Pollution : un sujet « chaud » pour les pneumologues européens

15/10/2019 Par Marielle Ammouche
Pneumologie

Le 29e Congrès de la Société européenne des maladies respiratoires, qui s’est déroulé à Madrid du 28 septembre au 2 octobre 2019, est revenu sur des thèmes phares qui préoccupent les pneumologues comme la pollution, mais aussi a fait une large place à la thérapeutique. Dans le domaine de l’environnement, de nouvelles études ont été présentées accumulant ainsi les preuves d’une nocivité des particules fines dès la phase in utero. A côté de la lutte contre le tabac, du dépistage du cancer bronchique chez les sujets à risque, du développement de la réhabilitation pulmonaire, et de celui de la médecine digitale, la pollution atmosphérique est un des sujets « chauds », sur lesquels travaille la Société européenne des maladies respiratoires (ERS). La société savante « va faire pression sur les Pouvoirs publics pour tenter d’en limiter les impacts », a expliqué le Pr Thierry Troosters (Hôpital universitaire de Louvain, Belgique), nouveau président de l’ERS pour 2019-2020. Plusieurs études ont en tout cas confirmé que la pollution, même non atmosphérique, a un impact négatif sur la fonction pulmonaire des enfants.
La cohorte britannique Alspac, qui a suivi 13 963 enfants, depuis la phase in utero jusqu’à l’âge de 15 ans, suggère ainsi que l’exposition aux particules fines PM10  dès le premier trimestre de la grossesse,  réduit significativement la fonction respiratoire des enfants à l’âge de 8 ans, la diminution observée atteignant - 0,8 % pour tout accroissement de 1 mcg/m3 des PM10. « Ce qui correspond à une réduction faible mais néanmoins significative de respectivement 14 et 16 millilitres à 8 ans pour le volume expiratoire maximal par seconde (VEMS) et la capacité vitale forcée (CVF) », a signalé le Pr Anna Hansell (Université de Leicester, Royaume-Uni). « Les particules fines pourraient traverser le placenta et perturber le développement des poumons du fœtus en activant le stress oxydatif ou en induisant des phénomènes épigénétiques ». Reste que...

cette association néfaste n’était plus retrouvée à l’âge de 15 ans. On ne peut donc écarter l’hypothèse, favorable, « qu’avec la croissance pulmonaire, les effets délétères de la pollution puisent être compensés ».   Impact sur la mortalité des nourrissons Une autre étude épidémiologique britannique, entreprise sur près de 8 millions de naissances, survenues au Pays de Galles et en Angleterre entre 2001 et 2012, est plus inquiétante. Comme l’a expliqué le Dr Sarah Kotecha (Université de Cardiff, Royaume-Uni), elle conclut en effet que « trois polluants atmosphériques, en l’occurrence les particules fines PM10 et le dioxyde d’azote (NO2) liés à la circulation automobile, ainsi que le dioxyde de soufre (SO2) associé à l’activité industrielle, augmentent à des degrés variables la mortalité néonatale et post-néonatale ». Les auteurs ont passé au crible 35 000 zones comportant 1 500 habitants, ou 650 foyers environ, et examiné pour chacune d’entre elles la relation entre niveau de pollution atmosphérique annuelle et taux de décès. Dans les zones les plus polluées, après prise en compte de possibles facteurs de confusion comme le poids de naissance, l’âge maternel, ou le sexe de l’enfant, « la mortalité néonatale (0-28 jours) était significativement accrue de 21 % en cas d’importante exposition au SO2, et la mortalité post-néonatale (28 jours-1 an) a eté significativement augmentée de 15 %, 11 % et 12 % en cas de forte exposition au SO2, au NO2, et aux PM10 ». Le Pr Tobias Welte (Ecole universitaire de médecine de Hanovre, Allemagne), qui présidait jusqu’ici l’ERS, a expliqué que la société savante se préoccupe davantage aujourd’hui de la prévention chez les enfants, « une dégradation précoce de la fonction respiratoire pouvant avoir des conséquences négatives des décennies plus tard ». Ce pneumologue...

a admis s’attendre à « une explosion des maladies respiratoires en raison de la pollution dans les années qui viennent ». Effets des bisphénols sur la santé respiratoire Certaines substances comme les bisphénols, qui se comportent comme des perturbateurs endocriniens et sont retrouvés en fortes quantités dans les cannettes, récipients alimentaires, jouets semblent avoir également un effet délétère sur la fonction respiratoire des enfants.  Une étude entreprise par une jeune chercheuse, Alecia Abellan, à l’Institut global de la santé de Barcelone a mis en évidence une relation négative entre exposition au bisphénol A pendant la grossesse et survenue d’un wheezing ou d’un asthme chez les enfants de 6 à 10 ans (risque multiplié par respectivement 1,10 et 1,07 chez les enfants des femmes ayant présenté les plus fortes concentrations de bisphénol A durant la grossesse).  A noter que, 79 % des femmes enceintes présentaient dans leurs urines (1 ou 2 prélèvements effectués) du bisphénol A en quantité détectable. Ce qui n’est guère rassurant lorsque l’on sait que ce phénol est également suspecté d’accroître le risque d’infertilité et de cancer du sein. 

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