Il écrit un livre, son directeur se reconnaît dans un personnage : un médecin se fait virer
Le 17 avril dernier, le Dr Denis Dupuy, chirurgien-urologue de la clinique Ambroise Paré à Toulouse (Haute-Garonne) a reçu chez lui une lettre mentionnant la fin de son contrat pour avril 2024. Exerçant depuis 18 ans dans l’établissement, il assure qu’"on ne lui a jamais fait de reproche sur son activité professionnelle". Selon lui, c’est pour une toute autre raison qu’il a reçu ce courrier. A côté de sa profession de médecin, le chirurgien-urologue est aussi écrivain. Dans son dernier ouvrage, intitulé "Bagatelles, ou combien j'emm... mes contemporains" publié en juillet 2023, il raconte l’histoire d’un “chirurgien dans une clinique de province” qui “se lamente des bouleversements au sein d’une société qui ne le séduit plus”, peut-on lire sur la quatrième de couverture. Dans une des scènes de ce livre, le médecin entre dans le bureau du directeur de la clinique et le surprend alors qu’il a une relation sexuelle avec un syndicaliste. Frédéric Pecqueux, le directeur de la clinique Ambroise Paré est convaincu que ce personnage est en réalité lui-même. Le Dr Dupuy reconnaît que cette partie est “trash” mais nie toute ressemblance avec son propre directeur. “Tout est fictif. Rien n’est réel, aucun personnage ne correspond à la réalité. Je l’ai dit, je l’ai écrit. Ce n’est pas de ma faute si le directeur se reconnaît dans ce personnage”, peste le Dr Dupuy. "Je dépeins une clinique caricaturale, corrompue, des dirigeants et des médecins frappadingues, bref, une farce et… il reconnaît sa personne et sa clinique", poursuit-il. "J'ai une activité impartiale en tant que médecin. Mes romans n'ont rien à voir avec ma profession", assure le chirurgien-urologue. Nos confrères de France 3 Occitanie ont pu se procurer le document adressé au Dr Dupuy, envoyé par l’avocat de la clinique Ambroise Paré. Il mentionne des vidéos YouTube qui reprennent le livre sous format audio. Le médecin "y tient des propos formulés en des termes non équivoques, qui excèdent les limites que le code de déontologie justifie d'apporter à la liberté d'expression et qui constituent par conséquent autant de manquements aux obligations déontologiques". Le courrier l’accuse également d’avoir "jeté l'opprobre et le discrédit sur l'établissement au sein duquel il exerce" et d'avoir tenu des "propos outrageants" à l'encontre de son directeur. Une réunion de conciliation a eu lieu, le 25 juillet dernier, après qu’une plainte a été déposée devant le Conseil départemental de l’Ordre des médecins de Haute-Garonne contre le chirurgien-urologue. Le président du Cdom a indiqué ne pas avoir d’avis sur cette affaire. “Ce médecin est sous contrat avec une clinique privée. Est-ce que les éléments du contrat ont été respectés ? Ce n'est pas à moi d'y répondre. Nous ne sommes pas en capacité de juger, ce n'est pas notre rôle", confie-t-il à nos confrères de France 3. L’affaire a été renvoyée au Conseil régional de l’Ordre des médecins d’Occitanie. Pour Frédéric Pecqueux, le roman n’est pas “l’élément déclencheur” de toute cette affaire. “Il y a un contexte général. Il y a eu un droit d'alerte du CSE. Il y a des procédures en cours, une plainte au pénal, une plainte au civil. La procédure est en cours, je ne peux pas vous en dire plus", explique-t-il. Selon Me Denis Benayoun, l’avocat de l'urologue, “on se situe dans une logique économique. Il est clair que la clinique veut se débarrasser d'un praticien. Ce n'est pas le seul d'ailleurs dans ce cas-là. Le livre n'est qu'un prétexte. Ils s'en sont servis, alors que cela relève de la fiction". Il promet d’attaquer l’établissement pour “rupture abusive de contrat” si la situation en reste là. [Avec France 3]
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