Selon les résultats d’une étude qui vient d’être publiée dans The Lancet Public Health, l’intoxication au plomb à bas bruit représenterait un enjeu sanitaire et environnemental majeur aux Etats-Unis, bien supérieur à ce que l’on imaginait jusqu’à présent.
Selon les auteurs, en effet, plus d'une mort sur six dans ce pays peut être reliée à l'exposition au plomb. "Nos conclusions suggèrent que, sur les 2,3 millions de morts chaque année aux États-Unis, environ 400 000 peuvent être attribuées à l'exposition au plomb, une estimation dix fois plus élevée que l'actuelle", écrivent les auteurs. Le chiffre, "étonnamment élevé", est "comparable au nombre de morts dues aujourd'hui à l'exposition à la fumée du tabac", ajoutent-ils. Cette estimation est issue de l’analyse de 14 289 sujets appartenant à la 3ème National Health and Nutrition Examination Survey (Nhanes-III). Ils ont été suivis pendant près d'une vingtaine d'années en moyenne, entre 1990 et 2011. La plombémie moyenne a été calculé à 2,71 µg/dL. 20% des participants avaient une concentration sanguine en plomb supérieure ou égale à 5 µg/dL. Les chercheurs ont calculé que les sujets ayant la plombémie la plus élevée (au moins 6,7 mg par décilitre, 90ème percentile), présentaient une augmentation de 37% du risque de décès de toutes causes, par rapport à ceux ayant la plus faible concentration sanguine. Le risque cardiovasculaire était particulièrement important avec un doublement du risque de décès lié à une maladie cardiaque ischémique, et une augmentation de 70% du risque de décès cardiovasculaire en général. Les auteurs ont aussi estimé que la part de l’ensemble des décès attribuable au plomb serait de 18%, ce qui équivaut à 412 000 décès annuels aux Etats-Unis. Et concernant la mortalité cardiovasculaire, cette proportion s’élèverait, selon les auteurs, à 28,7%, et même 37,4% pour la mortalité spécifiquement liée à une maladie ischémique. "Des niveaux faibles d'exposition au plomb sont un facteur de risque important, mais largement ignoré, de mort par maladie cardiovasculaire", souligne l'un des auteurs, Bruce Lanphear de l'université canadienne Simon Fraser. L'étude remet en question "l'idée qu'il y a des 'niveaux sûrs' de toxiques spécifiques, comme le plomb", dit-il, cité dans un communiqué de la revue. Le plomb est un métal abondant naturellement, qui trouve de multiples usages dans l'industrie. Il est connu comme toxique depuis très longtemps, provoquant le saturnisme et favorisant d'autres affections. L'exposition vient traditionnellement des carburants, des peintures, de la plomberie, voire de l'alimentation, ainsi que des rejets de l'industrie (fonderies, unités de recyclage). Ces dernières décennies, la législation a réduit les émissions polluantes, aux États-Unis et ailleurs. D'après un épidémiologiste cité par The Lancet Public Health, Philip Landrigan, l'étude "suggère qu'il est temps d'arrêter de négliger le rôle de la pollution dans la mortalité par maladie non contagieuse". "Cette étude montre une forte association entre la plombémie dans le sang et le risque future d'attaque cardiaque et de mort", commente un professeur de cardiologie de l'université de Sheffield (Grande-Bretagne), cité par Science Media Centre. Même si "elle ne peut pas prouver que le plomb est directement la cause de la maladie".
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