Nouvelles modalités d'accès en médecine : "On continue de créer des inégalités", regrette le collectif Pass/LAS
Fin 2023, le Conseil d'Etat donnait raison au Collectif national Pass/LAS et enjoignait le Gouvernement de revoir les conditions d'accès en deuxième année d'études de santé. Alors que des projets de textes modifiant ces modalités ont été dévoilés, Emmanuel d'Astorg estime qu'ils ne mettent pas fin aux inégalités entre étudiants. "On reste dans un marasme, dans quelque chose qui n'est pas clair", lance le président du collectif.
"On n'attendait pas grand-chose […] Mais on prend acte de ce qui a été proposé et on a quelques commentaires à faire." Emmanuel d'Astorg, président du Collectif national Pass/LAS, est loin d'être convaincu par les projets de décret et d'arrêté modifiant l'accès en deuxième année des filières santé présentés, mardi 11 juin, devant le Cneser*. Ces textes viennent encadrer les modalités des épreuves d'admission en deuxième année des études de médecine, maïeutique, odontologie et pharmacie (MMOP), mises en place avec la réforme de la Paces. Ces dernières ont été considérées comme irrégulières par le Conseil d'Etat fin 2023, qui avait donné six mois au Gouvernement pour revoir sa copie.
Une victoire pour le collectif national Pass/LAS, à l'origine de requête. Six mois plus tard, Emmanuel d'Astorg reconnaît les "ajustements" réalisés par le Gouvernement, mais regrette que les épreuves orales soient maintenues. "Ces oraux sont, pour nous, inégaux, car tous les étudiants ne sont pas concernés", avance le président du collectif. Car les étudiants, qu'ils soient en Pass ou en LAS, sont d'abord sélectionnés sur leurs notes obtenues durant l'année. Seuls ceux ayant les meilleurs résultats sont alors admis en filières santé sans passer d'épreuves orales. "On s'étonne toujours qu'une partie des jeunes ne passent pas ces oraux", relève Emmanuel d'Astorg.
Les projets de décret et d'arrêté, présentés cette semaine, ne reviennent pas sur ces dernières modalités. Mais ils précisent la pondération des épreuves orales dans la note globale classant les étudiants. Elles devraient désormais peser 30% dans cette note globale, mais avec une variation possible de 5% "en plus ou en moins" selon les universités. "On va encore créer des inégalités, s'étonne Emmanuel d'Astorg. Entre territoires, on pourra avoir jusqu'à 10 points d'écart." De plus, cela veut dire que les étudiants admis sans avoir à passer les épreuves orales "seront sélectionnés uniquement sur 70%" de leur note globale, poursuit-t-il, s'interrogeant sur les limites de telles modalités.
"On reste dans un marasme"
"Nous, ce que l'on demande, c'est qu'il y ait une homogénéisation complète de cette réforme", s'insurge le président du Collectif national Pass/LAS. "On continue de créer, même avec [ces] adaptation[s] […], une inégalité entre les étudiants. Ça nous pose un problème, car ce que l'on dénonce depuis le début, c'est cette inégalité dans la formation" depuis la mise œuvre de la réforme de la Paces en 2020.
Si les textes présentés mardi viennent également préciser les attendus de ces épreuves orales – indiquant notamment qu'elles ne peuvent porter sur la présentation du projet professionnel du candidat -, "on reste dans un marasme, dans quelque chose qui n'est pas clair", soupire Emmanuel d'Astorg. Le professeur des écoles craint surtout que ces oraux puissent encore porter sur des questions sans rapport avec les études de santé : "On va encore juger les compétences des étudiants sur ce type de questions […] Ça nous semble complètement hors de propos."
Certains éléments avancés dans les nouveaux textes semblent toutefois "intéressants", glisse le représentant du collectif. A commencer par l'inscription dans le code de l'éducation d'une obligation pour les universités de déterminer dès "le 1er octobre de l’année, pour chacune des formations MMOP, leur capacité d’accueil d’étudiants en deuxième et troisième années du premier cycle, pour l’année universitaire suivante".
La modification de modalités concernant le nombre de places offertes en deuxième année des études de santé est aussi notable. En effet, le projet de décret prévoit qu'un arrêté "fixe le pourcentage minimal de places proposées pour chaque formation" MMOP – et non plus un nombre précis de places -, qui ne peut toutefois "excéder 50 % du nombre total de places proposées". "On ne voit pas encore où va être l'avantage ou le défaut dans ce changement, avance Emmanuel d'Astorg, intrigué. On ne sait pas trop sur quoi ce critère est défini. Il faut donc attendre de voir comment les facs vont l'utiliser, mais c'est quelque chose qui change."
Reste à savoir si ces projets de décret et d'arrêté verront le jour, et surtout à quelle échéance. Le Conseil d'Etat avait donné au Gouvernement jusqu'à la fin du mois de juin pour agir. Mais en pleine crise politique suite à l'annonce de la dissolution de l'Assemblée nationale, "ces textes seront-ils appliqués ? Comment vont-ils l'être ? Et seront-ils vraiment utiles aux jeunes ?", lance le président du Collectif national Pass/LAS.
*Le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche.
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