Les professionnels de santé font le constat alarmant d’une augmentation des pénuries de médicaments contre le cancer. Face à cette situation jugée « indigne », la Ligue contre le cancer se mobilise à travers une campagne et un site internet. Une enquête, menée par l’association et l’institut Ipsos, montre l’ampleur du problème. Il en ressort en effet que 74% des professionnels interrogés ont déjà été confrontés à des pénuries de médicaments utilisés contre le cancer pendant leur carrière. Mais surtout, la très grande majorité (3 praticiens sur 4) ont le sentiment que ces pénuries s’aggravent depuis 10 ans. C’est le cas de 6 oncologues médicaux sur 10, mais aussi de 95% des pharmaciens hospitaliers. Tous s’accordent pour constater l’impact majeur de ces manques de traitement sur les patients. En effet, 3 professionnels soignants sur 4 considèrent que les pénuries de médicaments utilisés contre le cancer entraînent une perte de chances pour les malades. Plus encore, 45% des professionnels interrogés font le constat d’une détérioration de la survie à 5 ans chez ces patients ; un pourcentage qui monte même à 68% parmi les oncologues concernés. « C’est un combat de longue date de la Ligue contre le cancer. Les pénuries de médicaments utilisés dans les traitements des cancers sont un fléau silencieux qui s’aggrave d’année en année et que le contexte de la Covid-19 ne fait que renforcer. Au-delà même du manque de certains médicaments, l’insuffisance d’information, de transparence, les sentiments d’inquiétude et de colère des personnes malades, leur perte de confiance sont autant de conséquences délétères pour elles mais aussi de difficultés pour les professionnels de santé » explique Axel Kahn, Président de la Ligue contre le cancer. « Dans son rôle de lanceur d’alerte, la Ligue souhaite mobiliser le plus grand nombre face à cette situation : pouvoirs publics, personnes malades (concernées ou non par les pénuries), familles, etc. Il est urgent de trouver des solutions pérennes à ce problème d’ampleur, qui s’est installé dans la durée. »
Des traitements d’importance majeure Tous les cancers sont concernés, y compris pédiatriques. « Il y a une quarantaine de médicaments d'importance majeure en oncologie qui ont fait l'objet de pénurie » au fil des années, a rapporté à l'AFP le Pr Axel Kahn. « Les premiers touchés sont toujours... les médicaments pas chers, les innovations thérapeutiques qui coûtent la peau des fesses, on n'en manque jamais », s'indigne le Pr Jean-Paul Vernant, hématologue engagé dans la bataille. C'est « un fléau silencieux qui s'aggrave d'année en année », qui a pu s'aggraver avec l'épidémie de Covid-19, mais « en aucun cas n'a été créé par la Covid », souligne Axel Kahn. Il s'agit « vraiment (d') un problème qui est lié à la structure économique du marché du médicament », et qui concerne des « médicaments indispensables », essentiellement des génériques, très peu chers. Pour des médicaments utilisés dans le cadre du traitement du cancer de la vessie (BCG intravésical, Amétycine...) difficultés, ruptures d'approvisionnement et arrêts de commercialisation ont sévi. « Dans un certain nombre de cas, certains cancers de la vessie qui étaient parfaitement tenus en respect par des instillations intravésicales ont dû, du fait de la pénurie de ces médicaments, faire l'objet d'une cystectomie totale (ablation de la vessie) » avec des conséquences qui bouleversent la vie des patients, rapporte Axel Kahn. « C'est un exemple particulièrement dramatique des conséquences possibles des pénuries de médicaments : des pertes des chances », ajoute le généticien.
Plus de transparence La Ligue propose plusieurs leviers d’actions concrets : le recensement par les pouvoirs publics, de façon systématique, des personnes qui n’ont pas eu accès au médicament prescrit en premier lieu ; la mise en place d’un système d’informations sur les pénuries de médicaments, à destination des professionnels de santé et particulièrement ceux exerçant en ville ; l’amélioration de l’information ; la mise en place d’études pour mesurer les pertes de chances causées par les pénuries. Elle souhaite en outre des dispositions réglementaires sur les pénuries et des sanctions financières en cas de non-respect de ces dernières. La Ligue contre le cancer lance un appel à témoins afin de donner la parole aux patients, premiers concernés par les pénuries à travers une plateforme ouverte à toutes : penuries.ligue-cancer.net. L’association mène aussi une vaste campagne de communication sur le thème : « Cher patient, pour votre médicament, merci de patienter.»
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