HTA : ce qu’il faut retenir du congrès européen de l’ESH

15/07/2022 Par Alexandra Verbecq
Cardio-vasculaire HTA
Le 31ème congrès de l’European society of hypertension (ESH) s’est tenu du 17 au 20 juin 2022 à Athènes. Ce rendez-vous a été l’occasion de faire le point sur l'état actuel du contrôle de la pression artérielle en Europe, de présenter les dernières actualités thérapeutiques et diagnostiques et de rappeler que certaines hypertensions artérielles sont encore sous-diagnostiquées.

  Au sommaire également : -       Vers de nouveaux antihypertenseurs -       L’hyperaldostéronisme primaire : sous-diagnostiqué  

De nouvelles données sur le contrôle de la pression artérielle et la dénervation rénale

  Pour les experts réunis à Athènes, il faut être vigilant avec les nouveaux dispositifs de mesures de la PA. Par ailleurs, les études confirment que la dénervation rénale constitue désormais une alternative thérapeutique.  Le Pr Michel Azizi* est Chef de Service au Centre d’excellence en hypertension artérielle, Hôpital Européen Georges Pompidou, PAris.   Egora : Le contrôle de la pression artérielle des patients hypertendus est-il insuffisant ?  Pr Michel Azizi* : Depuis cinq ans, nous assistons à une dégradation de la prise en charge de l’hypertension artérielle (HTA). La dernière enquête Esteban (2018) montrait que : seule la moitié des hypertendus se savaient être hypertendus ; la moitié d'entre eux étaient pris en charge dont seuls 50% étaient traités et parmi ceux traités, la moitié avait une pression artérielle (PA) contrôlée. C’est une situation extrêmement préoccupante car l’HTA en France a une prévalence de 30 % environ et la mortalité associée a augmenté. Le rôle des médecins généralistes est absolument capital : depuis la détection de l’HTA, sa prise en charge initiale, la mise en place des règles hygiéno-diététiques au démarrage du traitement antihypertenseur. Il faut lutter aussi contre l’inertie thérapeutique qui a pour effet de perpétuer un mauvais contrôle tensionnel en particulier s’il est aussi associé à une mauvaise adhérence thérapeutique.     Le phénomène de non-adhérence thérapeutique est-il conséquent ? Les nouvelles technologies de détection des médicaments anti-hypertenseurs ou de leurs métaboliques dans les liquides biologiques (techniques de chromatographie liquide couplée à la spectrométrie de masse en tandem) ont permis de montrer l'ampleur du phénomène de mauvaise adhérence thérapeutique. Les chiffres sont très préoccupants car 20% des patients n’initieront pas leur première prescription médicamenteuse et la moitié arrêteront leur traitement antihypertenseur au cours de l’année qui suit son démarrage. Ce phénomène est associé à un surrisque de complications cardiovasculaires, cérébrovasculaires et rénales sur un intervalle de temps court. Il entraine un coût pour le système de santé (réalisation d’explorations inutiles, de consultations multiples, voire des hospitalisations). Ces technologies doivent être implémentées dans notre pays pour améliorer cette détection et la prise en charge des patients. Il ne s’agit pas de les blâmer mais d’entreprendre un nouveau dialogue avec eux pour essayer de comprendre leurs raisons. Les combinaisons médicamenteuses en un seul comprimé doivent aussi être favorisées pour simplifier les traitements. Il est regrettable que les trithérapies antihypertensives en un seul comprimé, remboursées et utilisées dans le reste de l’Europe, ne le soient pas en France alors même qu'elles augmentent considérablement le contrôle tensionnel et l'adhésion au traitement.   Quelles sont les nouveautés autour de l’automesure tensionnelle ? Des appareils validés oscillométriques automatiques permettent une mesure de la PA à condition qu’elle soit réalisée strictement selon les recommandations actuelles de l’ESH traduites par la Société française d'hypertension artérielle et mise en ligne sur son site internet. Il est nécessaire de promouvoir l’automesure tensionnelle par les patients en utilisant une méthodologie correcte. Il est regrettable que les appareils d’automesure tensionnels ne soient pas remboursés en France, ce qui réduit la population susceptible de pouvoir en bénéficier. Des communications ont porté sur les nouvelles modalités de mesure de la PA en utilisant des appareils de mesure sans brassard en