Il est bien décidé à se faire entendre des sénateurs. Le collectif "les étudiant.e.s en santé et leurs allié.e.s contre la fin de l'aide médicale d'Etat" manifestera ce lundi à 17h30 devant le Sénat pour protester contre une possible restriction de ce dispositif – dont bénéficient 400 000 étrangers en situation irrégulière présents depuis au moins 3 mois sur le sol français. Le Palais du Luxembourg doit démarrer ce jour l’examen en séance publique du controversé projet de loi immigration du Gouvernement.
La réforme de l’aide médicale d’Etat devrait enflammer les débats : elle n’était pas prévue dans le texte initial du Gouvernement – divisé sur le sujet, mais celui-ci a été modifié en commission des lois du Sénat et prévoit désormais de réduire le panier de soins de ce dispositif au "traitement des maladies graves et douleurs aiguës", aux "vaccinations réglementaires" et aux "soins liés à la grossesse". En somme, aux seuls soins urgents, juge le collectif d’étudiants en santé.
"L'aide médicale d'urgence que propose cet amendement ne permettra plus à nos patients en situation irrégulière d'accéder aux soins primaires de dépistage et prévention, aux consultations de médecine générale, et aux médicaments permettant de contrôler leurs maladies chroniques, et nous autorisera à les traiter gratuitement seulement lorsqu'ils seront contraints de subir des soins complexes et lourds", s’indignent ces étudiants, dont beaucoup seront bientôt amenés à prêter serment.
Ils dénoncent une proposition "absurde du point de vue de l'économie de la santé, de la santé publique, et contraire aux droits humains", uniquement motivée "par la haine idéologique de ses rédacteurs". "La fin de l'AME représente une dégradation brutale des conditions déontologique de notre exercice soignant futur, et la consolidation d'un paradigme dans lequel il faut soigner certains patients et en ignorer d'autres", s’insurge Félix Wolfram, externe et membre actif du collectif, dans un billet publié sur Mediapart.
"L'AME ‘de droit commun’" constitue "la meilleure prévention contre les décompensations aigües de problèmes de santé". "Pour éviter ces décompensations, une simple consultation en ville suffit dans la majorité des cas." Tandis que les défenseurs d’une réforme de l’AME évoquent "un appel d’air" ou encore "un tourisme médical", pour les étudiants en santé, ces arguments n’ont pas "la moindre valeur, puisque la dignité humaine est infiniment plus importante que n'importe quelle considération médico-économique". Réformer l’AME serait une "erreur funeste", selon Félix Wolfram.
Raisons pour lesquelles ils crieront cet après-midi "haut et fort" leur colère place Pierre Dux, devant le Sénat. Sont attendus, une centaine d’étudiants du collectif et leurs porte-paroles, plusieurs associations (Médecins du monde, le collectif pour une santé engagée et solidaire, etc.) et syndicats (notamment le syndicat des internes des Hôpitaux de Paris ou encore le syndicat des jeunes médecins généralistes). L’Intersyndicale nationale des internes (Isni) a dit, sur les réseaux sociaux, soutenir les manifestations, s’opposant elle aussi à la suppression de l’AME.
[Aide Médicale d’Etat]
— ISNI - InterSyndicale Nationale des Internes (@ISNItwit) November 6, 2023
L’ISNI s’oppose fermement à la suppression de l’AME et à la mise en place de nouvelles restrictions à son accès, et soutient les manifestations qui se dressent contre. pic.twitter.com/01TNYkrstA
Plusieurs élus ont par ailleurs apporté leur soutien au mouvement, dont Caroline Fiat (députée LFI), Hadrien Clouet (député LFI), Sandrine Rousseau (députée Les Ecologistes), Anne Souyris (sénatrice Les Ecologistes), et Ian Brossat (sénateur PCF).
Comme le collectif "les étudiant.e.s en santé et leurs allié.e.s contre la fin de l'aide médicale d'Etat", plus de 3 000 soignants se sont élevés contre une réforme de ce dispositif créé en 2000, réclamant un sursaut politique, dans une tribune publiée dans Le Monde.
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