Hémorragie mortelle : prison et suspension requises contre l'interne de garde
Le 1er juin 2011, Jean-François Gasparik, souffrant de problèmes au foie, vient se faire opérer à l’hôpital Louise-Michel de Courcouronnes (Essonne). On lui pose un TIPS, une opération banale où les complications sont estimées à 1 %. Le patient, âgé de 64 ans, décédera le lendemain matin. Les experts ont estimé qu’au regard des fautes commises par l’hôpital, le sexagénaire avait perdu 70 % de chances de survie. Ce lundi 7 février, Nadia, interne de garde au moment des faits, comparaissait devant le tribunal correctionnel d’Évry-Courcouronnes pour répondre d’une partie de ces fautes. Il lui est notamment reproché d’être intervenue trop tardivement. Le médecin anesthésiste était lui aussi mis en examen, mais il est décédé. Fuite Lors de l’opération, une "fuite" est repérée par le radiologue qui opère, mais n’est pas signalée. Ce dernier pense alors que cette fuite va être colmatée par la pose du TIPS, ce qui selon les experts est effectivement normal. Ce médecin a été entendu, mais n’a pas été poursuivi. Au final, c’est bien cette fuite qui aboutira à l’hémorragie ayant causé la mort du patient quelques heures plus tard. Le patient est ensuite placé en salle de réveil. Mais le médecin anesthésiste de garde le transfère assez rapidement au sein du service de gastro-entérologie. Une faute selon les experts. Car ce patient avait de nombreux antécédents et aurait dû bénéficier d’une surveillance plus poussée, d’autant que sa tension est basse, relate Le Parisien.
A 23h, il est vu par une infirmière du service de gastro-entérologie. "Sa tension était à 8, raconte-t-elle à la barre. J’ai appelé l’interne de garde sur son bip mais elle ne répondait pas. J’ai continué mon tour", soit une quinzaine de patients à voir. "Je l’ai rappelée, je ne l’ai pas eu. Je suis ensuite passé par le standard qui a réussi à la joindre. Elle m’a dit de lui administrer du Voluven afin de lui faire remonter la tension, mais elle n’est pas venue. La tension n’est pas remontée, je l’ai donc rappelée, mais elle ne montait toujours pas." À ce moment, l’infirmière se dit très inquiète car le patient se plaint également de douleurs à la poitrine. Elle dit appeler la gastro-entérologue qui suit le patient depuis deux ans, bien que cette dernière ne travaille pas. Il est environ 3 heures du matin. "Elle me dit de faire une num. En attendant, l’interne monte et me dit de faire un électrocardiogramme." Hémorragie interne "Je ne sais pas pourquoi l’infirmière n’a pas pu me joindre sur mon bip, assure Nadia. Quand on m’a appelée via le standard, je suis montée voir le patient. J’ai regardé son dossier médical. Je tiens à dire que du haut de mon expérience à l’époque, j’ai eu peur. Je n’avais pas assez de recul pour prendre en charge un tel patient. J’ai appelé mon chef. Il m’a dit de rester sur place. J’ai demandé de lui passer du Voluven pour remonter la tension. Puis j’ai demandé un ECG et une numération formule sanguine. Le résultat est vite revenu du labo." Les résultats indiquent une hémorragie interne. "Là, j’ai demandé à l’infirmière de commander des culots globulaires et d’appeler la gastro-entérologue d’astreinte et j’ai appelé le réanimateur de garde." Dans la foulée, le sexagénaire, conscient, est transféré en réanimation, mais il est déjà trop tard. Il y décédera peu après. Pour le procureur, le comportement de l’interne, les "problèmes pour la joindre", son "délai d’intervention", "a considérablement réduit les chances de survie" de la victime. Il a requis une peine de 18 mois de prison avec sursis et deux ans d’interdiction d’exercer contre celle qui est depuis devenue médecin généraliste. Bouc émissaire "Elle est une jeune interne qui hérite d’un patient sur qui des fautes ont été commises. Où est passé le radiologue qui constate une fuite qui va se réparer toute seule, a plaidé l'avocat de l'interne Me Jacques Bourdais. Ce saignement que personne ne signale, c’est la faute initiale. Puis, il y a l’anesthésiste qui laisse partir son patient. Et on prend pour argent comptant la déclaration des infirmières. Vous n’avez rien pour départager les deux parties, mais il faut un bouc émissaire !" Le jugement a été mis en délibéré au 21 mars. [Avec leparisien.fr]
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