[Mise à jour le 28/03]
Alors que le plafonnement des rémunérations des médecins intérimaires doit entrer en application le 3 avril prochain, plusieurs syndicats* ont mené une enquête auprès de ces praticiens "afin de mieux connaître leurs conditions d’exercice et leurs motivations". Objectif avancé : identifier les "facteurs qui pourraient les faire revenir à une carrière hospitalière" alors que l’hôpital est "à l’agonie".
Les résultats de cette enquête ont été diffusés vendredi 24 mars, avant, donc, l'annonce faite ce lundi par François Braun d'une revalorisation de 20% du plafond de rémunération, passant de 1170 euros brut pour 24h à 1390 euros.
800 praticiens remplaçants et intérimaires – pour l’essentiel urgentistes et anesthésistes-réanimateurs – ont répondu au questionnaire des syndicats. Une large majorité d’entre eux (82%) sont d’anciens médecins hospitaliers ayant fait le choix de quitter leur poste fixe pour gagner en liberté d’emploi du temps (76%), en maîtrise du temps de travail (77%), et en gains financiers (68%).
"D’autres ont fait le choix de l’intérim plutôt que d’exercer à temps plein et/ou faire du temps de travail additionnel dans son propre établissement : cherchez l’erreur !", notent les syndicats dans un communiqué de presse détaillant les résultats de l’enquête.
Alors que le Syndicat national des médecins remplaçants des hôpitaux (SNMRH) a estimé à au moins 70 le nombre d’établissements de santé menacés de fermeture du fait de la mise en application de la loi Rist, l’enquête intersyndicale montre que plus de la moitié des médecins intérimaires seraient prêts à revenir à l’hôpital à un poste de PH. Mais sous conditions…
D'après les résultats, 50,5% réclament un décompte précis du temps de travail, 52,2% "un dimensionnement adéquat de l’équipe", ou encore 49,2% une gouvernance plus démocratique. 35,7% des répondants seraient prêts à prendre un poste à l’hôpital s’il y avait une restitution immédiate des quatre années d’ancienneté pour les praticiens nommés avant octobre 2020.
Toutefois, les perspectives semblent peu favorables à un retour de ces personnels vers les hôpitaux. Ces derniers redoutant peut-être que... leurs conditions ne soient pas garanties ? Seuls 16,7% des répondants se projettent dans un poste fixe à l’hôpital, 12,4% pour un poste dans un établissement privé non lucratif, et 23% pensent à s’installer dans le privé lucratif. 27,5% se voient encore faire de l’intérim dans le futur. Mais, enseignement inquiétant, 20,4% envisagent de changer de métier.
Estimant que l’intérim médical est "indispensable à la flexibilité dans tous les métiers, et particulièrement indispensable aujourd'hui à la survie de certaines structures", les syndicats craignent que l’application de la loi Rist ne provoque "une nouvelle dégradation des soins", même s’ils conviennent que "le choix de ce mode d’exercice 'à vie' doit interroger".
Afin de "passer le cap du 1er avril sereinement" et de "ne pas asphyxier certains territoires", les syndicats appellaient vendredi à "relever le plafond [1 170 euros pour 24 heures] de l’intérim à un niveau jugé acceptable par les médecins intérimaires". Chose faite hier par le ministre de la Santé. Mais dans un tweet diffusé ce mardi matin, le Syndicat national des médecins remplaçants des hôpitaux (SNMRH) a dit refuser toute "négociation" et a réclamé "l'abrogation" pure et simple de la loi Rist.
Interrogés en amont dans le cadre de l'enquête, près de 60% des praticiens intérimaires et remplaçants ont jugé acceptable un forfait unique net pour tous les remplaçants de 650 euros par jour + 650 euros par nuit de garde".
Les syndicats ont demandé en parallèle de revaloriser "en miroir" les rémunérations des praticiens restés sur des postes fixes, avec "un reclassement immédiat de tous les praticiens hospitaliers nommés avant 2020 dans la nouvelle grille avec restitution des 4 ans d’ancienneté". Mais aussi une "reconnaissance de la permanence des soins" : une rémunération des gardes à 600 euros, un plafonnement de l’astreinte à 400 euros, un temps de travail additionnel à partir de 40 heures hebdomadaires, indemnisé 650 euros net pour deux plages de cinq heures, etc.
L’enquête intersyndicale s’est intéressée aux modes de recrutement des médecins intérimaires ou remplaçants. Moins de 15% sont exclusivement recrutés par des agences d’intérim, alors que 43% sont exclusivement recrutés de gré à gré, c’est-à-dire au cas par cas. 42% des praticiens ayant répondu aux syndicats utilisent ces deux modes de recrutement. Face à ce constat, l’intersyndicale avance que le coût de l’intérim en France est donc "bien supérieur aux estimations" basées sur l’activité de ces entreprises. "Le montant annoncé de 2 à 3 milliards d’euros pourrait être ainsi à multiplié par trois, soit 6 à 9 milliards par an", écrivent conjointement les syndicats pour qui, il ne s’agit "probablement pas de mercenariat – ou alors en très faible proportion".
*Le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi aux autres spécialités (SNPHARE), Samu Urgences de France, le Syndicat national des pédiatres des établissements hospitaliers (SNPeH), Action Praticiens Hôpital, Jeunes Médecins, le Syndicat national des jeunes anesthésistes-réanimateurs (SNJAR), l’Association des médecins urgentistes de France (Amuf), le Collectif santé en danger, et le Syndicat national des médecins remplaçants hospitaliers.
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