particulier des montres « intelligentes ». Différentes technologies existent. Le problème principal vient du fait qu’elles ne mesurent pas directement la PA au niveau de l'artère radiale. En effet, les technologies embarquées dérivent d’une PA systolique et diastolique à partir du temps de transit d’onde de pouls par l’intermédiaire d’un algorithme qui n’est généralement pas connu. Un autre problème vient de la méthodologie de validation et de calibration employée. La plupart de ces appareils ont été validés en comparant les valeurs calculées à la mesure invasive intraartérielle dans l’artère radiale controlatérale. Cela pose le problème de la signification des valeurs mesurées pour la pratique quotidienne qui se base sur les mesures de PA indirecte au bras au niveau d’une autre artère, l’artère brachiale. Enfin, ces nouvelles approches posent le problème de la quantité astronomique de mesures qui, certes, indiquent les charges tensionnelles ambulatoires mais ne permettent pas d’avoir une information exacte et précise car potentiellement influencées par tous les moments de la journée. Enfin, des mesures répétées instantanées sont susceptibles d’accroitre l’inquiétude des patients de façon disproportionnée. Donc, pour l'instant, l’EHS ne recommande aucun de ces appareils.   Quels sont les derniers résultats des essais portant sur la dénervation rénale ? Plusieurs mises au point ont été consacrées à la dénervation rénale par voie endovasculaire. Quatre nouveaux essais indépendants ont montré de façon concordante des baisses de la PA en mesure ambulatoire (Mapa) chez différents types de patients. Elles étaient largement significatives et retrouvées dans une méta analyse. Des cathéters de dénervation par ultrasons ultrafocalisés ou par radiofréquence ont été utilisés pour réaliser une ablation des fibres nerveuses efférentes et afférentes du système nerveux sympathique cheminant dans l’adventice des artères rénales. Des groupes de patients ne prenant aucun traitement anti-hypertenseur ont également été inclus. Les résultats ont montré de façon concordante une baisse de la Mapa systolique de l'ordre de 8 à 10 mm de mercure. Ces études dites « OFF medication » ont fait la preuve de concept. Le deuxième type d’études dites « ON medication » ont évalué l’efficacité de la dénervation rénale en association au traitement médicamenteux habituel sur la baisse de la PA. Elles ont montré aussi une baisse cliniquement pertinente de la PA en Mapa et clinique, aussi bien dans le cas des HTA non contrôlées avec deux médicaments antihypertenseurs mais aussi dans les formes les plus graves, i.e. résistantes à plus de 3 traitements antihypertenseurs et ce, avec un effet persistant jusqu'à 36 mois. La conclusion reprise par l'ensemble des experts du domaine mais également dans un nouveau consensus de l’ESH (2021) est que la dénervation rénale peut aujourd’hui entrer parmi les alternatives thérapeutiques pouvant être proposées en association au traitement antihypertenseur pour améliorer le contrôle tensionnel en particulier chez les patients ayant une HTA difficile à contrôler.   Le Pr Michel Azizi déclare participer ou avoir participé à des interventions ponctuelles pour : Recor, Novartis, Idorsia, Alnylam, Medtronic, Poxel  

Les hypotenseurs sont-ils plus efficaces le matin ou le soir ?

Un débat a porté sur la question de savoir s’il fallait donner les traitements hypotenseurs le matin ou le soir. Une publication dans l’European Heart Journal avait montré que, dans le groupe où tous les traitements étaient administrés le soir, les hypotenseurs apportaient une protection cardiovasculaire nettement meilleure que dans le groupe ayant une prise matinale. « Mais dans l'analyse présentée lors du congrès, il a été démontré que ces données étaient très controversées. En effet, une majorité d’études ne montrent pas de différence. La conclusion générale était qu’à ce jour, il n’existe pas d'arguments clairs pour recommander une prise nocturne plutôt qu’une matinale et qu’il convient surtout d’améliorer l’observance en favorisant le dialogue avec le patient pour définir le moment de la prise des médicaments lui convenant le mieux », indique le Pr Van de Borne.

D’après un entretien avec Pr Philippe Van de Borne (Hôpital Érasme, Bruxelles).

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