Le prédiabète, comme le diabète avéré, répond à plusieurs mécanismes physiopathologiques et il est donc logique de penser qu’adapter le type de traitement au type physiopathologique de prédiabète, en donnant des médicaments plutôt actifs sur l’insulinosécrétion ou plutôt des médicaments actifs sur l’insulinorésistance pourrait améliorer la survenue d’un diabète. C’est ce qu’a fait une équipe américaine ayant évalué si une approche thérapeutique basée sur la physiopathologie en vie réelle pouvait prévenir le développement d’un diabète de type 2 chez les sujets à haut risque. Ils ont donc fait une étude observationnelle rétrospective des sujets à risque de diabète de type 2 dans un centre de pratique clinique dans le Sud de la Californie. Les participants avaient, au début de l’étude, une hyperglycémie provoquée orale (HGPO) et on leur assignait une stratification du risque sur la base de la présence et de la sévérité de l’insulinorésistance, de l’altération de la fonction cellulaire β et de la glycémie (c’est-à-dire une glycémie à 1 h > 8.6 mmol/l au cours de l’HGPO). Le traitement était recommandé sur la base du risque : metformine, pioglitazone, agoniste du récepteur du GLP1 et recommandations hygiéno-diététiques pour les participants à haut risque de diabète et metformine, pioglitazone et règles hygiéno-diététiques pour les sujets à risque intermédiaire. Quant aux sujets qui refusaient un traitement pharmacologique, ils ne recevaient que des conseils hygiéno-diététiques. Les participants étaient suivis pendant 6 mois et l’HGPO était répétée à 6 mois puis tous les 2 ans. Le critère d’évaluation principal de l’analyse était l’incidence du diabète de type 2 en fonction des critères de l’ADA au cours de la période 2009-2016. 1 769 sujets à risque de diabète ont été identifiés, dont 747 (42 %) étaient à haut risque ou à risque intermédiaire. Ils ont reçu un traitement pharmacologique. Sur les 422 participants analysés, 28 (7 %) ont progressé vers un diabète de type 2 (7, soit 5 % des 141 participants qui avaient reçu de la metformine, de la pioglitazone et des règles hygiéno-diététiques), aucun (0%) des 81 qui avaient reçu de la metformine, de la pioglitazone, un agoniste du récepteur du GLP1 et des règles hygiéno-diététiques et 21 (11 %) des 200 qui n’avaient reçu que des conseils hygiéno-diététiques et cela après un suivi moyen de 32 mois. En comparaison des participants qui n’avaient reçu que des conseils hygiéno-diététiques, le hazard ratio ajusté pour la progression du diabète de type 2 était de 0.29 (0.11-0.78, p = 0.0009) chez les participants qui avaient reçu de la metformine et de la pioglitazone et 0.12 (0.02-0.94, p = 0.04) chez les participants qui avaient reçu de la metformine, de la pioglitazone et un agoniste du récepteur du GLP1. L’amélioration de la fonction β cellulaire était le prédicteur le plus fort de prévention du diabète de type 2. En conclusion, il est peut-être nécessaire de revoir l’approche des sujets ayant un prédiabète sur la base de la physiopathologie de la maladie et ne pas se concentrer que sur la glycémie à jeun et l’hémoglobine glyquée. Cette étude montre l’hétérogénéité de la population des sujets prédiabétiques et l’efficacité d’une intervention précoce basée sur une approche personnalisée. Ces résultats nécessitent une confirmation dans d’autres populations et chez des patients ayant d’autres déterminants de santé et socio-économiques. Tout cela doit être contrebalancé par les risques des médicaments, en particulier en fonction des comorbidités du patient ainsi que du coût de ces médicaments. Cependant, cela montre qu’en vie réelle la progression du diabète de type 2 chez des sujets à haut risque de diabète peut être nettement réduite par des médicaments agissant directement sur des perturbations physiopathologiques, l’altération de l’insulinosécrétion et l’insulinorésistance.
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