Si la chirurgie est réservée à une fraction des patients présentant une tendinopathie ou une arthrose de l’épaule, elle a bénéficié d’importantes évolutions. Le niveau de preuve des nouveaux traitements médicamenteux reste encore insuffisant. S’il ne s’agit pas de nouveautés à proprement parler, la question de la pertinence des examens diagnostiques des tendinopathies reste importante. "Il faut passer du temps à l’interrogatoire pour identifier les conditions d’apparition de la douleur devant une potentielle tendinopathie - aiguë, traumatique, chronique, aiguë sur chronique- et son retentissement sur la fonction de l’épaule (douleur, mobilité, fonction, force), sur la vie quotidienne, les loisirs, le sommeil ou l’utilisation de la main" a insisté le Pr Thierry Thomas (rhumatologue au CHU de Saint-Etienne). "L’examen clinique doit aussi être rigoureux, que ce soit dans l’évaluation de l’amplitude articulaire, et notamment la mobilisation passive", permettant notamment d’écarter une rétractation capsulaire en cas d’enraidissement de l’épaule en position allongée, "ou que ce soit en testant le réflexe ostéotendineux et en écartant les douleurs ligamentaires". La radiographie standard est l’examen d’imagerie de première intention, et l’échographie proposée en cas de doute diagnostique, l’IRM n’étant nécessaire que lorsque le diagnostic est incertain, le traitement inefficace ou si une chirurgie est envisagée. Une fois posé le diagnostic de tendinopathies de la coiffe des rotateurs, la prise en charge conventionnelle a peu évolué : mise au repos d’au moins 6 semaines, traitement par antalgique ou par AINS. Car après échec à 4 semaines, le niveau de preuve des nouvelles options reste insuffisant : les infiltrations de plasma riche en plaquettes (PRP) est envisagée, mais les produits et protocoles testés sont trop hétérogènes d’une étude à l’autre pour conclure à leur sujet. On continue donc à proposer le plus souvent une ou deux infiltrations de corticoïdes, l’intérêt d’infiltrations supplémentaires étant négligeable. Quant à la kinésithérapie, "si elle n’est pas indispensable à la guérison, elle peut néanmoins être proposée à condition que les exercices soient spécifiques" a précisé le Dr Eric Noël, rhumatologue à Lyon. Une rupture de la coiffe des rotateurs peut être suspectée face à l’apparition aiguë ou post-traumatique de la douleur, mais aussi quand la tendinopathie correctement prise en charge, est associée à une douleur qui persiste au-delà de 6 mois. Le conflit sous-acromial n’est généralement plus considéré comme une cause directe de ruptures par frottement, la majorité d’entre elles étant décrite comme multifactorielle. Place de la chirurgie Aujourd’hui les réparations de rupture de la coiffe se réalisent quasiment toutes sous arthroscopie après anesthésie locorégionale et en ambulatoire. Le suivi à 5 ans d’une cohorte multicentrique établie par le Groupe Rhumatologique français de l’Epaule (Grep) permet de préciser les personnes éligibles : car la majorité des personnes de plus de 50 ans ayant une rupture de la coiffe ont une évolution fonctionnelle globalement favorable sans chirurgie, les deux tiers ayant des lésions tendineuses stables et 7 sur 10 n’ayant pas de nouveau tendon atteint. "Ce sont donc les 16 % qui se sont dégradés cliniquement après 2 ans, le plus souvent au cours des 6 premiers mois, et qui ont plus souvent un nombre de tendons atteints initialement élevé, qui peuvent en tirer bénéfice" a résumé le Dr Philippe Collin chirurgien orthopédiste à Paris. Viennent ensuite les critères de douleurs et d’âge : "les douleurs d’emblée chez les moins de 65 ans, et celles persistants après les traitements médicaux chez les sujets plus âgés, même au-delà de 70 ans, sont éligibles à la chirurgie". Si aucune n’est véritablement urgente, la notion de fenêtre d’opportunité est importante : l’infiltration graisseuse du muscle, progressive et inexorable (73% à 5 ans dans le PHRC), constitue un facteur pronostique défavorable pour le succès chirurgical. Si elle est d’emblée élevée, l’opération sera écartée. Omarthrose : des traitements orthobiologiques à la traîne Au-delà du traitement "conservateur" classique (antalgiques, AINS, rééducation), on continue de préconiser des infiltrations de corticoïdes pour les douleurs fortes ou inflammatoires, "l’acide hyaluronique quand la douleur est plus volontiers liée à l’activité ou à la limitation de l’endurance articulaire", malgré un faible niveau de preuve, a expliqué Eric Noël. Ici aussi, peu d’études disponibles sont valables concernant le recours aux traitements orthobiologiques, que ce soit l’infiltration de PRP ou de cellules souches. Il n’en reste pas moins que "leur utilisation, et notamment celle des PRP, tend à se développer, par extrapolation des données plus nombreuses obtenues dans la gonarthrose" a reconnu le Pr Philippe Goupille Rhumatologue au CHRU de Tours. Lorsque la chirurgie devient nécessaire, deux options prothétiques sont possibles : la prothèse totale anatomique ou la prothèse totale inversée. Depuis les années 2010, le recours à cette dernière a explosé car "elle limite le risque de descellement lié aux premières, elle simplifie l’articulation avec un seul centre de rotation, et elle offre aux patients une fonction qu’aucune autre ne peut leur apporter" a résumé le Dr Luc Favard chirurgien orthopédiste à Tours. Cette invention française a désormais toute sa place dans des pathologies arthrosiques comme les omarthroses centrées, mais aussi non arthrosiques comme les ruptures massives de coiffe, les fractures hautes de l’humérus, et toutes les réopérations par changement de prothèses. Et grâce à la planification logicielle préopératoire intégrant des paramètres locaux (inclinaison, version, …), l’état de la coiffe ou encore l’infiltration graisseuse, les chirurgiens peuvent en améliorer le taux de succès.
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