L’Ordre peut suspendre un médecin s’il ne possède plus les connaissances théoriques et pratiques nécessaires au bon exercice de sa spécialité, et en cas d’état pathologique rendant dangereux la poursuite de son exercice. L’article R4124-3-5 du Code de la santé publique stipule « qu’en cas d’insuffisance professionnelle rendant dangereux l’exercice de la profession, la suspension temporaire, totale ou partielle, du droit d’exercer est prononcée par le Conseil régional ou interrégional pour une période déterminée, qui peut, s’il y a lieu, être renouvelée ». Une procédure de suspension temporaire du droit d’exercer pour infirmité ou état pathologique est aussi prévue par l’article R4124-3 du Code de la santé publique. Les conditions de saisine pour chacune de ces procédures font souvent suite à des signalements de patients, de confrères ou de l’entourage du médecin. Si une mesure de suspension est ordonnée, elle fera suite au dépôt d’un rapport d’expertise établi à la demande de l’Ordre par trois médecins désignés comme experts, le premier par le médecin mis en cause, le deuxième par l’Ordre et le troisième par les deux premiers experts. Même si les motifs sont différents, ces deux procédures peuvent se rejoindre en ce qu’elles tendent à identifier des connaissances théoriques et pratiques insuffisantes ou encore des addictions, des troubles du comportement. Si les médecins concernés doivent pouvoir être protégés et soignés, leurs patients doivent aussi être préservés s’ils n’ont plus les facultés physiques, mentales ou intellectuelles, pour continuer à les soigner correctement. Dans un arrêt du 15 juin 2022, le Conseil d’Etat a ainsi donné raison à l’Ordre qui avait suspendu un médecin généraliste du fait de sa dangerosité. Ce médecin, âgé de plus de 80 ans, souffrait de troubles sensitifs importants et d’un état de santé physique très dégradé empêchant la régularité et la disponibilité nécessaires à un médecin. Pour le Conseil d’Etat, le Conseil national de l’Ordre a suffisamment motivé sa décision, qui s’appuyait sur un rapport de trois experts, en prononçant une mesure de suspension d’une durée de trois ans. Si un médecin, comme n’importe quel autre individu, n’est pas à l’abri d’une défaillance physique ou intellectuelle liée à l’âge, sa responsabilité professionnelle envers ses patients doit l’obliger à prendre les bonnes décisions et donc à s’arrêter s’il n’est plus en capacité de donner des soins consciencieux, attentifs, conformes aux données acquises et actualisées de la Science. Une décision compliquée, difficile à envisager et à prendre, que l’entourage du médecin doit aussi préparer pour que cette fin d’activité professionnelle soit vécue comme une fin normale. Un accompagnement de certains médecins, confrontés à cet arrêt d’activité parfois brutal, après toute une vie professionnelle consacrée aux autres, doit être envisagé.
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