ont vraiment une compétence et une autonomie qui devraient leur être reconnues", soutient-elle. Mais pour le ministre de la Santé et des Services sociaux, Gaétan Barrette, le forfait est justifié. Il fait valoir que l'IPS peut faire des actes de façon autonome, mais un médecin doit être rémunéré si elle lui demande "un conseil" ou "un ajustement dans l'approche diagnostique" d'un patient. C'est pourquoi un montant forfaitaire est versé au médecin, a-t-il expliqué. "Le partenariat [voulu entre le corps médical et les IPS] commande qu'il y ait une rémunération liée à ça pour le médecin." Le forfait pour la supervision des IPS existe depuis 2010, en vertu d'une entente entre le gouvernement et la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ). Le ministre de la Santé de l'époque, Yves Bolduc, avait justifié la mesure en disant qu'il est normal qu'un médecin soit payé lorsqu'il discute des cas de patients avec une IPS. Cette entente visait à favoriser l'intégration des IPS dans les cabinets auprès de "médecins partenaires". Ce dernier a droit à des activités rémunérées liées à la surveillance générale des activités médicales de l'IPS ou à la supervision directe de la candidate IPS. Ces activités incluent les discussions de cas, les rencontres d'équipe et la révision des dossiers. Elles sont rémunérées à l'acte par un ou plusieurs forfaits hebdomadaires. C'est en vertu de ces règles que des médecins ont touché près de 7 millions l'an dernier. En plus du forfait pour la supervision, le "médecin partenaire" reçoit également des sommes pour compenser certains frais d'exploitation liés à l'accueil d'une IPS et concernant le loyer, le secrétariat et l'achat de matériel. Ces sommes sont quant à elles acceptables, soulignent la CAQ et la FIQ. Par ailleurs, le travail des IPS contribue au fait que des médecins touchent d'autres forfaits à certaines conditions - pour la prise en charge et le suivi de patients, par exemple. Les visites et les consultations effectuées par l'IPS sont prises en compte dans un calcul permettant au médecin partenaire d'obtenir un "supplément au volume de patients inscrits". De plus, une IPS peut inscrire un patient jugé non vulnérable auprès de son médecin partenaire, qui touchera alors un forfait pour l'inscription. Avec lapresse.ca
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