Dysphorie de genre chez les mineurs : le Sénat vote l'encadrement des pratiques médicales
Le Sénat, à majorité de droite, a adopté une proposition de loi controversée "visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre", dans la nuit de mardi à mercredi.
180 voix pour contre 136. Le Sénat a adopté, dans la nuit du mardi 28 au mercredi 29 mai, la proposition de loi déposée par le groupe Les Républicains (LR) "visant à encadrer les pratiques médicales mises en œuvre dans la prise en charge des mineurs en questionnement de genre". Le texte a été soutenu par l'ensemble du groupe LR, une partie des élus centristes et trois sénateurs du Rassemblement national.
Le texte adopté par les sénateurs contient quatre articles. Le premier prévoit d'interdire, pour les mineurs, la prescription des "traitements hormonaux tendant à développer les caractéristiques sexuelles secondaires du genre auquel le mineur s'identifie", ainsi que les "opérations chirurgicales de réassignation sexuelle".
La proposition de loi (PPL) stipule qu'un professionnel de santé qui méconnaîtrait cette interdiction s'expose à "une peine de deux ans d'emprisonnement" et à 30 000 euros d'amende, ainsi qu'à "une peine complémentaire d'interdiction d'exercer pendant dix ans ou plus". Le Sénat a également souhaité confier le diagnostic et la prise en charge des mineurs présentant une dysphorie de genre à des "centres de référence spécialisés", listés par arrêté.
Une prescription encadrée des bloqueurs de puberté
Le texte d'origine prévoyait également d'interdire la prescription de bloqueurs de puberté. Cela a été supprimé. Mais le Sénat a voulu réserver la prescription initiale de ce traitement aux médecins exerçant dans les centres de référence. "Cette prescription initiale n'est possible qu'après évaluation par l'équipe médicale de l'absence de contre-indication et de la capacité de discernement du mineur", et "un délai minimal de deux ans sépare la prescription initiale de la première consultation du patient dans un centre de référence", précise le texte, remanié par le Sénat. Devront participer aux réunions de concertation pluridisciplinaire a minima un endocrinologue, un pédiatre et un pédopsychiatre, auxquels pourront se greffer un psychologue, une assistante sociale…
Enfin, la proposition de loi, qui a été transmise à l'Assemblée nationale, entend mettre en place une stratégie nationale pour la pédopsychiatrie, qui serait "révisée tous les cinq ans". Objectif : "que tout enfant ou adolescent bénéficie, dans les meilleurs délais, des moyens lui permettant de retrouver un état de bien-être psychique contribuant à l'épanouissement de son développement, et des soins en santé mentale nécessaires".
Cette stratégie inclurait un volet relatif à la formation des soignants, à la prise en charge des problématiques de santé mentale des mineurs, ainsi qu'un volet relatif à la revalorisation des conditions d'exercice de la pédopsychiatrie.
Le texte a été largement considéré comme "transphobe" par les élus de gauche, à l'instar des associations. Une motion de rejet du texte a été déposée mais n'a finalement pas été adoptée. "Ce texte n’est ni un texte transphobe, ni une volonté de psychiatriser la transidentité, ni une atteinte aux droits de l’enfant", a assuré Jacqueline Eustache-Brinio, sénatrice LR à l'origine de la PPL.
De son côté, le ministre délégué à la Santé, Frédéric Valletoux, s'est dit "contre" cette proposition de loi,, estimant que "très peu de mineurs sont en réalité concernés par les transitions médicales". "Tout ce que j'ai entendu m'a confirmé que nous étions dans une approche dogmatique et subjective", a-t-il écrit sur son compte X, ce mercredi. Et d'ajouter : "Sur les sujets médicaux, je ne ferai jamais primer la décision politique sans qu'elle soit éclairée par le débat scientifique."
Le Gouvernement est contre cette proposition de loi.
Tout ce que j’ai entendu m’a confirmé que nous étions dans une approche dogmatique et subjective. Sur les sujets médicaux, je ne ferai jamais primer la décision politique sans qu’elle soit éclairée par le débat scientifique. https://t.co/kjwOE2Y3eJ— Frédéric Valletoux (@fredvalletoux) May 29, 2024
La HAS doit présenter dans les prochains mois ses recommandations sur la prise en charge des personnes transgenres de 16 ans et plus.
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