Une équipe de chercheurs français a montré pour la première fois au monde que le cannabis entraine une altération dans la communication entre les cellules nerveuses de la rétine. Cette démonstration ouvre de nombreuses perspectives, puisque la vision est impliquée dans les actes de la vie quotidienne, et en particulier, dans la conduite automobile.
L’amélioration des connaissances pharmacologiques et toxicologiques du cannabis a déjà permis de révéler ses effets délétères au plan vasculaire mais aussi la toxicité cérébrale de la drogue. Aujourd’hui, des résultats préliminaires révèlent que le fonctionnement de la rétine serait également fortement perturbé. Cette étude, menée par des chercheurs du CHRU et du Centre Psychothérapique de Nancy, le Pr Raymund Schwan et les Drs Vincent Laprévote et Thomas Schwitzer, vient d’être publiée dans le JAMA Ophtalmology. Leur travail fait partie d’un vaste programme de recherche, Causa Map, initié et dirigé par l’équipe de Nancy. Cette étude, financée par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) et la Mission Interministérielle de Lutte contre les Drogues et les conduites addictives (MILDECA), est dite préliminaire, parce qu’elle porte sur une partie des volontaires de ce programme de recherche, mais son résultat est jugé suffisamment innovant et important pour être publié avant la fin du recrutement des volontaires qui se poursuit actuellement. L’étude a été menée auprès de 52 volontaires (28 usagers réguliers de cannabis et 24 non exposés) à partir de la mesure des courants électriques des cellules nerveuses de la rétine grâce à un électrorétinogramme. Les usagers réguliers de cannabis participant à cette étude fumaient au moins 7 joints par semaine et ont été recrutés, tout comme les volontaires non exposés, par un appel presse et affichage. Cette recherche, qui n’avait encore jamais été menée sur l'homme, montre que les yeux d’un consommateur régulier de cannabis ont un important retard dans leur réponse à un signal lumineux. Ce résultat est interprété comme une altération dans la communication entre les cellules nerveuses de la rétine sous l'influence du cannabis. Une démonstration qui ouvre de nombreuses perspectives, puisque la vision est impliquée dans les actes de la vie quotidienne, et en particulier, dans la conduite automobile. Les équipes de recherche nancéiennes entendent poursuivre leurs explorations pour estimer les conséquences de ce retard rétinien sur l'ensemble de la fonction visuelle. Ces conséquences s’ajoutent à celles déjà connues. Chez le volontaire sain, en prise unique, le cannabis induit des troubles cognitifs : troubles de l’attention et de la mémoire, en particulier de la mémoire de travail. La consommation de cannabis entraîne également une augmentation du temps de réaction, des troubles des fonctions exécutives comme des difficultés à maintenir lors de la conduite automobile, le véhicule sur sa trajectoire, ainsi que des troubles de la prise de décision. La consommation chronique de cannabis (au moins une fois par semaine sur une période minimale de 3 ans) est significativement associée à des troubles cognitifs, avec des troubles de l’attention, de la mémoire, des altérations de l’encodage, du stockage et du rappel des informations, ainsi qu’à des troubles du traitement de l’information.
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