Indus du Dipa : le Conseil d'Etat va devoir trancher sur la "légalité" des textes fondateurs

12/03/2024 Par Aveline Marques
Faits divers / Justice
Suite au litige opposant un médecin généraliste à la CPAM de Meurthe-et-Moselle, le tribunal administratif de Nancy a transmis la question de la légalité des textes portant sur le dispositif d'indemnisation de la perte d'activité (Dipa) liée au Covid au Conseil d'Etat. Pour la CSMF, ce rebondissement pourrait avoir des "conséquences très importantes sur tous les indus en cours de contestation". 

 

Mise à jour du 13/03, 12h30 : ajout du dernier paragraphe

 

2 654 euros. C'est le "trop perçu" que réclame la CPAM de Meurthe-et-Moselle à un généraliste bénéficiaire du Dipa en 2020. Comme de nombreux praticiens libéraux partout en France, le médecin a contesté cet indu, qui lui a été notifié en septembre 2021, devant la commission de recours amiable avant de porter l'affaire en justice. D'après la décision rendue le 28 décembre dernier par le tribunal judiciaire de Nancy, qu'Egora a pu consulter, le généraliste soulève "l'illégalité" de l'ordonnance du 2 mai 2020 qui a institué le Dipa, ainsi que du décret du 30 décembre 2020 qui a précisé son mode de calcul… des mois après le versement des acomptes.  

Il considère que l'ordonnance constitue "une rupture d'égalité" entre les médecins libéraux et les établissements de santé : le Dipa des premiers ne vise qu'à compenser "partiellement les charges" qui ont continué à tomber durant le confinement, tandis que la "garantie de financement" mise en place pour les seconds couvrait également les "pertes de recettes".  

Quant au décret arrivé tardivement, il serait non seulement non conforme à l'ordonnance ayant permis le versement de l'avance, car il ne prend finalement pas en compte les rémunérations forfaitaires dans le calcul du revenu de référence (2019) et non conforme "au principe général du droit de sécurité juridique". Et cela, en raison des modalités de calcul qui ont abouti "en définitive à une aide moins importante que celle que laissait espérer l'ordonnance", du "délai écoulé" entre l'octroi de l'avance et le calcul définitif, et de "l'espérance déçue d'une aide dont les modalités de calcul n'étaient pas prévisibles". 

 

Décisions en sursis en attendant l'avis du Conseil d'Etat 

Ces "exceptions d'illégalité" justifient une question préjudicielle auprès du juge administratif, estime le plaignant. Dans sa décision, la section contentieux de la sécurité sociale du tribunal judiciaire de Nancy a sursis à statuer le litige opposant le médecin à la CPAM et a saisi le tribunal administratif, comme le réclamait le médecin. Le 6 février 2024, le juge administratif a rendu une ordonnance, saisissant à son tour le Conseil d'Etat, seul compétent pour statuer "en premier et en dernier ressort" sur la légalité des textes fondateurs du Dipa. 

Ces "dernières évolutions procédurales pourraient avoir des conséquences très importantes sur tous les indus en cours de contestation" au titre du Dipa, soulignent les Généralistes CSMF dans un flash info du 8 mars. "Ces deux décisions vont nous permettre, dans tous les contentieux actuellement en cours, de demander au tribunal le sursis de l’examen du dossier dans l’attente de l’avis du Conseil d’Etat". 

 

La FMF déjà sur le coup

De son côté, la FMF rappelle son "implication" depuis 2021 sur le dossier du Dipa et son rôle joué dans la décision du tribunal judiciaire de Privas (Ardèche) de solliciter le Conseil d'Etat, le 27 avril 2023, sur la question de la légalité du décret de mai 2020. Dans cette affaire, qui oppose une kiné et la CPAM lui réclamant 2093 euros d'indus, deux points d'illégalité ont été soulevés : le fait que l'ordonnance prévoit d'indemniser les professionnels à compter du 12 mars 2020 contre le 16 mars pour le décret et surtout, le fait que les deux méthodes de calcul de valeur différent pour les deux périodes. Les revenus de la période de référence 2019 sont en effet obtenus par proratisation, tandis que ceux de 2020 sont calculés au réél, "proratiser permettant à la Cnam de lisser les honoraires en tenant compte des périodes de congés et ainsi de les diminuer sur la période de référence pour moins indemniser les médecins de leur perte d’activité pendant la période de confinement", souligne le Dr Marcel Garrigou-Grandchamp, de la cellule juridique de la FMF. Le syndicat s'est associé à la décision du tribunal judiciaire de Privas de solliciter le Conseil d'Etat, dans un mémoire en intervention volontaire le 27 juillet 2023. Au total, 70 dossiers ont été déposés par le syndicat.

 

4 commentaires
12 débatteurs en ligne12 en ligne
Photo de profil de Marcel Garrigou-Grandchamp
7 points
Médecine générale
il y a 9 mois
Les médecins et leurs syndicats peuvent dire MERCI à la Cellule Juridique de la FMF qui les accompagne depuis le début: les arguments FMF datent de septembre 2021 et un grand nombre de médecins sont a
Photo de profil de Alain Franzetti
88 points
Médecine générale
il y a 9 mois
retraité en oct 2020 à 69ans...j'ai été harcelé par la CPAM (environ 10 lettres recommandées avec AR, menaces de saisie ) pendant mes trois premières années de retraite pour un indu de 1600 euro j'ai
Photo de profil de Doc Of The Bay
1,3 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 9 mois
Enfin une bonne nouvelle. Le remboursement de l'acompte, je ne l'ai toujours pas avalé. La façon dont tout cela s'était passé montrait le peu de cas que la CNAM faisait des médecins. Pardon ! Des effe
 
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