La Dépakine et les autres formes de ce médicament ont fait au moins 14.000 victimes, estiment l'épidémiologiste Catherine Hill et la présidente de l'association de victimes Apesac, Marine Martin, dans "Dépakine, le scandale sanitaire" (Ed Laffont), à paraître jeudi. Aucune estimation officielle exhaustive n'est encore disponible.
"On peut raisonnablement estimer que 14.000 personnes ont présenté des atteintes causées par l'exposition in utero au valproate de sodium", la molécule active de la Dépakine, conclut cette étude, qui figure en annexe du livre de la présidente de l'Apesac Marine Martin, "Dépakine, le scandale sanitaire" (éditions Robert Laffont). Ce médicament est commercialisé en France depuis 1967 pour le traitement de l'épilepsie (sous la marque Dépakine, de Sanofi, ainsi que sous des marques génériques), et depuis 1977 pour les troubles bipolaires (Dépakote et Dépamide).
Dangereux pour le foetus
Il est aujourd'hui sur la sellette en raison de sa dangerosité pour le fœtus lorsqu'il est pris par une femme enceinte. On estime qu'il y a un risque de l'ordre de 10% que l'enfant naisse avec des malformations physiques, ainsi qu'un risque de 30% à 40% d'atteintes neurologiques, se traduisant par des troubles autistiques, des retards intellectuels ou des difficultés de coordination. Les seuls chiffres officiels, publiés en août dernier par l'Agence du médicament (ANSM) et l'Assurance maladie (CNAM), font état de 14.322 femmes "exposées" au valproate de sodium pendant leur grossesse entre 2007 et 2014, qui ont donné naissance à 8.701 enfants vivants. La proportion de ces enfants atteints de troubles n'a pas été précisée. Auparavant, en février 2016, l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) avait évalué "entre 425 et 450" le nombre d'enfants nés avec des malformations entre 2006 et 2014 après une exposition in utero au valproate.
40% d'enfants atteints
Une nouvelle étude menée par la CNAM et l'ANSM doit évaluer le nombre d'enfants nés avec des malformations physiques après une exposition à un antiépileptique entre 2011 et 2014. Initialement annoncée pour "avant la fin de l'année" 2016, elle n'a toujours pas été rendue publique. Pour estimer le nombre total de victimes, Catherine Hill, épidémiologiste à l'institut Gustave-Roussy, s'est basée sur les données disponibles (ventes du médicament depuis 1983, nombre de grossesses et de naissances pour 2007-2014). Elle a ensuite extrapolé à l'ensemble de la période et retenu l'hypothèse d'"environ 40%" d'enfants atteints, "dans l'ignorance de la fréquence de l'association des deux types de problèmes" (physiques et neurodéveloppementaux). Dans une estimation précédente, moins détaillée, l'épidémiologiste avait évoqué "plus de 12.000" enfants nés avec des séquelles. L'estimation de 14.000 victimes est encore "prudente", a expliqué Catherine Hill à l'AFP, notamment parce qu'elle a fait l'hypothèse que le rapport entre le nombre de boîtes vendues et le nombre de grossesses exposées entre 1967 et 2006 était le même qu'en 2007. Or "il est possible qu'il y ait eu plus" de grossesses exposées, car les précautions à prendre étaient encore moins connues avant cette date. Plusieurs actions en justice ont été lancées par des familles de victimes ainsi que par l'Apesac, qui reprochent à Sanofi de ne pas avoir informé les femmes enceintes des risques encourus par leurs enfants, alors qu'ils étaient "connus depuis le début des années 1980". [Avec l'AFP]
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